Rue Lepic (3)
La dernière partie de la rue Lepic suit les courbes de l'ancien sentier qui cheminait au pied des moulins. On y découvre quelques passages privés qui grimpent dur vers l'avenue Junot.
Nous sommes sur la crête, sur les terrains de la Butte les plus exposés aux vents. Les moulins y étaient nombreux comme le montre cette estampe. Presque tous ont disparu, remplacés par des immeubles d'habitation. Ayons une pensée pour eux... aussi lègère que le vent...
Nous avons vu la dernière fois le 59... où le Moulin de la Fontaine Saint-Denis construit en 1724 moulina pendant un siècle et demi...
Au 65, sur le terrain dont la limite nord est marquée aujourd'hui par le 21 avenue Junot, c'est le Moulin Neuf qui s'installa en 1741...
Au 73, l'ancêtre de la Butte, le Moulin Vieux vint se percher en 1591! Il disparut sous le Second Empire, en 1860... L'escalier privé suit le sentier que gravissaient les ânes...
A l'emplacement des n°85 et 87, à deux pas du Radet, officiait depuis 1623, le Moulin de la Petite Tour, parfois appelé la Tour à Rollin...
Sur cette rare photo, on peut voir la Petite Tour ou Tour à Rollin, le Blute-Fin, le Moulin Vieux et le Moulin Neuf....
On peut voir également le tracé de la rue Lepic au pied de l'alignement des moulins...
Entre les n° 89 et 93 il y avait le Moulin du Palais, édifié en 1860...
Le 102 est l'emplacement approximatif du Moulin de la Grande Tour, un des plus beaux moulins, construit en pierres. N'étant pas entretenu et menaçant ruines, il fut détruit pendant le Révolution française...
Le Blute Fin, le Radet et entre les deux la pointe du monument de la Mire du Nord.
Les deux survivants connus sous le nom de Moulin de la Galette sont devenus des stars montmartroises... (voir l'article qui leur est consacré : Moulin de la Galette. Histoire. peintres.)
Le Blute Fin (Moulin de la Galette)
La rue Lepic et quelques poulbots devant le moulin de la Galette
Le Radet... qui fut transporté du Château des Brouillards jusqu'à la rue Lepic (voir : rue Girardon le Radet.)
Le 72
Si la plupart des moulins ont disparu, il en est de même des hommes célèbres qui ont vécu dans cette partie de la rue Lepic. Aucune plaque au 72 ne rappelle que Ziem y eut son atelier, qu'il y vécut et y mourut...
Félix Ziem dans son atelier
Ce peintre est surtout connu pour ses marines et ses vues de Martigues qui fut en grande partie grâce à lui surnommée "la Venise provençale". Il est également rattaché à l'école de Barbizon. Il vint s'installer rue Lepic (qui s'appelait alors rue de l'Empereur) en 1859. C'est là qu'il mourut, dans une maison aujourd'hui disparue. Elle a cédé la place à un immeuble plat et sans grâce.
Le 98
Pas de plaque non plus au 98 où vécut un des plus grands écrivains français du XXème siècle. Deux chefs d'oeuvre y furent écrits : Voyage au bout de la nuit (1932) et Mort à Crédit (1937).
Et il n'y aura jamais de plaque car quel que soit leur génie, les salauds n'en méritent pas...
Céline emménagea en 1929 à cette adresse et il ne la quitta qu'en 1941 pour s'installer à moins de 100 mètres de là, rue Girardon où il commit pendant l'occupation et la chasse aux Juifs quelques uns des pamphlets ignominieux qui contribuèrent à donner bonne conscience à ceux qui livrèrent aux bourreaux nazis des milliers de Juifs...
A droite, le 85, immeuble qui fait le coin entre la rue Lepic et la rue Girardon. Dans le même pâté de maisons, au 4 rue Girardon, Céline emménagea en 1941.
Le 89
Au 89, un autre écrivain a vécu de 1890 à 1903 (après avoir quitté la petite maison du 5 rue d'Orchampt): il s'agit de Courteline!
Il aimait Montmartre au point de prétendre tout Tourangeau qu'il fût qu'il y était né. Enfant, il passa des étés dans la maison de ses grands parents, 40 rue de Chevalier de la Barre. La maison fut détruite pour laisser place aux lourdes dépendances du Sacré Coeur.
Chaque jour, il descendait la rue Lepic pour se rendre plus bas à l'auberge du Clou, avenue Trudaine, son cabinet de travail et d'observation du genre humain!
Le Temps des Cerises...
Au 110 a vécu un des plus éminents Montmartrois : Jean-Baptiste Clément. Ce socialiste, ardent patriote fut nommé au Conseil de la Commune et combattit avec le peuple sur les barricades. Il écrivit peu après les massacres la chanson: la Semaine Sanglante.
Clément photographié par Nadar.
Bien sûr c'est le Temps des Cerises qui lui conféra son immortalité de chanson! Le poème fut mis en musique avant la Commune mais Clément y ajouta la dernière strophe après les événements tragiques. Elle est depuis comme le drapeau rouge et déchiré de ces jours de courage et de mort qui font partie de la mémoire de Montmartre...
La rue Lepic s'arrête là, sur la Place.... devinez.... mais oui.... vous avez trouvé... sur la Place Jean-Baptiste Clément!
A vous de vous promener dans cette rue dont il est impossible de tout dire... d'autres fantômes s'y promènent : Willette, Léandre... Si vous êtes attentifs, vous sentirez leur frôlement, comme vous sentirez le vent qui fait tourner les ailes des moulins disparus.
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Autres parties de la rue : Rue Lepic (1).
toutes les rues : Rues de Montmartre. Classement alphabétique.
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Rue André Antoine. Montmartre.
Montmartre. Rue des Trois Frères. (1)
Montmartre. Rue de l'Abreuvoir.
Rue du chevalier de la Barre. (I).
etc...
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