Avant de prendre le virage et de grimper jusqu'au sommet de la montagne de Montmartre, la rue Lepic joue les originales en n'alignant ses immeubles que du côté pair. L'autre côté faisant partie de la rue Joseph de Maistre!
Le 36
Quelques immeubles y sont typiques de l'ancien village et datent de la création de la rue vers 1840.
Le 38
On ne compte plus les restaurants dans cette rue touristissime. Je dois avouer que je ne suis pas toujours très fier de ma ville quand je vois comment les clients sont accueillis dans certains d'entre eux. La baisse de la TVA a été un beau cadeau qui aurait bien mérité en retour quelques sourires !
Le 40
Mais au fond c'est une banalité valable dans la plupart des lieux touristiques : il vaut mieux y venir avec son pique-nique et s'installer dans les jardins!
Le restaurant tibétain le Ging Seng échappe à la morosité ambiante. Pourtant, à moins d'être un bouddhiste convaincu, c'est le thé au beurre salé qui rique de vous faire grimacer!
Le 42
Au 42, encore un restaurant! Celui-là a son histoire puisqu'il a été créé en 1909 par Arthur Delcroix, ami de Poulbot et de quelques peintres désargentés du quartier.
Il s'appelait "Chez Arthur" ce qui était fâcheux et portait ombrage à Madame Arthur de la rue des Martyrs. Après l'expérience des tranchées où l'on buvait le vin "à la pomponette" en se passant le gobelet qu'on ne posait que lorsqu'il étai vide, Arthur et Poulbot changent le nom du restaurant qui devient "La Pomponette"!
Le cadre est pittoresque; les murs ont gardé des illustrations et des tableaux offerts par les artistes convives. Pour ce qui est de l'accueil et de la cuisine, les avis sont très partagés. Ma seule expérience qui m'a appris la patience et n'a pas vraiment réjoui mes papilles ne me permet pas de donner un avis définitif!
Le 44
Le 33
Quand la rue reprend son allure de rue normale avec un côté pair et un côté impair, c'est encore un restaurant qui essaye de vous attirer! Il s'appelle "le Basilic", petit clin d'oeil à la sacrée basilique...
Le 49
Quelques beaux immeubles post-hausmaniens ont poussé sur les petites maisons du village. C'est une des caractéristiques du Montmartre moderne que cette succession hétéroclite de modestes habitations et de bâtisses opulentes. La rue lepic en présente une belle illustration.
Le 50
Au 1er étage de cet immeuble, le poète Jehan-Rictus a vécu de 1904 à 1913 (après avoir quitté le 64 de la même rue).
Jehan-Rictus par Valloton
Il connut le succès lorsque lui vint l'idée de composer un poème en faisant parler dans la langue populaire un clochard réaliste et utopiste. Ses poèmes sont violents, écrits dans une langue forte et colorée. Ils sont le plus souvent un appel à la fraternité et à la justice. Un rappel à l'ordre pour tous les politiques pleins aux as qui font des discours sur les pauvres :
Moi j'me dirai :"Quiens gn'a du bon!" L'jour ou j'verrai les Socialisses Avec leurs zamis Royalisses Tomber d'faim dans l'Palais Bourbon.
Car tout l'mond' parl' de Pauvreté D'eun magnèr magnifique et ample, Vrai de vrai y a d' quoi en roter Mais personn' veut prêcher d'exemple!
Illustration de Steinlen pour le Printemps de Jehan-Rictus
Il cultiva par la suite cette veine, ce qui lui valut la réputation d'être le poète anarchiste des pauvres.
Certains de ses poèmes mis en musique ont été de vrais succès populaires. Monique Morelli, en chantait encore dans les années 60.
Le 53
Après le retour des Communards, Jean-Baptiste Clément habita à cette adresse avant de remonter la rue pour s'arrêter au 110 où il vécut une vingtaine d'années, jusqu'à sa mort en 1880.
Une plaque rappelle que Pierre Jacob, "poète et chansonnier" demeura dans cette maison de 1939 jusqu'à sa mort en 1979. Il est l'auteur de la "célèbre chanson" (!) Rue Lepic... chantée par Yves Montand et dont il n'est pas certain qu'elle confère à son parolier une immortalité montmartroise....
...Et la rue Monte, monte toujours Vers Montmartre là-haut Vers ses moulins si beaux Ses moulins tout là-haut Rue Lepic...
Le 54
Le 54 est un des numéros les plus photographiés de la rue. Il contribue à la grande légende de Montmartre. C'est au 3ème étage que vécurent de 1886 à 1888 Théo et Vincent Van Gogh. Imaginez Vincent, son chevalet posé devant la fenêtre ouverte....
Tableau de Van gogh, peint de la fenêtre de l'appartement de son frère.
Van Gogh. Moulin de la Galette
Le 59
Dans le tournant de la rue, jouxtant le Passage Jules Dépaquit. les immeubles ont été édifiés sur un terrain où l'un des nombreux moulins de la Butte faisait tourner ses ailes. Il s'agit du Moulin de la Fontaine Saint-Denis, construit en 1724.
Le 62
Au 62, la plaque apposée sur l'école primaire publique rappelle que des enfants qui la fréquentaient et portaient une étoile, furent arrêtés, déportés et assassinés. Certains d'entre eux ont leur nom gravé sur des pierres tombales du cimetière voisin. ( Juifs d'Auschwitz à Montmartre).
Le 64
Nous avons vu que Jehan-Rictus avait vécu à cette adresse avant de descendre jusqu'au 50. Un autre artiste vécut dans cet immeuble en 1910. Il s'agit du peintre et caricaturiste Jean-Louis Forain.
Forain. 1878. Le client (crayon-aquarelle-gouache)
Le 68
Nous nous arrêterons aujourd'hui à l'arrêt du bus, au n° 68. Paul Fort passa cette porte avant de vivre quelques années rue de l'Armée d'Orient. Mais il n'y resta guère et ne fut pas vraiment influencé par l'air de la Butte. C'est du côté de Montparnasse qu'un autre poète, Georges Brassens s'empara de certains de ses poèmes pour les mettre en musique et les rendre inoubliables, comme le Petit Cheval ou la Marine...
Asseyons-nous sur le banc et attendons le passage du bus qui nous mènera plus haut pour la dernière partie de la visite de la rue Lepic!
1ère partie de la rue : Rue Lepic (1). Montmartre.