Overblog
Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Montmartre secret

Montmartre secret

Pour les Amoureux de Montmartre sans oublier les voyages lointains, l'île d'Oléron, les chats de tous les jours. Pour les amis inconnus et les poètes.

montmartre peintres.artistes.clebrites

Publié le par chriswac
Publié dans : #MONTMARTRE Peintres.Artistes.Clébrités
Place du Tertre. Lucien Génin

Place du Tertre. Lucien Génin

.... Montmartre a inspiré bien des peintres qui souvent sans le savoir l'ont transformé en usine à clichés!

Aujourd'hui les touristes photographient sans se lasser, non pas des lieux de Montmartre mais leur image créée par Utrillo et tant d'autres.

Rue Cortot (Lucien Génin)

Rue Cortot (Lucien Génin)

     La maison rose, sans Utrillo, ne serait rien qu'une maison banale devant laquelle nous passerions dans l'indifférence...

Hôtel du Tertre  (Lucien Génin)

Hôtel du Tertre (Lucien Génin)

... D'autres peintres, aujourd'hui moins connus ont participé à cette renommée picturale. Parmi eux, Lucien Génin. Il fait partie avec Elysée Maclet de ceux qui ne se sont pas lassés de représenter les rues de la Butte.

Lucien Génin  peintre de montmartre.

Notre amoureux de Montmartre n'y est pas né. Il a vu le jour (en 1894) à Rouen et n'est venu à Paris que pour suivre les cours de l'Ecole des Art-Déco (Il avait auparavant suivi ceux de l'Ecole des Beaux Arts de sa ville où Dufy qui vécut à Montmartre avait été lui aussi étudiant).

Place Ravignan où se situe l'hôtel du Poirier (Utrillo)

Place Ravignan où se situe l'hôtel du Poirier (Utrillo)

Il loue une chambre à l'Hôtel du Poirier, place Ravignan, un des épicentres du Montmartre des peintres car elle est l'adresse du Bateau-Lavoir. La pension est tenue par la mère Boyer qui a également pour pensionnaire Elysée Maclet. Sa chambre est voisine de la sienne et les deux hommes sympathisent. Ils deviennent de véritables amis. Leurs toiles se ressemblent parfois car ils sont tous deux coloristes, admirateurs des Fauves.

 

Rue de l'Abreuvoir (Génin)

Rue de l'Abreuvoir (Génin)

Rue de l'Abreuvoir (Maclet)

Rue de l'Abreuvoir (Maclet)

La proximité du Bateau-Lavoir permet aux deux amis de rencontrer quelques habitués du lieu, parmi lesquels Max Jacob.

Lucien Génin  peintre de montmartre.

Quand il a 25 ans, Génin quitte l'hôtel pour s'installer un peu plus confortablement rue des Beaux-Arts où il loue un appartement avec Maclet, au 3 bis. Mais les deux amis remontent souvent sur la Butte où ils trouvent leur inspiration.

 

Lucien Génin  peintre de montmartre.

Il y reste trois ans avant de regrimper vers le Poirier et se fixe au Bateau-Lavoir. Il rencontre une jeune femme qui n'était pas connue pour être farouche mais pour laquelle il "tombe en amour" comme disent nos amis du Québec. 

Lucien Génin  peintre de montmartre.

La responsable de cette "chute" en amour c'est la belle Ginette qui à son tour s'éprend de son Lucien. Elle aurait pu pourtant chanter comme Fréhel : "C'est un vrai gringalet, aussi laid qu'un basset, mais je l'aime..." En effet Génin se compare parfois à Lautrec, non par le talent mais par la taille.

La liaison dure plus de 10 ans jusqu'en 1936. Le couple amoureux participe à de nombreuses rencontres avec quelques uns des poètes et des peintres qui animent des soirées amicales dans les cafés du quartier. Parmi eux Max Jacob, Marcel Leprin, Gen Paul...

Lucien Génin  peintre de montmartre.

1936 ! L'année du départ de Ginette est celle où Lucien Génin quitte Montmartre afin de tenter de l'oublier. Il descend dans la ville, côté Saint-Germain des Prés. Il tourne le dos à Montmartre et quand il veut respirer un air nouveau, c'est dans les calanques méditerranéennes qu'il se rend!

 

Il continue de peindre et ses œuvres connaissent un petit succès.

Il meurt en 1953 à l'hôpital Cochin où il est amputé d'une jambe, opération qui n'arrête pas la gangrène fatale.

Lucien Génin  peintre de montmartre.

    La fosse commune lui est épargnée  grâce à Ginette qui s'occupe des obsèques et suit le convoi jusqu'au cimetière parisien de Thiais où il repose, comme on dit, loin du Montmartre où ils s'étaient aimés.

     Il nous laisse des toiles d'un Montmartre joyeux, parfois naïf.

      Il y a dans son art quelque chose d'Utrillo bien sûr.

      Parfois comme le fils de Valadon, il parsème les rues de petits personnages, des passants, seuls ou en couple, comme autant de santons.  Comme lui il pose une carte postale devant le chevalet....

Ainsi plusieurs toiles ont-elles le même angle de vue et ne diffèrent que par l'humeur du jour, plus ou moins gaie, du peintre et de sa palette.

Lucien Génin  peintre de montmartre.

   L'influence de Gen Paul se fait sentir également quand il ne cherche pas la précision mais le mouvement qui métamorphose la réalité sans souci de réalisme. 

Lucien Génin  peintre de montmartre.

    Pourtant il me semble que sa meilleure période est celle qui correspond à son arrivée à Montmartre et à son amitié avec Elisée Maclet. 

Lucien Génin  peintre de montmartre.
Lucien Génin  peintre de montmartre.

Lucien Génin est un de ces peintres de talent qui s'attachèrent à Montmartre et qui furent moins inspirés lorsqu'ils le quittèrent. Aujourd'hui nul ne parle de lui qui est éclipsé par les artistes de génie qui furent ses contemporains.  

S'il est exilé dans le cimetière de Thiais, les rues de la Butte ne l'oublient pas et se regardent dans ses toiles comme on feuillette un album de photos et on se surprend de se trouver si vivant et si jeune! 

Lucien Génin  peintre de montmartre.

Liens 

Les artistes et personnalités de Montmartre

 

René Fauchois (cité par André Roussard)  parle du peintre : "Je n'ai connu à Lucien Génin que deux passions : la peinture et le vin rouge. (...) Sa taille exiguë l'apparentait physiquement à Lautrec et à Marquet, et j'aurais voulu le rencontrer un jour entre Vlaminck et Derain, ces géants. (...) Toute sa saveur vient de son naturel et sa simplicité, qui n'est pas feinte... Certainement la joie l'emplissait quand il peignait. On le voit, car cette joie est communicative et une toile de lui met plus de lumière à la fois sur le mur où on l'accroche et dans les yeux qui s'en régalent."

