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Montmartre secret

Montmartre secret

Pour les Amoureux de Montmartre sans oublier les voyages lointains, l'île d'Oléron, les chats de tous les jours. Pour les amis inconnus et les poètes.

montmartre monuments. cabarets. lieux

Publié le par chriswac
Publié dans : #MONTMARTRE Monuments. Cabarets. Lieux


Vus de l'impasse Marie-Blanche  un mur de briques et une tour nous rappellent qu'il y eut ici une grande demeure construite à l'époque romantique par le Comte Charles de L'escalopier.

A l'époque de sa construction, en 1835, en pleine vogue du style troubadour, la demeure attire de nombreux curieux. Elle est alors au milieu des champs, à quelques pas du cimetière du Nord, dit de montmartre.

Ce qui attire les badauds, ce sont des serres extraordinaires. Elles sont ornées de roches, de bassins et chauffées à la vapeur. Elles abritent les plantes les plus rares. A côté des bananiers, on trouve des bambous, des papayers, des arbres à pain, des cocotiers en pleine terre. Une des serres, la plus visitée, offre aux regards émerveillés des parisiens, les plus belles orchidées, les muscadiers, les copayers, les mancenilliers, les bois de santal....

Les serres sont hélas détruites par le Comte lui-même (c'est pour cette raison que Nicole, amoureuse de la végétation luxuriante, m'entraîne chaque année sous les tropiques).
 Le Comte, grand érudit, nommé conservateur de la bibliothèque de l'Arsenal, dont Nodier, qui a sa rue de l'autre côté de la Butte, est le responsable en chef, les remplace par une immense bibliothèque, en grande partie consacrée aux ouvrages d'archéologie chrétienne.
Passionné par le Moyen-Âge, comme beaucoup de ses contemporains, et comme le plus grand d'entre eux, notre Victor national, il décore sa maison en gothique flamboyant et installe un musée médiéval de pièces d'orfèvrerie, d'ivoire, de bronze. Il acquiert des émaux très rares et des reliques pour la plupart douteuses mais dont le reliquaire, lui est authentique!
Notre Escalopier écrit un ouvrage qui lui apporte une petite célébrité et lui vaut le hochet suprême, la croix de la légion d'honneur. Il s'agit de la traduction d'un traité du moine Théophile (XIIème siècle) sur les arts de son temps.
La porte étant entrouverte; je me permets d'entrer sur la pointe des pieds. Le grand escalier semble accueillir quelques fantômes de lumière.


Une femme insatisfaite  et mélancolique attend sur le mur que s'ouvrent à nouveau les portes sur les forêts tropicales et les perroquets multicolores.


Au fait, ce nom de L'Escalopier, que signifie-t-il ?  Notre homme débitait-il des escalopes à la Cour de France?  Ou bien portait-il sur la tête un chapeau qui en avait la forme?  
Que nenni ! 

Le nom est italien. Et ancien. Et prestigieux. La famille Della Scala régna sur Vérone jusqu'au jour où elle en fut chassée par les Vénitiens (au XIVème siècle). Réfugié à Paris, Pietro Della Scalla voulut franciser son nom :
       
"Renversé de fortune, il renversa son nom
  L'Escalopier lui fut nom pour Piero L'Escale"



Aujourd'hui, il faut tourner dans les petites rues de Montmartre aux noms de femme, pour découvrir ce qui subsiste de ce monde créé par cet érudit qui, passionné d'archéologie se rendit en orient, y découvrit les restes d'une martyre, Théodosie, originaire d'Amiens (!!!) dont il obtint du Saint-Siège la translation dans sa ville natale.


Au coin de l'impasse Marie-Blanche et de la rue Constance, dans une vitrine, un tigre se souvient peut-être d'avoir planté ses crocs dans la chair tendre de Théodosie. Mais il est trop débonnaire pour avoir de tels souvenirs... Il rêve avec ses compagnons de carton sur les fantômes, végétaux et humains, de la demeure du Comte marie-Joseph Charles de L'Escalopier.

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Publié le par chriswac
Publié dans : #MONTMARTRE Monuments. Cabarets. Lieux


65 boulevard de Clichy, au rez-de-chaussée d'un immeuble banal, une croix et une inscription sur la pierre indiquent la présence de la chapelle Sainte Rita. La sainte étant la patronne des cas désespérés reçoit d'innombrables visites dont le flot n'est pas près de se tarir.





Le vitrail, pile et face. Côté rue, il reflète la ville, les fenêtres, les voitures, les passants, les amateurs de sexe facile et de spectacles érotiques. Côté chapelle, Rita serre des roses contre son coeur. On ne sait pas grand chose de cette Margarita italienne contemporaine de jeanne d'Arc sinon qu'elle connut bien des malheurs sur lesquels elle flotta dans sa petite barque de douceur et de prières.... Elle transforma son mari violent et macho en type sympa. Ce qui n'empêcha pas le brave homme d'être assassiné, comme le seront ses deux garçons.  Elle eut ensuite beaucoup de mal à se faire accepter dans un couvent où elle fut gratifiée d'une plaie sur le front alors qu'elle priait devant un Christ couronné d'épines. Sa plaie saigna pendant des années et indisposa ses consoeurs.

Elle mourut en odeur de sainteté, au propre comme au figuré car il paraît que lorsqu'elle ferma les yeux, un parfum céleste, infiniment plus suave que Kenzo ou autre Guerlain, se répandit dans sa cellule et sur tout le couvent. un parfum de roses.


De vieilles femmes dont le mari est à l'hôpital, entre vie et mort, de jeunes femmes dont l'enfant est malade, des désespérés de l'amour, des rêveurs d'avenir viennent allumer une petite flamme devant la lourde statue. J'ai envie de citer Villon : "Ici n'est point de moquerie"...et j'abandonne mon esprit critique et rigolard devant la douleur et les rêves de notre humanité.


