A 8 000 km de Montmartre et à 45 minutes en bateau de Mahé, l'île Silhouette est une montagne en pleine mer. Elle est à 93% occupée par un parc national qui la protège des ravages du tourisme. Un seul hôtel y est établi, constitué de petites maisons cachées par la végétation.
Une forêt équatoriale primaire (la seule des Seychelles) s'y épanouit entre ciel et mer, enivrée d'elle même et de sa luxuriance. Elle ne se laisse pas facilement apprivoiser et il est prudent de faire appel à un guide pour s'y aventurer!
L'île dont la quasi totalité des sites porte des noms français a connu quelques uns de nos ancêtres, à commencer par le pirate Jean-François Hodoul qui s'attaqua à la fin du XVIIIème siècle à nos meilleurs ennemis, les Anglais, dont il captura et détruisit une dizaine de navires.
On prétend que c'est à Silhouette qu'il se réfugia avant de vivre à Victoria et devenir un notable apprécié. C'est encore à Silhouette qu'il aurait caché un important trésor. Il est vrai que d'autres pirates comme La Buse ont eux aussi affirmé qu'ils avaient enfoui leur butin sur des îles seychelloises.
Un autre Français est venu dans cette île qu'il a aimée au point de l'acquérir, Auguste Dauban. Il cultiva (ou plutôt fit cultiver) le coprah, l'ylang-ylang, la vanille qui étaient débarqués à Marseille. Il devint immensément riche.
L'île ne sera cédée par la famille Dauban que dans la deuxième moitié du XXème siècle. Aujourd'hui les traces des Dauban sont nombreuses….
Le sommet de l'île toujours environné de nuages est le Mont Dauban….
La maison familiale est aujourd'hui un musée et un restaurant "la Gran Kaz"...
Enfin, le plus émouvant est le mausolée sous les cocotiers, église de la Madeleine miniature où reposent Auguste et sa femme Catherine, leur fillette Eva morte à deux ans et demi et la sœur de Catherine.
Non loin du mausolée, un sentier rocailleux conduit à l'ancien cimetière sur la pointe Ramasse tout, dominée par une croix, au-dessus de rochers qui à cet endroit portent le deuil.
Ce ne sont pas des blocs de granit comme partout dans l'île mais de la microsyénite qui fait paraître plus bleue que bleue l'eau qui vient les lécher.
Une balade de moins de deux heures permet de faire le tour de l'île et d'en saisir la majesté, la sauvagerie...
Une île préservée, belle par tous les ciels, habitée par les oiseaux, les lézards, les étonnants crabes de terre qui vont et viennent entre la mer et l'intérieur, si vite qu'ils semblent glisser. Des panneaux les signalent à l'attention, non des voitures qui n'existent pas, mais des vélos et des piétons!
Le crabe terrestre
Pourtant le dérèglement climatique est ici aussi sensible et les grands arbres qui étendaient leur ramure au-dessus des plages blanches sont peu à peu renversés et agonisent, leurs racines dans l'eau de mer.
Ces quelques images sont un hommage à la beauté du monde menacée par la loi du profit et du "progrès". Espérons qu'elles ne témoigneront pas un jour de ce qui fut...comme les photos de centaines d'animaux disparus sont tout ce qu'il reste de leur passage sur notre planète.