                             La rue Lepic. Tableau qui appartient à mon ami Pierre 

 

 

Voir les commentaires

Bouscarat. Hotel du Tertre. La Bohème.
Sur la droite l'Hôtel du Tertre. (Utrillo)

Sur la droite l'Hôtel du Tertre. (Utrillo)

Nous sommes au cœur de Montmartre, à l'entrée de la place du Tertre devenue mythique, au premier numéro, avec cet Hôtel qui abrita quelques poètes, artistes, peintres les plus emblématiques de la Butte

Bouscarat. Hotel du Tertre. La Bohème.

L'Hôtel a été détruit comme tant de vieilles maisons du village et aujourd'hui s'élève à sa place un petit immeuble dont l'architecture n'est pas nulle mais s'intègre mal avec les immeubles voisins qui, eux, par chance, ont été sauvegardés.

Bouscarat. Hotel du Tertre. La Bohème.

Nous pouvons grâce aux cartes postales et aux photos revoir l'Hôtel, tel qu'il fut dans les grandes années montmartroises.

Bouscarat. Hotel du Tertre. La Bohème.

Ce petit immeuble modeste date de 1835 et il abrita des commerces qui convenaient aux villageois.

Si j'en crois André Roussard et ses "Montmartrois", il y aurait eu dans les dernières années du XIXème siècle, au rez de chaussée, une épicerie-bazar, appartenant au père Poncier. 

Des documents (photos, cartes postales) semblent attester que ce père Poncier était en fait un restaurateur dont le nom apparaît sur la façade et dont le restaurant "le Rendez-vous des cochers" a précédé Bouscarat.

Ce document montre également qu'il y eut une librairie- papeterie-mercerie qui jouxtait le restaurant. 

    Sur une photo plus tardive, on peut voir que le "Rendez-vous des cochers" a pris la place de la librairie et jouxte désormais l'hôtel du Tertre et le restaurant Bouscarat.

Bon ce débat sur les emplacements exacts des établissements n'intéressera peut-être que les Montmartrolâtres dont je suis!

     Sur cette autre photo, nous voyons que "le rendez-vous des cochers" a disparu pour laisser place "Au Sommet de la Capitale".

L'Hôtel du Tertre, lui, est bien là. Notons l'apparition d'une vespasienne à quelques mètres de l'église.

Bouscarat. Hotel du Tertre. La Bohème.

      C'est en 1897 qu'Henri Bouscarat rachète l'immeuble du début de la rue.

        Il est fils de paysans de l'Aubrac, "monté" à Paris, comme tant d'autres pour devenir bougnat. Il voit tout de suite quels atouts possède ce petit immeuble, situé idéalement au centre du village et non loin du chantier de la Basilique qui emploie des centaines d'ouvriers et il y ouvre un restaurant et un hôtel.

Utrillo

Utrillo

     Le restaurant "chez Bouscarat" avec ses tables sorties sur la chaussée dès le début du printemps, attire les affamés pas trop fortunés et les jolies filles disposées moyennant quelques sous à poser pour les peintres qui ont choisi Montmartre pour y travailler dans des ateliers au loyer modeste.

Bouscarat. Hotel du Tertre. La Bohème.

L'Hôtel devient un des épicentres de la vie artistique montmartroise. Les peintres du Bateau-Lavoir s'y retrouvent. Parmi eux les Espagnols autour de Picasso bien sûr mais plutôt que de citer tous ceux qui ont apprécié l'endroit et les demoiselles disponibles qui s'y affichaient, retenons plutôt le nom de ceux qui ont été les plus assidus clients de l'hôtel.

Bouscarat. Hotel du Tertre. La Bohème.

Gaston Couté tout d'abord, le poète anarchiste au grand cœur qui vécut dans une chambre du premier étage quand il ne dormait pas dans la rue. Cet homme sensible et doux est le seul qui a l'honneur d'une plaque sur la façade de briques du bâtiment actuel.

Nous lui avons consacré un article et la meilleure façon de le saluer, c'est encore de citer quelques uns de ses vers écrits alors qu'il entendait sous ses fenêtres, le clocher de Saint-Pierre sonner le glas pour ceux qui avaient de quoi se payer un bel enterrement : 

Quand s'éteignent comme des cierges,
Les grands-pères et les grand'mères
Et que gisent, emmi les serges
Des linceuls, leurs corps éphémères.
Digue digue dig, digue digue don !
Chante aux trépassés le grand carillon
Digue digue dig, digue digue don !
Pour qu'on vous enterre
Casquez, casquez donc !

 

 

Le poète de la fraternité et de la révolte eut pour principale adresse cet hôtel où il écrivit certains de ses poèmes les plus connus, ceux que chanta notamment Monique Morelli, la grande voix du Montmartre de la poésie et de la révolte.

Pierre Hodé

Pierre Hodé

     

 

Parmi les autres locataires d'une chambre de l'Hôtel, nous trouvons Jules Depaquit, un des plus éminents Montmartrois! Dessinateur et caricaturiste de talent ("le Rire" "Le Canard Enchaîné"), il fut maire de la Commune libre de Montmartre. On lui doit la fête des vendanges, les vachalcades et un programme politique idéal interdisant, sous peine de mort, de mourir sur le territoire de la Commune ou supprimant l'eau des fontaines qui devront "éjaculer" du vin, rouge, rosé ou blanc selon le goût des habitants.... 

 

 

Il a vécu quelques années dans une chambre voisine de celle de Mac Orlan ou de Satie. Quand ses revenus se sont améliorés, il a loué une autre chambre dans la maison qui appartenait à Aristide Bruant, rue Saint-Vincent.

Il meurt en 1924 et ne verra donc pas la destruction de l'Hôtel du Tertre. La plus belle épitaphe prononcée lors de son enterrement est prononcée par Mac Orlan : "Son activité se bornait à régler la circulation entre la place du Tertre et la lune".

Mac Orlan est l'un des habitants de l'hôtel qui en garda le plus de souvenirs et qui écrivit le plus sur ce lieu unique, cette terrasse où l'on pouvait voir tant d'artistes sans le sou devenus par la suite illustres. 

                                                                   Foujita                          

Mais l'esprit libertaire et potache de Montmartre trouve une de ses plus savoureuses réalisations dans cet Hôtel avec le baron Pigeard auquel j'ai consacré un article alors qu'il mériterait un roman!

 

Bouscarat. Hotel du Tertre. La Bohème.

      Cet homme, baron comme je suis évêque, commettait quelques croûtes qui furent exposées à la foire aux croûtes de la place Constantin Pecqueur mais il préférait confectionner des maquettes de voiliers qui trouvaient plus facilement acquéreurs. Il eut l'idée de créer avec deux acolytes, Anselin et Fournier, la célébrissime UMBM, l'Union Maritime de la Butte Montmartre.