Je m'asseois devant la verrière turquoise, couleur Maldives et jeprie avec mes pauvres mots pour ceux que j'aime et qui souffrent. 



Rita

Je viens te prier pour te demander de l'aide
Je viens te prier dans le malheur
Donne-moi de savoir avec mon âme avec mon coeur
Que Dieu est aux côtés de ceux que j'aime
De ceux qui souffrent                                                                                       De ceux qui doutent                                                                                          
Il tient la main de mon père qui n'a plus de mémoire
Il soutient ma mère qui ne peut plus marcher 
Il veille sur mon amie qui meurt de son cancer
 
Que Dieu m'aide à les accompagner
A leur donner à boire 
A leur tenir chaud
A leur sourire
A les soutenir
Non pas avec mes pauvres forces 
mais avec celles que de Lui je reçois
Lui qui désaltère celui qui a soif
Lui qui réchauffe celui a froid
Lui qui aime celui que nul ne regarde
Lui qui relève celui qui tombe.

Aide-moi, Sainte Rita
A dire comme un enfant
Mon père
Que ta volonté soit faite
Mon Père
Que ta volonté d'AMOUR soit faite. 


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Publié le par chriswac
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L'étrange église édifiée  au début du XXème siècle par Anatole de Baudot, architecte révolutionnaire et trop peu reconnu abrite un autel unique en son genre qui fut dessiné par Baudot lui-même. Il est comme l'église en ciment armé et orné de motifs de grès semblables à ceux qui ornent une partie de la façade et du porche.

Le procédé Bigot consiste à poser les motifs de grès sur le ciment frais. il a été utilisé sur les parties courbes du porche, sur les cordons qui courent entre les briques et sur les fenestrages. Il me rappelle la technique iranienne des décors floraux de céramique posés à même l'enduit. Nous sommes loin évidemment de la splendeur d'Ispahan mais on ne peut s'empêcher de voir dans ce rayon de soleil un clin d'oeil que se font deux religions et deux époques.


Baudot aimait l'Orient, comme beaucoup des artistes de son temps et comme les créateurs du Modern Style, mais il ne laissa cette influence s'exercer que sur quelques éléments décoratifs de ses constructions. Quelques éléments trop rares serais-je tenté de dire. Le futur dépouillement et la froideur de l'architecture des années trente me font horreur. Ils accompagnent sans les trahir les fascismes, nazismes et autres joyeusetés. Il faut aimer l'excès, les paillettes, les lumières et les guirlandes. L'art français s'en méfie comme du mauvais goût mais le facteur Cheval chez nous et Gaudi à Barcelone faisant fi de cette critique donneront au monde des palais qui feront rêver les enfants et les fous.




Des motifs de bronze représentent les quatre évangélistes, tels qu'ils apparaissent dans l'Apocalypse : le jeune homme symbolise Mathieu, le lion Marc, le taureau Luc et l'aigle Jean. "Au milieu du Trône et autour de Lui, se tiennent quatre Vivants, constellés d'yeux par-devant et par-derrière. Le premier Vivant est comme un lion; le deuxième vivant est comme un jeune taureau; le troisième vivant a comme un visage d'homme; le quatrième Vivant est comme un aigle en plein vol."

Les bronzes sont l'oeuvre de Pierre Roche (ainsi que les "cul-de-lampe" du porche.)


Au centre de l'autel, la porte du tabernacle avec les symboles eucharistiques : les épis de blé et les feuilles de vigne, le pain et le vin. Sur la croix, l'agneau du sacrifice tend le cou au couteau du boucher.

 Religion des victimes, des abandonnés, des persécutés, le christianisme oublie parfois ses origines, n'est-ce pas Benoît?


Je rentre à la maison et jette un coup d'oeil aux vignes encore enneigées. Confiance! le printemps va finir par arriver!

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Il faut beaucoup d'attention pour discerner sur les murs sombres de l'église les fresques qui ornent le choeur et les bas-côtés. De loin, on a l'impression que des fantômes s'agitent dans la pénombre. Il faut dire que le programme pictural ambitieux des origines n'a jamais été parachevé. Ainsi les peintures du choeur dues à un certain Planzeau (dont j'avoue ne rien connaître) n'ont été que partiellement réalisées. Il s'agit en fait de toiles marouflées qui représentent à droite les Noces de Cana et à gauche la Cène.


Un christ très conventionnel emplit miraculeusement les jarres d'un vin délicieux. Les invités s'étonnent qu'on ait gardé le meilleur cru pour la fin des noces.
En dehors de la symbolique de l'eau changée en vin, lui-même appelé à devenir sang,ce miracle me plaît. Il aurait dû convertir ma femme qui se damnerait pour un petit rosé bien frais.
A gauche, la Cène. Jésus y apparaît plus électrifié que jamais. Saint-Jean s'appuie contre lui amoureusement.
Je ne sais si l'on doit regretter de n'avoir pas laissé le loisir au sieur Planzeau de peindre le fond du choeur où a été badigeonné un rideau beigeasse.

Les fresques des deux chapelles me semblent plus intéressantes bien que dans un piètre état. Paroissiens de Saint-Jean, à vos porte-monnaie !


Marie qui pour une fois a un teint de Palestine intercède pour ceux qui souffrent (c'est un sacré boulot, avouez-le !)

Pour ces blessés soutenus par des religieuses ou pour ce soldat juste marié et qui part pour les tranchées.

 
 Les fresques sont d'Eugène Thiéry, prix de Rome. Je m'inquiète quand on précise ainsi. Vous imaginez : fresques de Van Gogh, prix de Rome ! Impossible me direz-vous puisque le Van Gogh en question n'a jamais reçu de prix. En admettant qu'il  eût été décoré, son génie n'aurait certes pas besoin pour éclater au grand jour de cette rosette minuscule à sa boutonnière. Bon ! En fait, il ne manque pas de talent Thiery même si son nom n'est guère passé à la postérité...


