Aux premiers siècles du christianisme, des ermites vécurent dans les grottes qui servirent plus tard de refuge et de dépendances aux moines de l'Abbaye Saint-Pierre de Brantôme. La grotte la plus mystérieuse et la plus impressionnante est celle du jugement Dernier.
Les moines très gourmands et très avisés y avaient creusé des pigeonniers. Ils appréciaient la chair des volatiles dodus chez qui tout était bénéfice puisque leurs fientes étaient vendues pour servir d'engrais. J'espère qu'ils n'ont pas, par inadvertance fait rôtir l'Esprit-Saint...
Ce qui retient l'attention, c'est cet immense bas-relief inachevé qui émerge de la pierre...
Au sommet est assis sur son trône un personnage barbu et massif, un Dieu en majesté, les yeux ouverts, les bras croisés, pesant de toute son autorité indifférente sur le monde qui s'agite au-dessous de lui.
A sa droite et à sa gauche, deux personnages à peine dessinés, deux fantômes en prière l'adorent, les mains jointes.
Sous le trône, jaillit d'une tête couronnée comme d'une boîte, la mort triomphante et rieuse. Elle est comme Dieu, entourée de deux personnages. Ce sont des anges agenouillés dont les trompettes embouchées annoncent le jugement dernier. Ils évoquent les anges de l'Apocalypse, ce texte qui inspira bien des oeuvres du XVème siècle.
Vanité du pouvoir, vanité des honneurs et des richesses... La mort semble jouer entre les créneaux de la couronne royale.
Un peu plus bas s'alignent des têtes, comme une collection de trophées. Bonnes têtes de bonnes gens, seigneurs et manants, commerçants et paysans. Chaque vivant a sa place prévue sur l'étagère macabre.
Le bas-relief est puissant, sculpté sans fioritures par un géant naïf. Il est bien dans la sensibilité du XVème siècle, obsédé par la mort, les jugements et les danses macabres. "Le mort saisit le vif". "La mort est sergent de Dieu"...
Sur la paroi de droite, une représentation du XVIème, plus traditionnelle figure la crucifixion. Les acteurs principaux se tiennent autour du crucifié : Marie, Saint-Jean et Marie-Madeleine. A gauche, un moine à genoux et à droite un abbé avec sa crosse et un livre.
A l'extérieur de la grotte du jugement, vous pouvez puiser un peu d'eau dans la fontaine Saint-Sicaire. Elle est censée rendre fécondes les femmes et guérir les enfants. Elle est un lieu de pèlerinage toujours vivant. Elle est, si près du bas-relief du triomphe de la mort, une affirmation de la vie.
Mais revenons dans le soleil, passons sur le pont coudé (unique en France) et regardons, indifférents à la promesse de Jugement Dernier, les audacieux navigateurs pagayer sur la Dronne dans la lumière de l'été!
Liens : Périgord. Saint-Geniès.Chapelle du Cheylard. Fresques médiévales.
Rocamadour. Fresques Annonciation et Visitation.
Chats de Dordogne. Petits poèmes.
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