 

N'y étaient admis que  ceux qui avaient un rapport avec la mer. Modigliani venu de Toscane, Max Jacob du Finistère, en firent partie et assistèrent aux réunions, dans la salle du restaurant Bouscarat.

                                                             Max Jacob

Un hareng saur dans une cage était posé sur la table et présidait les séances, à côté du crâne de Christophe Colomb à 25 ans que l'on avait le droit de toucher moyennant quelques sous ou une tournée d'absinthe.

   

 Les membres de l'Union s'engageaient à apprendre la natation aux poulbots couchés à plat ventre sur un tabouret et répétant les gestes de la brasse qui leur étaient montrés. Les réunions de l'USBM connurent un franc succès et elles encouragèrent Bouscarat à re-nommer son premier étage : Hôtel de la Marine! 

 

Bouscarat. Hotel du Tertre. La Bohème.

     La suite de l'histoire est moins joyeuse. Tout commence avec le flair et l'appétit d'un chauffeur de taxi, Léonard Beynat qui achète la modeste boutique d'un cordonnier qui jouxte l'hôtel. Il y installe ce qu'on appellerait aujourd'hui un bar à vins mais sous une forme plus rustique puisqu'on y tire directement la dive boisson au tonneau.

Bouscarat. Hotel du Tertre. La Bohème.

    Le succès est tel que Beynat peut, racheter l'hôtel du Tertre et ouvrir le cabaret "La Bohème". 

On peut voir également, jouxtant le cabaret, "le Moulin Joyeux", restaurant qui plus tard, en 1968, sera avalé par la Bohème lorsqu'il sera racheté par les successeurs de Beynat, longtemps après la démolition de l'Hôtel du Tertre.

Léonard Beynat après bien des démarches, obtint en effet l'autorisation de le détruire malgré les manifestations pacifiques organisées par les riverains, découragés de voir détruire une à une les maisons qui avaient résisté à la spéculation.

C'est ainsi que les pelleteuses vinrent abattre le vieil hôtel, en 1938, pour le remplacer par l'immeuble actuel, trop haut, sans harmonie avec les maisons environnantes.

 

 

Le nom de l'hôtel disparut au profit de "La Bohème".

Faut-il y voir un hommage à ce que fut ce lieu?  

Ou bien, comme Aznavour chanter que "ça ne veut plus rien dire du tout"?

Bouscarat. Hotel du Tertre. La Bohème.

Quand au hasard des jours
Je m'en vais faire un tour
À mon ancienne adresse
Je ne reconnais plus,
Ni les murs, ni les rues qui ont vu ma jeunesse
En haut d'un escalier
Je cherche l'atelier
Dont plus rien ne subsiste
Dans son nouveau décor, Montmartre semble triste et les Lilas sont morts

Voir les commentaires

Publié le par chriswac
Publié dans : #MONTMARTRE Peintres.Artistes.Clébrités
Passage des Abbesses. Le myocastor crestas. (myocastor à crête)

Passage des Abbesses. Le myocastor crestas. (myocastor à crête)

     Les Montmartrois guettent l'apparition sur leurs murs d'animaux fabuleux, jamais agressifs, espiègles, narquois, indifférents parfois. Ils apparaissent, sont vandalisés par des grognons professionnels, ou effacés peu à peu par les pluies et les vents qui restituent aux murs leur tristesse. 

Dinosaure Dimetrodon (ceux-là auraient pu se rencontrer avant l'extinction des dinosaures)

Dinosaure Dimetrodon (ceux-là auraient pu se rencontrer avant l'extinction des dinosaures)

Rue de la Vieuville

Hemileuca Rattus  (papillon-rat)

Hemileuca Rattus (papillon-rat)

Rue du Chevalier de La Barre

     Un artiste, un rêveur, un type qui fait partie des enchanteurs de rues, est leur créateur.

                              Place du Calvaire. Testudo octopus (Tortue Pieuvre)

 

 

Lepus Draco (Lièvre Dragon)

Lepus Draco (Lièvre Dragon)

Rue Jean-Baptiste Say

Il s'amuse plus que Dieu qui en sept jours se prit au sérieux et donna à l'homme pouvoir sur tous les animaux qu'il avait imaginés.

Strombus Myrmecophagus. Mollusque qui se nourrit de fourmis.

Strombus Myrmecophagus. Mollusque qui se nourrit de fourmis.

Rue Briquet

Aries Cypris (Bélier crustacé)

Aries Cypris (Bélier crustacé)

     Dieu n'a pas moufté devant le résultat de ses élucubrations. Partout la souffrance infligée, la transformation des êtres vivants en produits, la mort. Mais Codex n'a pas la même responsabilité. Ses êtres n'ont jamais fait de mal à personne.  Ils appartiennent à la poésie. 

Cilonia Helix (Cigogne Escargot)

Cilonia Helix (Cigogne Escargot)

Rue Antoine

     Codex est aujourd'hui connu et reconnu.

Il expose, il explose, il dispose d'espaces où il s'exprime.

Je sais.

Mais je regrette d'avoir manqué les rendez-vous avec tant de ses chimères, les jours où je n'avais rien pour les photographier. Je regrette aussi toutes ces photos numérisées que je ne retrouve plus dans le capharnaüm de mon  ordinateur.

Podarcis Crangon (Reptile-Crevette)

Podarcis Crangon (Reptile-Crevette)

Rue du Calvaire

Proteus Jocularis (traduction difficile mais peut-être Salamandre Papillon)

Proteus Jocularis (traduction difficile mais peut-être Salamandre Papillon)

Rue Manuel

     Alors je me dépêche de sauver celles que j'ai pu récupérer et d'ajouter quelques nouvelles, capturées ces jours derniers dans les rues de Montmartre.

Rencontres contre nature de la carpe et du lapin, elles osent tous les métissages. 

Shistocerka Engraulis (Criquet anchois)

Shistocerka Engraulis (Criquet anchois)

Macropus Pieris (Marsupial -Pieris (sorte de papillon).)

Macropus Pieris (Marsupial -Pieris (sorte de papillon).)

Rue Poulbot

    Celle -là sur fond rouge je l'aime particulièrement. Elle avait trouvé sa place rue Poulbot, regardant avec gentillesse les passants. Le patron du Tirebouchon l'a renvoyée dans les limbes. C'est triste, c'est dommage. Il devrait exister une brigade pacifique qui défendrait l'art des rues et le protégerait. (Que dire de l'effacement sauvage des femmes libres et impertinentes de Miss.Tic? La plus belle, rue Véron vient d'être vandalisée par les services (sévices) municipaux.)