De l'autre côté, un barbu. C'est Joseph le menuisier, patron des artisans. Il accueille la foule des travailleurs parmi lesquels l'artiste a eu la modestie de représenter les peintres :

Et les musiciens... Le violoniste n'est autre que l'organiste de l'époque, Vadon :

Les autres fresques représentent 4 stations du Chemin de Croix. Elles ne sont pas terribles terribles.Mais je ne peux m'empêcher de regarder le visage du Christ tombé. Il me rappelle un ami qui avait les yeux bleus et qui maltraité par la vie se relevait toujours, jusqu'au jour où...


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Publié le par chriswac
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Je gravis les trois cents marches pour trouver refuge un instant dans ma vieille église. Dans le choeur, à droite, le tableau de José Ribéra : La descente de Croix  jette une tache blafarde sur les murs de pierre. C'est un tableau ténébreux qui nous fait entrer dans la nuit de la mort. Le lourd cadavre pèse de tout son poids inerte et les bras décloués semblent se replier comme les ailes d'un oiseau de mer mazouté. Il évoque le corps blafard des cours de dissection ou les animaux depecés pendus au crochet des abattoirs. La femme sur laquelle il s'appuie un instant avant de s'écrouler apparaît sur l'encre du ciel, comme un masque blanc qui exprime sans espoir la douleur et l'interrogation. Les yeux sans vie du supplicié sont tournés vers lui comme vers un astre mort.
 




















En face de Ribéra, de l'autre côté du choeur, s'élève vers les voûtes l'immense toile de Parrocel : Jésus au mont des Oliviers. Elle est divisée en trois parties et comme emportée par la diagonale des deux personnages du centre de l'oeuvre.















En bas les apôtres endormis. Ils ont la lourdeur en eux du sommeil qui vous entraîne malgré vous et vous colle à la terre. Ils savent que leur ami est seul et qu'il prie dans l'angoisse et la terreur de la torture promise et de la mise à mort; ils étaient certains de l'accompagner dans cette dernière nuit et les voilà affaissés sur eux-mêmes, collés au rocher comme au ventre maternel. Ils sont seuls dans leur nuit comme est seul celui qui attend sa mort. "Quiconque meurt, meurt à douleur"  

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Au centre du tableau, l'ange de l'agonie. Il vient dans le gris et le bleu qui dissipent les ombres. Il montre le chemin de l'apaisement. Il ne ment pas, il ne dit pas que le passage sera facile mais il tend la main comme dans les air un trapéziste veut saisir celui qu'il désire entraîner vers les hauteurs.

 

 



















Le Christ, les bras encore tournés vers le sol et vers ses compagnons endormis, se tourne lentement vers lui et se détache de cette terre qu'il aime et dont il connaît chaque senteur et chaque vibration. Le ciel d'orage succède à la nuit.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

En haut du tableau apparaît l'or du monde promis, la clarté de la demeure céleste. La croix et les instruments du supplice sont portés par des angelots qui semblent jouer. Etrange apothéose que cette bande de bébés grassouillets qui manient la couronne d'épines, la lance, le fouet, l'éponge imbibée de vinaigre comme des garnements s'amuseraient avec un insecte capturé, un animal piégé... Ils sont censés représenter l'innocence et me donnent l'envie furieuse de leur botter les fesses.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Sous la Descente de Croix de Ribéra, une grande toile met en scène Le Christ aux outrages. Elle est due à un anonyme qui ne perd rien à le rester. Il y a là-dedans beaucoup de théâtre et de gesticulation. Le Christ lui-même se demande ce qu'il fait dans ce tableau. Il semble attendre comme un modèle attend la fin de la pose pour toucher son salaire.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Dans la petite chapelle de gauche, sur le mur de droite au-dessus des pierres tombales des abbesses, une toile du Guerchin illustre Le reniement de Saint Pierre. Pierre se chauffe les mains à un braséro. Son corps se dirige vers la chaleur, vers la vie mais sa tête est déjà tournée vers cette femme qui l'invective : "Toi aussi tu étais avec le Nazaréen Jésus". Elle insistera trois fois et trois fois, il niera : "Je ne connais pas cet homme dont vous parlez".

 

















Etrange visage que celui de cette servante. Pas de haine, pas de violence mais un étonnement douloureux devant la lâcheté et l'abandon. Derrière elle le soldat qui a compris a déjà posé la main sur l'épaule de Pierre. Il est curieux et rassurant que cet homme qui a renié par trois fois au mépris de l'amour ait joué un tel rôle par la suite au point d'être le premier d'une longue lignée de papes. Ne nous étonnons plus des errances et des manquements de la hiérarchie écclésiastique et ne souhaitons pas à tous les prélats, les prêtres, les responsables qui ont trahi le Christ de finir comme Pierre sur une croix renversée, la tête en bas.






















Et pour terminer la visite, jetons un oeil rapide aux deux grands tableaux, dans le transept sud. Ils représentent Geneviève patronne de Paris et bergère à ses heures. Ils sont dans le plus pur style saint sulpicien et d'une sucrerie un peu écoeurante. Pourtant, je les considère avec tendresse. Le nom de Geneviève a été porté par une amie qui est morte il y a moins d'un an. C'était une femme remarquable, douce et humble, toujours préoccupée des autres au point de ne pas s'inquiéter de sa propre santé et de laisser en elle progresser un sale cancer qui l'emporta.









 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 Geneviève,que la vie te soit douce comme une caresse.

