Paysage où rien n'est stable...
Contrée argileuse sillonnée de chenaux capricieux...
Monde menacé et hostile où les oiseaux sont seigneurs...
Jadis l'océan était maître chez lui.
Il baignait les remparts de Brouage d'où partaient les grands navires pour le Nouveau Monde
Il s'enfonçait dans les terres
Il écartelait les estuaires....
Aujourd'hui il gronde au loin
Il ressasse vague après vague sa nostalgie des terres perdues
Il attend le jour de la reconquête, ce jour programmé par le réchauffement climatique et la folie des hommes.
Au-dessus de ce plat pays, le clocher de Marennes se dresse comme une montagne, comme un refuge de pierres dans un univers sans ossature.
Il restera debout le jour où les eaux auront reconquis l'espace et submergé les maisons basses.
Il sera témoin de l'époque révolue où l'homme domestiquait les marais de la Seudre et se croyait propriétaire du monde.
Une longue bâtisse de pierres s'élève au détour d'un chemin, étrange et rassurante à la fois.
Elle est là depuis le XIIème siècle, depuis le temps où la mer était proche.
De ce temps reculé, il ne reste pas grand chose, moins qu'à l'Abbaye aux Dames de Saintes qui était propriétaire du lieu.
Un moulin rapporte gros et les Dames empochaient une partie des grains que les paysans apportaient au meunier.
Le meunier était lui-même un personnage opulent qui gardait comme salaire une part de la farine si précieuse alors.
Du vieux moulin à marée ne subsiste que le corps central.
Toutes les dépendances, écuries et greniers ont été détruits.
On entre dans une pièce ornée d'une cheminée qui n'est pas ancienne.
Avec ses poutres et ses roues de bois le moulin était trop vulnérable pour qu'on laissât entrer le feu dans la place!
La marée haute pulse l'eau dans le chenal du Lindron qui passe sous l'arche de pierres et emplit après avoir franchi une vanne à clapet "la paresseuse" une retenue de plus de 8000m3, "le monard".
La marée descendante vide le chenal et il ne reste plus qu'à lever la trappe et laisser libre passage aux eaux prisonnières qui font tourner la roue et entraînent le mécanisme complexe qui permettra de moudre le grain.
Si vous visitez le moulin, une guide dynamique et pleine d'humour vous expliquera ce mécanisme reconstitué tel qu'il était au XVIIIème siècle avec ses pièces de chêne et ses roues dentées d'acacia.
Le seul problème est que vous courez le risque de ne pas le voir en mouvement car il faut de fortes marées pour l'entraîner. Quand le monard n'est pas assez plein, la force du courant n'est pas capable de faire tourner la roue.
Quelques visiteurs de bonne volonté sont invités à tourner la manivelle! Bon exercice avant d'aller déguster à Marennes les huîtres et le pineau!
Vous verrez alors comment les meules sont actionnées après la mise en branle de roues et d'axes et écrasent le grain versé par une trémie.
Une farine douce comme le talc naît de cette mécanique... Une farine qu'il vous est interdit de porter à la bouche sous peine d'infection bactériologique!
C'est qu'une tribu d'hirondelles a envahi le moulin! Elles sont heureusement protégées (vive la LPO, la ligue de protection des oiseaux de Rochefort)!
On ne peut les empêcher de se lester l'estomac et de décorer les deux étages, poutres et mécanismes compris d'étoiles blanches.
On devrait appeler le Moulin des Loges, le Moulin des Hirondelles!
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