 

Muraena Giraffa (Murène Girafe)

Muraena Giraffa (Murène Girafe)

Passage des Abbesses

Eubalaena Diceros (Baleine-Rhinocéros)

Eubalaena Diceros (Baleine-Rhinocéros)

Rue de Clignancourt

Alligator Ratus (Alligator Rat)

Alligator Ratus (Alligator Rat)

Rue Lebas

   Codex est plus prudent que Miss.Tic. Son bestiaire est répertorié. Ses animaux ne se perdront pas et pourront réapparaître dans les rues où on les guette, où on les aime, où on se dit que c'est chouette quand même d'habiter une ville qui vit,  s'anime, couvre de créatures mystérieuses ses murailles aveugles.

Carabus Girafa (Scarabée-Girafe)

Carabus Girafa (Scarabée-Girafe)

Rue Audran

Dytiscos Monoceros (Coléoptère Licorne)

Dytiscos Monoceros (Coléoptère Licorne)

Rue Labat

Hetrodes Connochaetes (Criquet Gnou)

Hetrodes Connochaetes (Criquet Gnou)

Rue Ramey

Codex est un poète érudit qui baptise ses créatures avec des noms savants, les noms justes, le plus souvent latins ou grecs. Ils sont précis, difficiles à traduire avec exactitude. Ils font exister les êtres accouplés d'étrange manière. Ils sont indiscutables. Ils actent l'apparition de nouvelles races alors que chaque jour disparaissent de la Terre des races à jamais perdues.

Ils sont la poésie de l'improbable.

Codex est le Facteur Cheval d'une Genèse urbaine. 

Chaetodon Caiman (Poisson-papillon Caïman)

Chaetodon Caiman (Poisson-papillon Caïman)

Rue des 3 frères

Codex Urbanus dans les rues de Montmartre..2023.

Rue Gabrielle

Acipenser Eliphas (Esturgeon Elephant)

Acipenser Eliphas (Esturgeon Elephant)

Rue Muller.

Rhisostoma magica Méduse magique!

Rhisostoma magica Méduse magique!

Passage des Abbesses.

Liens l'art des rues à Montmartre

Street art 2017

Janvier 2016

Miss.Tic à Montmartre

 

Voir les commentaires

Publié le par chriswac
Publié dans : #MONTMARTRE Peintres.Artistes.Clébrités, #MONTMARTRE Monuments. Cabarets. Lieux
Edith Piaf et Montmartre.

   Eh oui, Piaf connut et aima Montmartre!

Cet attachement, nous l'oublions trop souvent et quand nous évoquons les chanteuses montmartroises, nous filons illico rue d'Orchampt devant le portail de la maison de Dalida, ou bien nous nous rendons rue du Mont-Cenis, chez Patachou, quand nous ne descendons pas sur le boulevard retrouver Yvette Guilbert ou Frehel. Mais Piaf, jamais!  

 

   Et pourtant elle a marché sur nos pavés, elle a vécu dans nos hôtels, elle a chanté dans nos cabarets! Bien sûr nous aurions préféré qu'elle naquît rue des Martyrs ou rue Norvins plutôt qu'à Belleville, mais les Buttes sont jumelles et partagent leur histoire populaire... le souvenir de cette histoire! 

Piaf et Momone

Piaf et Momone

   Edith rencontre Simone Berteault dans son quartier de Ménilmontant. Elles deviennent de vraies "soeurs" comme l'écrira simone Berteault. Edith a quinze ans et "Momone" moins de treize quand elles parcourent les rues pour gagner un peu d'argent. C'est Edith qui chante et Simone qui quête, dos voûté, tête baissée pour émouvoir le chaland.

Edith Piaf et Montmartre.

 

  Montmartre et ses légendes attirent Edith qui trouve une petite chambre assez minable, rue Véron à Montmartre. Momone et Edith ont pour adresse temporaire l'hôtel de Clermont, au 18. L'hôtel est toujours là et nous verrons qu'il aura son importance dans la vie et le destin de Piaf. Les fresques du peintre américain Neil Gittings ont été récemment restaurées et ont retrouvé les couleurs que Piaf a sans doute connues.

 

 La vie n'est pas facile pour les deux "sœurs". Et puis Edith, à 17 ans, tombe amoureuse, comme si souvent elle le fera. Son désir d'amour est tel qu'elle idéalise les hommes de rencontre.  Celui-là s'appelle Louis Dupont, "P'tit Louis". 

 

    Avec lui elle vit quelques mois rue Des Abbesses, à l'hôtel Pompéa" dans un petit immeuble dont le rez de chaussée était occupé par un restaurant qui a survécu, "La Mascotte". L'hôtel abrite les couples de passage et il fait le plein dans un Montmartre qui aime cacher les amours irrégulières! Le Pompéa malgré son nom évocateur disparaîtra au profit de l'Antinéa qui lui même, comme l'Atlantide, finira par sombrer. Seule subsiste la Mascotte qui s'est spécialisée dans les fruits de mer.

 

Piaf retrouve ensuite Belleville et avec Louis elle a une fille, Marcelle, "Cecelle" qu'elle porte dans ses bras pour chanter dans les cours. Elle revient chanter à Montmartre avec Momone.

Après le départ de Louis qui n'accepte pas qu'Edith puisse utiliser leur fille pour émouvoir les badauds, la seule survie possible est toujours dans le chant et le passage dans les cabarets. 

On la voit au 62 rue Pigalle, au "Juan les Pins" aujourd'hui hideux immeuble-verrue, mais alors petit établissement en rez de chaussée qui deviendra la célèbre roulotte de Django Reinhardt.

 

 

1935 est une année décisive pour Edith qui perd sa fille morte de méningite tuberculeuse à l'âge de 28 mois. Epreuve terrible qui la contraint à la prostitution pour payer les frais d'inhumation de la petite. C'est aussi l'année où elle est remarquée par Louis Leplée qui le premier comprend l'intensité, la profondeur, le tragique de la jeune femme, petite et vive qui évoque pour lui un moineau parisien, un piaf!

C'est lui qui lui donne ce nom qu'elle habite aussitôt et qui sera celui de sa célébrité.

Nous somme loin de Montmartre, sur les Champs Elysées où Leplée possède son cabaret. Elle y connaît un beau succès mais c'est à jacques Canetti (nous retrouvons Montmartre) qu'elle doit le vrai début de sa carrière grâce au disque qu'il lui fait enregistrer, le célèbre "Les mômes de la cloche" en 1936, année de l'assassinat de Leplée.

  Par chance jacques Canetti qui la programme sur Radio Cité lui permet d'être entendue et reconnue par Raymond Asso et Marguerite Monnot qui seront liés à elle jusqu'à sa mort.

    C'est à Montmartre qu'elle rencontre Jean Cocteau, lui-même habitué de la Butte puisque jusqu'à l'âge de 18 ans, il avait vécu chez ses grands-parents rue La Bruyère, une rue proche de Pigalle. 

Il écrit pour elle une pièce dans laquelle elle triomphera en 1940 avec son nouvel amant Paul Meurisse dont le rôle est muet, "Le Bel Indifférent".