Lien : Les vitraux de Saint Pierre de Montmartre (Max Ingrand)  

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 Cette belle journée d'automne invite à la balade dans un Montmartre toujours surprenant. Je rends visite à une vieille dame du début du siècle dernier, une vieille dame que je n'avais jamais vraiment regardée, l'ayant vite jugée disgracieuse et de peu d'intérêt.  Il est temps pour moi de lui rendre justice et de la regarder vraiment. L'église Saint-Jean est aujourd'hui au coeur d'un quartie branché très différent de ce qu'il était quand fut décidée la construction de l'édifice. La seule église de Montmartre était alors Saint-Pierre, perchée au sommet de sa butte et dont l'état était si pitoyable qu'elle dut être fermée au culte sur ordre de la Préfecture. Aucune restauration n'était alors prévue et il fallut donc envisager la construction d'une nouvelle église, d'autant plus nécessaire que la population s'était accrue et était devenue l'une des plus denses de Paris depuis le décret d'annexion de Montmartre à la capitale par décret de Napoléon III en 1859.

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 Etrange église en vérité dont l'architecte, disciple de Viollet le Duc, était en son temps révolutionnaire. Il prônait l'utilisation des matériaux modernes comme la fonte ou le ciment armé et n'appréciait en rien les tendances architecturales à la mode, marquées par les sièces précédents et soucieuses de respecter des règles classiques. Il admirait par contre un Baltard, génial architecte des Halles détruites sous le règne d'un certain Pompidou qui se piquait d'être un homme de goût et qui n'eut aucun scrupule, pour adapter Paris à la bagnole (comme il disait) de transformer les voix sur berges en autoroutes et le coeur palpitant de Baltard en forum mercantile et foutraque.  Anatole de Baudot donc, l'architecte de Saint-Jean, était un homme socialement engagé, libre penseur et rationnaliste qui tenait à promouvoir une architecture sociale liée aux progrès de son temps. Citons parmi ses réalisations le lycée Victor Hugo dans le Marais, le lycée Lakanal à Sceaux, le théâtre et le lycée de Tulle...
Il va donc utiliser le ciment armé et non le béton qui deviendra la règle par la suite. L'édifice apparaît grâce à cette technique comme un monolithe, un seul bloc où tout est solidaire, les murs ne supportant aucune charge mais étant un remplissage entre les piles.

 
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Mais Baudot était aussi sensible à la mode orientaliste de son époque et les pastilles de grès coloré commandées à Bigot, fixées sur le ciment encore frais, évoquent toutes proportions gardées les céramiques bleues des mosquées persanes, un décor d'écailles et de miroirs... Des anges Art nouveau s'envolent immobiles dans leurs ailes de grès.

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       C'est un fort contraste avec le ciment et les briques que cette mosaïque bleutée et vibrante qui évoque la danse de Salomé et le miroitements des étoffes orientales!  L'intérieur de l'église peut surprendre par l'aspect gris vert des murs. La lumière cependant s'invite par les immenses baies des vitraux. Le vitrail du choeur est assez fade mais tous les autres dus au maître-verrier Jac Galland d'après des dessins de Pascal Blanchard sont remarquables de précision et de couleurs. 48 vitraux curvilignes sont dédiés à Marie.


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    Celui-ci nous montre la bête de l'apocalypse terrassée par la Vierge symbolisée par les lys. Parmi les autres vitraux, de part et d'autre du buffet d'orgue, nous découvrons les cavaliers de l'Apocalypse .


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      Nous avons en haut le cheval du quatrième sceau : "C'était un cheval blême. Celui qui le montait, on le nomme "la mort". Pouvoir lui fut donné sur le quart de la terre pour tuer par l'épée, la famine, la mort et les fauves de la terre."

En-dessous, c'est le cheval rouge du deuxième sceau : " Alors surgit un cheval rouge feu. A celui qui le montait fut donné le pouvoir de ravir la paix de la terre pour qu'on s'entretue et il lui fut donné une grande épée."

Les vitraux de la nef représentent entre autres, la multiplication des pains et Jésus et la femme adultère.

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                                                     La multiplication des pains.

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                                                     Jésus et la femme adultère.


 La femme se croit condamnée et se cache le visage tandis que Jésus dessine sur le sol et qu'autour de lui la foule se prépare à jeter des pierres pour massacrer l'accusée. C'est un beau passage de l'Evangile où sont renvoyés ceux qui jugeaint et voulaient tuer sans état d'âme celle qui avait aimé.
De nombreuses peintures ornent les murs de l'église. Elles ne sont pas au mieux de leur forme. tout un esemble était prévu dont seule une petite partie fut réalisée. Elles se détachent à peine de l'ombre et semblent environnées de brumes.

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 Saint Jean et son aigle me montrent la direction de la sortie. J'allume une petite flamme pour tous ceux que j'aime et je rentre à la maison par la place des Abbesses où m'accueille un sympathique soleil!
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lien : Saint Jean de Montmartre. L'autel d'Anatole de Baudot.

 

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Il ne reste à Montmartre que deux des trente moulins qui pendant des siècles ont battu des ailes dans le ciel. Leur histoire est singulière autant que celle de la famille de meuniers à laquelle ils ont appartenu : les Debray.


  Avant d'esgourder leur goualante, je ne résiste pas au plaisir de citer quelques uns des moulins en activité au XVIIIème siècle :    Le Moulin de la Fontaine-Saint-Denis, le Moulin-des-Prés, le Moulin-Vieux, le Moulin-Neuf, le Moulin de la Béquille, le Moulin du Vin, le Moulin-Paradis, la Turlure, la Lancette, la Poivrière, la Grande-Tour, la Vieille-Tour, la Petite-Tour...et les deux rescapés que l'on peut voir aujourd'hui rue Lepic : le Radet et le Blute-Fin, plus connu depuis un certain temps sous le nom de Moulin de la Galette.


Le Radet, à l'angle des rues Lepic et Girardon.

       Mais revenons à nos Debray. Ils étaient meuniers de père en fils sur la Butte depuis le Moyen-Âge et ils assuraient la charge de "meuniers des Dames de Montmartre", religieuses auxquelles appartenaient quelques moulins. Elles les perdirent dans la tourmente révolutionnaire comme elles perdirent la tête, à l'image du Saint Patron de la butte décapité quelques siècles plus tôt. Les debray achetèrent les moulins où ils travaillaient lorsqu'ils furent vendus comme biens nationaux. Les deux survivants qui ornent toujours la Butte devint donc leur propriété.


        Le Moulin de la Galette.

 
       En mars 1814, les Russes s'emparent de Montmartre. Les quatre frères Debray ne l'entendent pas de cette oreille et se battent comme des lions. Trois d'entre eux sont tués. Le quatrième se réfugie avec son fils dans son moulin où ont été installées des pièces de canon. Il veut venger ses frères et se bat avec une colère très efficace, causant la mort de plusieurs cosaques. Mais le combat est inégal. Il est saisi brutalement et massacré dans les règles russes de l'art tandis que son jeune fils est transpercé par une lance ennemie
.



 Le corps du dernier frère est découpé en morceaux, quatre quartiers pour être précis, qui sont attachés aux ailes de son moulin que ses bouchers s'amusent à faire tourner. Pendant la nuit, la veuve du meunier viendra détacher les restes sanglants de son mari pour les enfouir près de l'église Saint-Pierre. Plus tard un petit monument funéraire surmonté d'un moulin de pierre rendra hommage au valeureux combattant (vous ne pourrez lui rendre visite qu'un seul jour par an, le cimetière paroissial où reposent avec Debray, Bougainville et Pigalle n'ouvrant ses portes qu'à la Toussaint). 
      Le fils mal embroché survivra mais ne pourra jamais avaler que du lait alors que sur la butte on aimait tant le petit vin de la Goutte d'Or. Les accros de la dive bouteille n'ont jamais pensé à ce moyen radical de se libérer de la dépendance pinardière.



 C'est pourtant ce fils condamné au lait qui très amateur de jolies danseuses et lui même danseur émérite transformera son moulin en bal populaire. La famille Debray ne gardera que le Blute-Fin qui deviendra en 1895 Moulin de la Galette et qui sera très fréquenté par les peintres. Il inspirera Renoir, Toulouse-Lautrec et Picasso... Le Radet que nous voyons ci-dessus étant en très mauvais état et menaçant de s'écrouler, les debray cédent à la mobilisation des montmartrois qui veulent le sauvegarder et l'offrent à la Société du Vieux Montmartre qui le restaure.

Le Moulin de la Galette est en fait le dernier rescapé en état de marche. Malheureusement il ne se visite pas et on ne peut que lui faire un grand signe en ouvrant les bras. Mais prenez garde de ne pas vous envoler...Il se passe de drôles de choses à l'ombre des moulins !


 

liens: le Château des Brouillards à Montmartre

Montmartre. La Goulue et Toulouse Lautrec.

Montmartre: Jane Avril, Toulouse Lautrec.


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Publié le par chriswac
Publié dans : #MONTMARTRE Monuments. Cabarets. Lieux






















Hier jour de grand soleil sur la butte. Je pars à l'assaut et compte les 300 marches qui me séparent de la vieille église tapie à l'ombre de l'imposant Sacré-Coeur. J'ai envie de revoir les vitraux de Max Ingrand dans la lumière de cette belle journée.

















Dans le choeur, les trois grandes verrières représentent le christ au centre, Saint-Pierre à droite et Saint-denis à gauche. A tout Seigneur tout honneur, approchons-nous du vitrail central :






















Le sang jaillit comme des étoiles rouges et les mains crispées autour des clous se referment comme des araignées. Seul l'index de la main gauche trouve la force de montrer le ciel et l'écriteau qui se voulait humiliant et grotesque : Jésus de Nazareth, Roi des Juifs.
La partie basse du vitrail montre Marie, visage de douleur tourné vers son fils et Jean le plus aimé qui soutient la femme brisée 

               
                                                





















Je m'étonne d'un troisième visage au centre exact du vitrail. contrairement aux autres qui sont stylisés, caractéristiques du géométrisme du milieu du XXème siècle, il paraît réaliste. J'ai voulu savoir qui était cette femme qui semble fixer le spectateur.
 Elle serait la propre femme de l'artiste au pied de la croix où elle reçoit chaque matin la lumière du soleil levant.



















A droite, voici Saint-Denis, premier évêque de Paris et martyr bien connu qui perdit la tête sur la butte avant de la reposer sur son cou sanglant et de dévaler la pente jusqu'au lieu où s'élèvera la Basilique où voudront s'étendre, en attente d'éternité tous les rois de la douce France.



















Au bas du vitrail, la tête du martyr semble dormir, bien calée sous sa mitre, les lèvres entrouvertes sur un sourire de bienheureux.

















Et maintenant place au patron! Saint-Pierre lui-même qui a supplanté Saint-Denis dont l'église mérovingienne portait pourtant le nom. Comment a-t-il donc fait? C'est qu'au XIIème siècle, l'abbaye en fort mauvais état est confiée à des religieuses bénédictines venues de l'abbaye Saint-Pierre-des-Dames à Reims. Elles déménagent avec leur saint patron. Le choeur dédié à Saint-Denis sera séparé de la nef consacrée à Saint-Pierre et qui servira d'église paroissiale.

















Au bas du vitrail, le fameux gallinacé rappelle le reniement de Pierre. "Avant que le coq n'ait chanté tu m'auras renié trois fois". Le thème du reniement se retrouve sur un autre vitrail. Huit des vitraux sont consacrés à l'apôtre : La marche sur les eaux, La vocation, Tu es Pierre, La Délivrance, Le martyre, Le reniement, La crucifixion, Le vitrail du choeur.