     En 1941 elle est l'héroïne d'un film tourné par Georges Lacombe "Montmartre sur Seine". Des couples s'aiment, se jalousent, se déchirent dans des hôtels ou des rues de la Butte qui depuis les débuts du cinéma ne cesse de séduire les réalisateurs. Piaf y est Lili aimée par Michel (Jean-Lous Barrault) mais amoureuse de Maurice (Henri Vidal).

                          Piaf et Henri Vidal dans "Montmartre sur Seine")

Marguerite Monnot écrit la musique et Piaf (avec Marguerite) les paroles des quatre chansons qu'elle y interprète : "J'ai dansé avec l'amour"... "L'homme des bars"... "Tu es partout"... "Un coin tout bleu".

   

                                 1943. Tournée d'artistes français chez Hitler.

     Passons sur l'occupation et le manque de courage et d'engagement d'Edith Piaf qui pour "promouvoir la chanson française" fait deux voyages à Berlin. On est toujours triste de voir les artistes qu'on aime ne pas correspondre à l'héroïsme qu'on attendrait d'eux. 

En 1944, elle triomphe au Moulin Rouge où chante en première partie un certain Yves Montand. C'est le coup de foudre! Et c'est Montmartre qui va abriter cette nouvelle passion.

Plus précisément  avenue Junot, l'hôtel Alsina où elle loue une chambre à l'année.

 

 C'est l'hôtel que Clouzot choisira pour tourner "l'assassin habite au 21"  (en réalité l'hôtel est au 39) et Truffaut pour "Baisers volés".

 

 

Pas vraiment volés les baisers qu'abrite ce refuge montmartrois...

 

   En 1945, Edith Piaf aime chanter dans un cabaret fondé par 5 compagnons de la Libération : "le Club des Cinq", 13 rue du faubourg Montmartre. Le lieu est apprécié des artistes et Gabin, Prévert, Carné le fréquentent régulièrement.

Le cabaret deviendra le cinéma "le Club" avant de devenir "le Passage du Nord Ouest" ouvert aux amateurs de rock, et enfin, en 1997 le Théâtre du Nord Ouest animé par la compagnie théâtrale l' Elan.

C'est dans le cabaret que Piaf rencontre pour la première fois Marcel Cerdan en 1946. C'est là que la foudre frappe de nouveau. C'est là que commence la belle et tragique histoire d'amour, la passion pour être plus juste, qui réunit Edith et Marcel.

Edith Piaf et Montmartre.

C'est à Montmartre que Piaf et Cerdan se retrouvent, dans l'hôtel de Clermont rue Véron, le même hôtel où Momone et Piaf avaient trouvé refuge quelques années plus tôt. C'est que Marcel y a ses habitudes.

                              L'hôtel de Clermont et le café, vus par Michel Cordi

Il apprécie le bistrot tenu par Ammad passé maître dans l'art du couscous, un plat qui lui rappelle sa jeunesse marocaine.

La Cloche d'or, rue Mansart.

La Cloche d'or, rue Mansart.

Edith et Marcel aiment aller au restaurant de la rue Mansart "la cloche d'or", établissement qui était dirigé par Anatole Moreau, le père de Jeanne Moreau.

Les histoires d'amour finissent mal en général. Celle là est foudroyée par le crash de l'avion qui emmenait Cerdan à New York où l'attendait Edith.

Après la mort de Marcel, Edith fuit dans l'alcool et la morphine. Elle n'a pas la force d'assister aux funérailles de son amant.

Elle hésite à revenir à Montmartre où déjà tant de souvenirs l'assaillent. C'est Montmartre qui va vers elle quand en 1955, dans le film de Renoir "Moulin Rouge" elle interprète Eugénie Buffet qui, comme elle, se fit connaître en chantant dans les rues de la Butte.

 

Mais Montmartre étant une petite capitale du Music Hall, avec le temps elle retrouve le goût d'y retourner pour applaudir des chanteurs qu'elle aime.

C'est "Chez ma cousine" où elle est venue entendre Mouloudji qu'elle rencontre Francis Lay qui l'entraîne dans sa bande après le spectacle.

Enfin, c'est "Chez Patachou" qu'elle se rend le 17 février 1962 afin de soutenir un garçon qui avait été son secrétaire : Claude Figus.

                                                  Piaf et Claude Figus

Ce chanteur fait partie de l'histoire de la chanson française puisque, amoureux de Charles Aznavour, c'est lui qui lui aurait inspiré un de ses textes les plus célèbres : "Comme ils disent".

Un petit texte de Piaf est émouvant car il est écrit peu de temps avant le suicide du jeune chanteur :

"Claude Figus était amoureux de la chanson mais la chanson ne l'était pas de lui. On dit que l'amour appelle l'amour, à son tour la chanson est devenue amoureuse de Claude Figus. S'il lui reste fidèle, alors il est probable qu'ils finiront leurs jours ensemble et qu'ils vivront un grand amour! (Edith Piaf)

En venant soutenir Claude Figus, Edith dont la santé est précaire est accompagnée de son dernier amour Théo Sarapo. Elle veut faire de lui un chanteur et réalise avec lui un duo "A quoi ça sert l'amour" qu'elle espère être un tremplin vers sa gloire.

                                Dernière sortie de Piaf. Chez patachou.

C'est encore "Chez Patachou", au coeur de Montmartre que Piaf fait sa dernière apparition en public, soutenue par Théo Sarapo, quelques mois avant sa mort en octobre 1963, un peu plus d'un mois après le suicide de Claude Figus.

Aujourd'hui nulle plaque à Montmartre ne rappelle le passage de Piaf. Mais dans le square Louise Michel,, les moineaux dont elle porte le nom, n'arrêtent pas de chanter et d'enchanter Montmartre sur Seine.

 

Voir les commentaires

Publié le par chriswac
Publié dans : #MONTMARTRE Peintres.Artistes.Clébrités

Aujourd'hui 22 mai 2022 Miss Tic est allée peindre sur les nuages ses femmes impertinentes  et sensuelles. Elle reste bien vivante, généreuse et libre sur nos murs.

Quelques mois après sa mort plusieurs de ses peintures ont été détruites. Je republie cet article pour signaler ce vandalisme municipal qui me révolte.

Miss.Tic à Montmartre. Art urbain.

     Avec le succès, Miss Tic ne hante plus les rues comme elle le faisait jadis.

     Elle s'expose dans les galeries même si on la rencontre encore sur les murs des ruelles ou l'asphalte des trottoirs.

     Période révolue où on avait l'impression que c'était pour nous seuls qu'elle sortait la nuit pour nous offrir son ironie sensuelle!

 

    Aussi est-ce avec un plaisir redoublé que l'on tombe nez à nez avec une de ses créatures, comme rue Androuet...

..où elle nous fait penser à Anna Karina dans "Une femme est une femme" :

Je ne suis pas infâme, je suis une femme!