Le Reniement






Encore le coq (l'avons-nous bien choisi, nous les Gaulois, comme emblême national? Serions-nous enclins à la trahison? Mais non me dit mon frangin, c'est parce que comme lui, les deux pieds dans la M...., nous chantons à tue-tête!)












La marche sur les eaux








                                                      


                                                                                                                        
J'aime beaucoup cette euvre-là. Les pieds pris dans la mouvance des bleus et des verts, comme si nous étions sous l'eau et n'apercevions que la plante brune des pas, entre quelques éclats de soleil.











"Tu es Pierre et sur cette pierre, je bâtirai mon Eglise."


















La délivrance





Pierre est en prison et un ange vient briser ses chaînes. "Soudain l'ange du Seigneur survint et le cachot fut inondé de lumière. Il frappa Pierre au côté et le fit lever : Debout vite! dit-il. Et les chaînes lui tombèrent des mains."
Allez, au boulot tous les anges! Il n'y a pas que Pierre... Il y a les vieux prisonniers de la maladie et de la démence, il y a les désespérés de la vie, les abandonnés, les meurtris trop faibles pour se relever. Au boulot les anges! Vous savez briser les chaînes et ouvrir les portes... Il y a du pain sur la planche pour toutes vos légions
!






















Avant de quitter l'église, je m'arrête devant ce vitrail qui représente la Vierge protégeant de son manteau la patronne de Paris, la jeune fille de Nanterre, Sainte Geneviève qui tient la Cathédrale que les parisiens ont fait monter vers le ciel. Bizarre me dis-je, il y a bien peu de vitraux  ici consacrés aux femmes. Presque tout est pour  les hommes :Pierre, Ignace, Benoît, Denis, le Christ...


Lien : Visite de l'église Saint Pierre de Montmartre. 1) Des origines à la Renaissance.

 

 

 

 

 

 

 

 



C'est donc avec des femmes que je termine ma promenade sous les vitraux de Max Ingrand. Et à toi ma petite Geneviève, si fragile et si modeste, j'envoie des baisers de terrien, en attendant un jour de frotter mes plumes contre les tiennes entre deux nuages.

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Publié le par chriswac
Publié dans : #MONTMARTRE Monuments. Cabarets. Lieux
















  Une deuxième visite de cette église qui pour moi est la plus belle de Paris (je ne cherche pas à être objectif puisque je suis montmartrois). Avant de quitter le XVIème siècle, mentionnons la rumeur qui n'a cessé de ronronner sur la butte. Lorsque Henri IV fit le siège de Paris et campait avec ses troupes sur les hauteurs de Montmartre, il aurait fréquenté assidument l'abbesse dont la beaut était de notoriété publique. Elle était la petite nièce de Catherine de Clermont et n'avait que dix-huit ans lorsqu'elle devint abbesse. Le Vert Galant aurait obtenu ses faveurs et aurait avec ses hommes transformé le couvent en maison de plaisirs. Il est vrai qu'à l'époque toutes les vocations n'étaient pas de bon aloi et pour ne parler que des moines, Rabelais n'écrit-il pas qu'il suffisait à une femme de passer à l'ombre d'un monastère pour tomber illico enceinte!
Au début du XVIIème Une abbesse de grand renom dirige l'abbaye. C'est Marie de Beauvilliers qui restaure la discipline et redonne à l'institution un grand rayonnement. La chapelle des martyrs devient un lieu très achalandé. Les pèlerins s'y précipitent depuis que des ouvriers en y faisant des travaux ont découvert une crypte qui aurait été une chapelle des premiers chrétiens de la région et où Saint Denis en personne aurait dit la messe. Un prieuré est construit. La partie haute de l'abbaye qui commençait à se délabrer est abandonnée au profit de la partie basse. Entre les deux partie fut construite une allée couverte qui dévalait la butte sur plus de 400mètres ! C'est la princesse Françoise de Lorraine de Guise qui est alors abbesse. Citons parmi les abbesses qui se succéderont, Marguerite de Rochechouart, grande érudite qui parle le latin, le grec et qui est rrès versée en philosophie. N'oublions pas Emilie de la Tour d'Auvergne et Catherine de la Rochefoucauld. Les piétons de Paris retrouveront leur nom en arpentant les rues depuis la place des Abbesses jusqu'au IXème arrondissemrnt un peu plus bas, en traversant le boulevard de Rochechouart.











Pierre tombale dans l'absidiole du baptistère


 











La façade de l'église rue du Mont Cenis, face à la place du Tertre. Cette façade un peu plate est sans inspiration date de la fin du XVIIIème siècle





Mentionnons enfin la dernière abbesse de Montmartre : Marie-Louise de Montmorency-Laval. En 1789, les révolutionnaires pensant qu'il y avait des armes dans l'abbaye projettent de l'attaquer. Après quelques péripéties, l'abbesse qui s'est enfuie et se cache à Bondy est dénoncée (tradition bien française) arrêtée et transférée à la Conciergerie. L'abbesse, vieillie est devenue sourde et aveugle. Elle est jugée par le tribunal révolutionnaire. Fouquier-Tinville ne pouvant recevoir aucune réponse de cette femme dictera au greffier une phrase devenue célèbre et qui n'honore pas son auteur :" C'est bon, c'est bon, écrivez qu'elle a conspiré aveuglément et sourdement." Elle est conduite place du Trône (aujourd'hui place de la Nation) où  elle est guillotinée avec quinze autres religieuses. Elles chanteront jusqu'à ce que tombe la dernière tête. Elles sont enterrées au proche cimetière de Picpus où vous pouvez voir leurs tombes.
L'abbaye est vendue comme bien national; elle est complètement détruite et démontée pierre à pierre; Il ne subsiste que l'église paroissiale qui devient pour quelques année "Temple de la Raison" et qui lorqu'elle retrouvera son usage cultuel gardera le nom de Saint Pierre aux dépens de Saint Denis qui était pourtant le saint patron de la paroisse de Montmartre.

















Franchissez la grille et découvrez la façade assez banale, ornée de portes de bronze qui ont été offertes en 1980 par le sculoteur Tomasso Gismondi. Vous voyez sur la photo la porte Notre-Dame. La porte centrale est consacrée à Saint Pierre et la porte de gauche à Saint Denis. Les vantaux sont à lire comme des vitraux. Le premier en bas à gauche représente l'annonciation, le deuxième en bas à droite : la nativité. Il suffit de les regarder en montant : le 3ème représente les noce de Cana, puis  Jésus rencontrant sa mère; le 5ème : Jésus en croix puis la déposition de croix. Le 7ème la Pentrecôtre et le dernier l'Ascension. Chacun appréciera selon son goût et sa sensibilité ces sculptures modernes qui semblent avoir connu l'usure du temps et font penser à des figures de glaise mal dégrossies.




Le dernier vantail de la porte de Saint Pierre (le martyre)


















Le troisième vantail de la porte de Saint Denis (Denis arrive à Paris).








  
A gauche de la cour d'entrée s'étend le cimetière du Calvaire où sont enterrées quelques personnalités comme Pigalle ou Bougainville. On ne peut visiter le cimetière qu'une fois par an à la Toussaint. La grille de Gismondi qui le sépare de la cour ne manque pas de force. Elle représente la Resurrection.
















Les vitraux ont été réalisés par Max Ingrand dans les années 50. Ils représentent le Christ, St Pierre, St Denis ainsi que d'autres saints vénérés sur la butte. Quelques uns (dans les absidioles ont un décor végétal). Ils sont de couleurs vives avec des rouges  vibrants.











Chapelle du Saint Sacrement.












Saint Benoît, Saint Ignace. Transept sud.

















Saint Pierre et le coq (choeur)






Parmi les assez belles réussites dans le mobilier contemporain religieux, on peut citer l'autel de cuivre émaillé de Froidevaux consacré en 1977. Pour une fois, la tendance minimaliste et misérabiliste a été abandonnée au profit d'une oeuvre qui puise son inspiration à la fois dans un passé médiéval où l'on réservait l'or et les pierreries aux objets liturgiques les plus sacrés et aux formes contemporaines stylisées et dynamiques.















La face principale représente la vigne de Montmartre, les maisons et les moulins. Le symbolisme y est clair et inclut Montmartre dans le mystère eucharistique du pain et du vin.

















Sur une des faces St Pierre est représenté avec ses inévitables clefs mais sans son gallinacé chanteur. St Dominique a lui aussi l'honneur d'un côté de l'autel pour des raisons familiales... Une tante des donateurs, soeur Marie Solange était en effet dominicaine.
 Dans le choeur vous pourrez découvrir plusieurs toiles de valeur. Un tableau assez impressionnant dû à José Ribera (début du XVIIème). C'est une descente de croix très sombre où le visage douloureux de la mère apparaît au dessus du corps supplicié du fils qui semble appuyé contre elle et dont les bras sont comme les ailes d'un oiseau blessé mais tentent de s'ouvrir encore pour accueillir les hommes.
 Un immense tableau de Parrocel (1750) représente Jésus au jardin des oliviers. Il est composé de trois parties : en bas, dans l'ombre les disciples endormis; au centre le Christ face à un ange qui lui tend les bras et au-dessus, dans la lumière la croix du supplice portée par des angelots.



















                                                                          











 Une autre toile représente le reniement de Saint Pierre par le Guerchin (début XVIIème). Pierre se chauffe les mains à un brasero et refuse de suivre la direction indiquée par le doigt de celle qui l'accuse, tandis qu'un soldat  pose la main sur son épaule. Cette attitude du saint qui semble préférer le confort de cette chaleur à l'héroïsme auquel l'invite l'homme en armes, attitude bien compréhensible et humaine nous interpelle aujourd'hui où tout engagement pour plus de justice et de fraternité implique que l'on abandonne ses pantoufles et son brasero! Et pourtant nous ne risquons pas d'être crucifiés la tête en bas...

















Une dernière toile de moindre facture, d'un artiste anonyme représente une flagellation. Elle est un peu gesticulatoire; seule la tunique rouge qui annonce le supplice donne un peu de force à l'ensemble et au Christ qui jette un regard de côté et se demande ce qu'il fait dans ce mauvais film.
 

Lien : le cimetière saint Vincent fin d'annee

















     Et maintenant  à vous de découvrir cette église à l'histoire mouvementée mais qui reste imprégnée de prières et de chants. Il est agréable de quitter l'agitation touristique du quartier pour s'y asseoir un moment et écouter le murmure des pierres.

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Publié le par chriswac
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Le mot de cliché convient tout à fait au Sacré Coeur. Clichés les photos obligées et stéréotypées que tous les touristes se doivent d'enregistrer, clichés les appréciations négatives sur le monument, clichés les jugements sans appel : c'est une horreur, c'est du plus parfait mauvais goût, c'est plouc et archi plouc.                    
 

     Il y a toujours eu de tels jugements sans appel sur les monuments parisiens. Sans remonter au Moyen Âge, il suffit d'évoquer la Tour Eiffel par exemple qui fit hurler les gens de goût qui n'avaient qu'une hâte : voir venir la fin de l'exposition universelle et le démontage du mécano. Il fallait un poète comme Apollinaire pour écrire : "Bergère, ô Tour Eiffel, Le troupeau des ponts bêle cfe matin..."