    Elle est présente sur les devantures de quelques boutiques de Montmartre , non plus en squatteuse mais en "Guest-Star" ... 

Miss.Tic à Montmartre. Art urbain.

Rue Véron....

 

Cette belle peinture impertinente a été détruite. C'était une des plus belles.

                                Il reste bizarrement l'inscription, comme une accusation!

Miss.Tic à Montmartre. Art urbain.

Rue Houdon... au 19

 

Miss.Tic à Montmartre. Art urbain.

Rue Lepic

 

Miss.Tic à Montmartre. Art urbain.

Rue Lepic

 

Rue Lepic, un clin d'œil à Barbara...

 

Miss.Tic à Montmartre. Art urbain.

Rue Lepic

 

Ces quatre peintures ont été détruites. Un petit supermarché y a mis ses couleurs (noir c'est noir)

 

Rue Véron

 

Rue Véron

 

Rue Audran ! (Oser ironiser avec Lacan! My god!)

 

 

Rue Durantin...

Miss Tic deviendrait-elle amère?

 

Miss.Tic à Montmartre. Art urbain.

     Souhaitons que l'amour qui donne des ailes ramène Miss Tic à Montmartre avec ses couleurs et son humour...

    Un cheval blanc l'attend pour cavaler à travers les rues et survoler les escaliers en y semant ses sourires et ses jeux de mots poétiques!

 

 

Voir les commentaires

Publié le par chriswac
Publié dans : #MONTMARTRE Monuments. Cabarets. Lieux, #MONTMARTRE Peintres.Artistes.Clébrités
Chez Patachou. Rue du Mont-Cenis. Historique. Cabaret.

     Elle porte un nom gourmand qui vous met l'eau à la bouche, un nom pâtissier et léger qui évoque son sourire généreux et complice. Patachou! Patachou de Montmartre!  

Chez Patachou. Rue du Mont-Cenis. Historique. Cabaret.

    Son cabaret "Chez Patachou" a longtemps été un des plus emblématiques de Montmartre et quand on l'évoque aujourd'hui, c'est avec la nostalgie d'une époque où la butte attirait encore les jeunes poètes de la chanson et leur servait de tremplin d'où ils s'élanceraient vers les étoiles.

 

    Sa carrière de chanteuse mériterait un roman et nous nous en tiendrons ici à sa présence à Montmartre, 13 rue du Mont-Cenis où elle s'installe en 1948. Elle ne porte pas encore son nom si craquant, elle est Henriette Billon, née Ragon et elle a déjà pratiqué plusieurs métiers qui ne la satisfaisaient pas. Elle a trente ans, un âge décisif, celui qui permet encore tous les possibles.

Chez Patachou. Rue du Mont-Cenis. Historique. Cabaret.

   Jouxtant une pâtisserie, un local commercial en piteux état est à louer.  Il sera transformé en salon de thé où sont servies des spécialités à base de pate à choux puis en restaurant. Les Montmartrois surnomment les restaurateurs Monsieur et Madame Patachou !

 

   La chance fait que l'occasion se présente d'agrandir le restaurant qui devient comme tant d'autres sur la Butte, un endroit convivial où un accordéoniste tient lieu d'orchestre et joue les vieilles goualantes de Paris chantées par Jean qui a un bel organe. Un soir le bel organe est grippé et c'est Henriette qui se lance. Et pour un lancement, c'est une réussite! Sa voix séduit, mi railleuse, mi romantique. Une voix spirituelle et joueuse capable d'amuser et d'émouvoir

    D'autant plus que le contraste est frappant entre l'allure bourgeoise, habillée de chic bon genre de la chanteuse et son répertoire grivois dans la tradition libertine d'un Montmartre qui déjà faisait partie du passé.

Patachou est donc née à trente ans, sur la Butte loin du XIIème arrondissement où Henriette Ragon vit le jour le 10 juin 1918!

 

    Le succès est immédiat et Patachou en animatrice qu'on jurerait chevronnée invite les spectateurs à reprendre avec elle les refrains plus ou moins égrillards de ses chansons. Lorsqu'un convive rechignait à chanter, armée d'une paire de ciseaux, elle coupait sa cravate! 

Cette castration cravatière consentie devint très vite célèbre et les amateurs l'attendaient comme un rituel qui les faisait entrer dans la grande famille qui avait pour adresse "chez Patachou"! 

En 1950, Jacques Canetti qui ne pouvait ignorer la dame du Mont-Cenis, lui rend visite, l'invite aux Trois Baudets sur le boulevard et lui fait enregistrer son premier disque. Le succès est au rendez-vous et bientôt le cabaret devient un lieu incontournable.

 

Un lieu qui entre dans la légende montmartroise, dans son histoire tout simplement, quand un chanteur un peu bourru, sans le sou, y est invité, en 1952. Patachou a aussitôt senti chez lui le cœur et l'âme d'un poète. Il s'agit de Brassens bien entendu! 

"Quand il est arrivé, j'ai surtout vu qu'il était beau... Et puis on a écouté dix, vingt, trente merveilles..."

Elle enregistre un disque de ses chansons et contribue ainsi à le faire connaître et aimer.

Il faudra des années pour que Brassens devienne plus célèbre que celle qui l'a reconnu et aidé.

En effet, admirée de Maurice Chevalier qui lui aurait donné le surnom qui l'accompagnera dans ses tournée internationales "Lady Patachou", elle est applaudie aux Etats-Unis, au Canada, au Moyen-Orient...

 

Elle représente aux yeux et aux oreilles du public étranger "la parisienne" à la fois élégante et spirituelle, capable d'amuser et d'émouvoir.

C'est encore une chanson de Brassens "Margot" que chante Patachou dans le premier film où elle joue "Femmes de Paris" de Jean Boyer en 1953.

                                                      French Cancan (1955)

Sa carrière au cinéma sera moins riche qu'à la télévision mais au moins deux grands réalisateurs l'invitent : Jean Renoir dans "French Cancan" où elle est Yvette Guilbert et Sacha Guitry dans "Napoléon" où elle est évidemment Madame Sans-Gêne!

Bien plus tard de jeunes réalisateurs lui rendront hommage en lui confiant un rôle dans leur film : Léos Carax dans "Pola X" et Ducastel et Martineau dans "Drôle de Félix".

 

                                           Drôle de Felix (2000) avec Sami Bouajila

Mais revenons rue du Mont-Cenis, dans  notre Montmartre où la lady continue de promouvoir de jeunes talents. C'est le tour de Jacques Brel qui loue dans une chambre dans un petit hôtel de la rue des Trois Frères et qui a du mal à se faire connaître bien que le Tire-Bouchon, minuscule cabaret de la rue Norvins l'accueillît souvent.  

                                                Brel chez Patachou

Brel va être engagé pour trois ans  chez Patachou et c'est pendant ces années difficiles que grâce à la stabilité et à l'attention qu'elle lui offre, il se révèle comme un des grands poètes de la chanson.

Aznavour rue Poulbot (avec quelques vrais poulbots)!

Aznavour rue Poulbot (avec quelques vrais poulbots)!

Le cabaret poursuit sa brillante carrière malgré les absences prolongées de sa créatrice. Aznavour qui vit alors modestement à Montmartre, rue des saules, y chante parfois. Il s'en souviendra et il est responsable d'une chanson que l'on entend aujourd'hui à tous les coins de rues de la butte , "La Bohème". 

"Montmartre en ce temps-là ...... Accrochait ses lilas... Jusque sous nos fenêtres"...

                                           Aznavour rue Saint-Rustique

     Un autre poète va être invité à chanter chez Patachou, Léo Ferré. Il avait rencontré au Lapin Agile Caussimon qui en était l'habitué le plus fidèle. Les deux poètes étaient alors devenus amis et ils le resteraient jusqu'à la fin de leur chemin.

                                           Les deux amis en 1985!

    Une animatrice espiègle Souris, remplace la Lady quand elle est en tournée et présente au public de nouveaux talents comme Fanon, Hugues Auffray, Claude Nougaro qui tombera amoureux de la Butte et achètera un hôtel particulier avenue Junot (rue Dereure).

     Il faut enfin citer Guy Béart pour qui Patachou ressent une grande amitié et une grande admiration. Elle l'engage sans hésiter. Une de ses chansons sera un de ses plus grands succès "bal chez Temporel".

"Si tu reviens jamais danser chez Temporel
Un jour ou l'autre
Pense à ceux qui tous ont laissé leurs noms gravés
Auprès du nôtre"

 

 

 

Chez Patachou. Rue du Mont-Cenis. Historique. Cabaret.

    La plaque apposée sur la façade cite quelques uns des chanteurs qui passèrent en ce lieu, qui ont disparu mais dont  "les chansons courent encore dans les rues."

On ne s'étonnera pas d'y trouver quelques chanteurs américains que Patachou avait connus lors de son séjour aux Etats-Unis, notamment Sinatra avec qui elle lia une véritable amitié.

                                   Piaf et Sarapo chez Patachou. Dernière sortie.

Mais les années s'enfuient et peu à peu le cabaret se démode. Quelques chanteurs y passent encore, parfois, mais comme une escale en nostalgie. Edith Piaf y chantera pour la dernière fois en 1963...

                                         

   

 Pas de plus bel adieu que ce passage rue du Mont Cenis de celle qui allait s'éteindre la même année 1963. Le cabaret ferma ses portes en 1964. Patachou quitta Montmartre pour l'Avenue de l'Opéra puis (quo non ascendet) pour le restaurant de la Tour Eiffel.

Elle n'oubliera pas ses années montmartroises pendant lesquelles le 13 rue du Mont-Cenis porta chance à des poètes et des chanteurs au temps de leur vie de bohème. 

Un autre établissement s'empara de son nom sur la place du Tertre, histoire de toujours le voir briller dans la nuit de la Butte. Mais c'était une usurpation et il a fermé ses portes, remplacé par une galerie d'art, comme le cabaret de Patachou avait lui-même été remplacé par la galerie Roussard.

André Roussard est un des grands historiens amoureux de Montmartre, de ses peintres et de ses artistes. Sa galerie rend hommage à Patachou et expose quelques photos qui rappellent la vie du lieu.

 

    On y accède par un passage qui permet d'apercevoir la maison qui fut aménagée par la chanteuse et qui à l'origine était une des plus vieilles maisons du village, remontant au XVème siècle.

 

Avant de quitter Lady Patachou, laissons le dernier mot à Brassens :

"Vous serez conquis par cette bouche qui sourit et qui boude en même temps, et ses cheveux d'épis de maïs, et ses mains qui décrochent les étoiles"

Il savait de quoi il parlait, lui qui fut une de ces étoiles!

Liens :

rues de Montmartre

Lieux et curiosités de Montmartre

Peintres, célébrités de Montmartre

(Merci à "Montmartre en revu" et à Gérard Letailleur chez qui j'ai trouvé des renseignements précieux)

 

 

Voir les commentaires

Rues Chevalier de La Barre, Lamarck, Paul Albert. Un carrefour sous les bombes. Diorama de Jerusalem. Maison Fernand Jobert. Centre Israélite de Montmartre. Le Rocher Suisse. Morelli.
Rues Chevalier de La Barre, Lamarck, Paul Albert. Un carrefour sous les bombes. Diorama de Jerusalem. Maison Fernand Jobert. Centre Israélite de Montmartre. Le Rocher Suisse. Morelli.

Voilà un endroit de Montmartre qui semble préservé et qui pourtant est l'un de ceux qui a été ravagé par les bombes alliées en 1944.

 

Quand tombe la nuit il reste vibrant de l'âme montmartroise et il nous transporte, avec la voix de Morelli qui habitait à deux pas, dans un autre monde, une autre histoire.

Rues Chevalier de La Barre, Lamarck, Paul Albert. Un carrefour sous les bombes. Diorama de Jerusalem. Maison Fernand Jobert. Centre Israélite de Montmartre. Le Rocher Suisse. Morelli.

Je l'aime profondément. J'y ai vécu alors que je commençais à enseigner, au 19 de la rue Paul Albert, tout contre la maison où vivaient Monique Morelli et Léonardi.

la maison n'a pas changé. Le chapeau de paille de Morelli est resté accroché à la fenêtre comme si, un jour de soleil, elle allait le remettre avant de sortir et dévaler la rue jusqu'au marché qu'elle aimait avenue Trudaine.

Rues Chevalier de La Barre, Lamarck, Paul Albert. Un carrefour sous les bombes. Diorama de Jerusalem. Maison Fernand Jobert. Centre Israélite de Montmartre. Le Rocher Suisse. Morelli.

Presque en face de chez elle, dans la rue du Chevalier de la Barre, au 23, elle ouvrit le cabaret, "Chez Ubu" en 1962 où elle reçut ses amies Brigitte Fontaine et Colette Magny entre autres.

                                               Morelli et Colette Magny

Mais, cornegidouille, elle n'était pas bonne gestionnaire et, trop accaparée par ses tours de chant, elle ferma boutique en 1969, année où elle chanta en 1ère partie de Brassens à Bobino.

                                      Morelli, Brassens et Mac Orlan

 Voilà 15 ans qu'elle a quitté sa maison sous le lierre pour le grand jardin du cimetière de Montmartre.

                                                 Travaux du funiculaire

Revenons en arrière, du temps où elle n'était pas encore née à l'ombre du beffroi de Béthune. Nous sommes à la fin du XIXème siècle. La Butte est sens dessus-dessous depuis que les travaux de la Basilique ont commencé avec leurs charrois, leur multitude de terrassiers, de maçons, de sculpteurs...