L'Opéra Garnier connut le même dédain et fut longtemps considéré comme archétype du clinquant et de l'esbrouffe du style Napoléon III. Plus près de nous Beaubourg déchaîna des torrents d'hostilité et de dénigrement; torrents qui ne sont toujours pas taris. Le Sacré Coeur, lui, fut dès sa construction considéré comme un gros tas, une laiterie, une hideuse verrue sur le ciel de Paris. L'engouement populaire donnait raison aux gens de goût qui ne pouvaient qu'être une élite.


Effectivement le monument inspira une surproduction de cartes postales d'une esthétique discutable mais qui avec le temps prennent une petite saveur kitch et rétro que quelques branchés appelleront "vintage"! L'origine même de la basilique reste un peu glauque. Nous sommes après la guerre de 1870, la défaite très lourde devant les Prussiens; nous sommes surtout après la grande révolte de la Commune et l'écrasement sanguinaire du mouvement populaire. Une institutrice de Montmartre en fut une figure héroïque, Louise Michel, dont le nom a été donné au square qui s'étend au pied du Sacré Coeur.



 Tous les malheurs de la France viendraient selon certains de la désaffection religieuse, des errements philosophiques et moraux. Nous serions punis parce que licencieux et amoraux! Vite il fallait se repentir, construire un monument expiatoire pour bien montrer que nous désirions retrouver notre statut de "Fille Aînée de l'Eglise". On cite parmi les initiateurs du projet Alexandre Legentil et Hubert Rohault de Fleury.



L'historique de la construction n'a que peu d'intérêt, signalons seulement que l'Assemblée Nationale en personne vote une loi qui déclare la Basilique d'utilité publique! Signalons aussi qu'une vaste collecte est organisée dans toute la France et qu'en fonction du don que vous aviez consenti, vous aviez votre nom gravé sur les pierres blanches de l'édifice. Il faut croire que les paroles évangéliques "que ta main gauche ignore ce que donne ta main droite" (citation approximative?) n'avait pas cours en cette fin de siècle.

En tout cas, la construction est lancée dès 1875 et commence par les travaux de consolidation du sous sol. Le terrain est en effet instable et il faut creuser des puits que l'on comblera et qui serviront de piliers d'assise au monument.  Tout est terminé avant la guerre de 1914 mais la consécration ne pourra avoir lieu qu'après cette dernière. Lors des bombardements de 1944, les vitraux exploseront et devront être refaits. Je pense à une vieille amie arménienne qui habitait rue Müller avec toute sa famille, enfin ceux de sa famille qui avaient échappé au génocide perpétré par l'armée turque et qui par miracle vit atterrir sur son lit une bombe qui resta intacte, peut-être émue par les malheurs qu'avait déja subis ces Arméniens...
La carte postale ci dessus est une "vision" de l'église, alors que l'érection n'a pas commencé. Elle donne une image étrange et peu fidèle de ce que sera en réalité le monument.


La basilique est aujourd'hui incontournable et fait partie du circuit touristique obligatoire qui passe par la place du Tertre et les vignes. Peu de visiteurs ont l'idée d'entrer dans la petite église paroissiale de St Pierre qui recèle des trésors et que je vous inviterai à visiter prochainement. Rien ne vous empêche cependant de déambuler à l'intérieur de la basilique, de scruter l'immense mosaïque dont certains détails sont assez beaux et représentent les saints de France. Vous aurez aussi l'occasion d'entendre le déluge du grand orgue qui est un Cavaillé-Coll.


Cette carte postale montre à quel point le réalisme n'était pas de mise! Elle est colorisée n'importe comment et ne rend en rien le chatoiement de la mosaïque qui est bleue et dorée. Les pierres elles mêmes n'ont pas ce jaune douteux mais elles sont blanches et nettes lorqu'elles ont été débarrassée de la fumée des cierges qui brûlent par milliers.

Et pour revenir à notre début sur les clichés, je dois avouer que pour moi le Sacré Coeur est plus qu'une grosse église. Il a un côté naïf qui plaît aux peintres du dimanche et
qui me touche  lorsqu'on le découvre avec ses jardins qui semblent défier la perspective et s'élever à l'horizontale avec ses petits personnages accrochés aux pelouses. On se croirait dans un tableau qui ignorerait la perspective.


Enfin, quand vous déambulez dans les ruelles de Montmartre, il surgit soudain, dans la lumière bleue du matin ou la lumière rose des soirs de vent comme un mirage, une ville byzantine venue des rives du Bosphore pour faire tourner ses coupoles dans le ciel parisien. Sur cette photo, à gauche vous voyez les galeries Dufayel (aujourd'hui la toiture a été rasée mais il reste heureusement le porche monumental surmonté des sculptures de Dalou) et à droite le campanile en construction.



Et pour terminer quelques photos prises aujourd'hui de mes fenêtres, avec un rayon de soleil sur les coupoles, et pour la dernière photo une partie de l'immeuble des galeries Dufayel, l'angle sur la rue de Clignancourt et la rue Christiani. C'est là qu'habita Aristide Bruant jusqu'à sa mort, lui qui déplorait la construction de grands immeuble sur les contreforts de la butte. On pense à Frehel : Des m'aisons d'six étages, ascenseur et chauffage ont couvert les anciens talus, le  P'tit Louis réaliste, est dev'nu garagiste et Bruant a maint'nant sa rue...






Mais laissons le dernier mot à Bruant qui avait l'art des mots et qui dans sa chanson "Ma Rosse de Gosse" écrit :


Ma Rosse de Gosse
Y a déjà pas mal de temps
Quand alle avait sept ou huit ans
A d'meurait su' la plac' du Tertre
Tout là haut, à Montmertre
A s'épanouissait, en sautant
Au pied du Sacré-Palpitant...








Je vous envoie un grand bonjour depuis le Sacré Palpitant!

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