Au fond les 2 maisons rescapées du village

Au fond les 2 maisons rescapées du village

Les lotissements vont bon train et  le quartier va être bouleversé.

 Exception faite des maisons qui sont de part et d'autre du passage Cottin et qui sont restées telles qu'elles étaient quand Montmartre était un village. 

Rues Chevalier de La Barre, Lamarck, Paul Albert. Un carrefour sous les bombes. Diorama de Jerusalem. Maison Fernand Jobert. Centre Israélite de Montmartre. Le Rocher Suisse. Morelli.
Rues Chevalier de La Barre, Lamarck, Paul Albert. Un carrefour sous les bombes. Diorama de Jerusalem. Maison Fernand Jobert. Centre Israélite de Montmartre. Le Rocher Suisse. Morelli.

Celle du 18 date de 1850 et abritait un bougnat. Un tableau de Lucien Génin en perpétue la mémoire.

                                                       Lucien Génin

Quelques commerces lui succédèrent jusqu'à ce qu'un restaurant s'y installe pendant une dizaine d'années, sous le nom d'Atmosphère, bien que nous soyons loin  de l'hôtel du Nord.

Les 18 et 20 Chevalier de la Barre (1937. Takanori Ogisu)

Les 18 et 20 Chevalier de la Barre (1937. Takanori Ogisu)

Le pan coupé, sur le passage Cottin fut longtemps décoré par un portrait d'Arletty. Plus rien ne l'orne aujourd'hui et le petit immeuble campagnard avec ses volets bleus a repris ses airs d'antan.

 

Des plaques de grès dissociées qui formaient une frise avec vrilles, pampres, grappes et  divinités bachiques décorent la façade.

Elles auraient été récupérées dans la célèbre Tour de Solférino qui était située un peu plus haut, rue Lamarck.

                                            Les 18 et 22 et le passage Cottin (Gazi)

Rues Chevalier de La Barre, Lamarck, Paul Albert. Un carrefour sous les bombes. Diorama de Jerusalem. Maison Fernand Jobert. Centre Israélite de Montmartre. Le Rocher Suisse. Morelli.

Le petit immeuble rescapé qui lui fait face, de l'autre côté du passage Cottin, au 20, abrite aujourd'hui une crèche.

Le CIM, "Centre Israélite de Montmartre" en fit l'acquisition en 1989. Le bâtiment était près de s'effondrer et il fallut entreprendre d'importants travaux pour le consolider et sauvegarder la façade classée. Une dizaine de piles furent nécessaires pour l'ancrer à la roche à une cinquantaine de mètres de profondeur. De tels travaux furent financés en majeure partie par une donation de Marcel Bleustein-Blanchet dont la crèche porte le nom.

Rues Chevalier de La Barre, Lamarck, Paul Albert. Un carrefour sous les bombes. Diorama de Jerusalem. Maison Fernand Jobert. Centre Israélite de Montmartre. Le Rocher Suisse. Morelli.

Le 22 est une reconstruction à l'identique après les bombardements de 1944 qui ont détruit une partie de cet immeuble et de la grande maison qui en était voisine. 

 

On peut voir sur la gauche le bâtiment qui abritait le panorama de Rome

On peut voir sur la gauche le bâtiment qui abritait le panorama de Rome

La maison, au 24, saccagée par les bombes avait elle même été élevée sur le terrain où était proposé en 1900 aux badauds et aux pèlerins un "panorama", alors très à la mode, grande fresque circulaire qui donnait l'illusion au spectateur placé au milieu de la rotonde, d'être immergé dans le paysage

On en comptait plusieurs sur la Butte : le panorama de Patay, rue Becquerel, celui du Sacré-Cœur rue saint-Eleuthère, celui de Jérusalem qui nous intéresse aujourd'hui et qui en 1905 se transforma en panorama de Rome.

Le panorama lorsqu'il était animé par des jeux de lumière prenait le nom de diorama...

le diorama de Jerusalem

le diorama de Jerusalem

toile peinte par Olivier Pichat pour le panorama de Jérusalem.

toile peinte par Olivier Pichat pour le panorama de Jérusalem.

Les attractions s'avérant peu rentables, le panorama fut supprimé et sur son terrain fut édifiée en 1913 une maison avec atelier, construite pour le peintre Fernand Jobert (1876-1949).

Cette gravure d'Eugène Veder (1921) permet de se faire une idée de cette maison qui présente quelques similitudes avec la maison Neumont place du Calvaire. Son architecte est Albert d'Hont qui associé avec Félix Le Nevé, mort en 1906, a conçu plusieurs immeubles à Paris, notamment 98 boulevard Malesherbes et 11 rue Magellan.

Maison Neumont côté place du Calvaire.

Elle fut réalisée selon les indications du peintre qui avait largement les moyens d'en faire un une habitation-atelier idéale.

Bien qu'il passât une bonne partie de son temps en Bretagne, à Moëlan, il aimait l'atmosphère de la Butte et faisait partie de "la bande à Dorgelès" qui parle de lui comme d'un "peintre riche" opposé à Maclet "peintre pauvre."

 

 

Il aimait les peintres de Pont-Aven et fréquentait les Nabis. Montmartre ne semble pas l'avoir beaucoup inspiré, amoureux qu'il était des rivages bretons.

Le peintre quitta donc sa belle maison qui fut occupée alors par l'historien d'art, petit-fils de Gustave Eiffel, Georges Salles (1889-1966) spécialiste de l'Orient et, au temps de sa jeunesse, archéologue en Iran, Afghanistan et Chine.

Pendant les années où il vivait rue du chevalier de La Barre, il était directeur du musée Guimet.

Après guerre il deviendra directeur des musées de France. Il luttera alors pour la création d'un musée d'Art Moderne au Palais de Tokyo (aujourd'hui le MAM) et sera à l'origine de la commande pour le Louvre d'un superbe plafond peint par Braque et d'un mur par Picasso. 

Rues Chevalier de La Barre, Lamarck, Paul Albert. Un carrefour sous les bombes. Diorama de Jerusalem. Maison Fernand Jobert. Centre Israélite de Montmartre. Le Rocher Suisse. Morelli.

Cet homme remarquable à l'esprit ouvert et audacieux a également publié un recueil de nouvelles qu'il serait temps de redécouvrir : "Le Regard". Il y parle de la sensualité du regard, indispensable à qui désire comprendre un tableau. Un beau tableau selon lui est semblable à un bon repas : "Sa plus ou moins grande spiritualité ne sera jamais que la prolongation d'une jouissance organique."

Il n'est pas à Montmartre dans la nuit du 20 avril1944 quand ont lieu les bombardements alliés sur Paris destinés à toucher les bases arrières allemandes et les entrepôts de la RATP.

            Clichés Roger Violet. La maison à gauche est celle du peintre Fernand Jobert.

La maison gravement touchée ne sera pas reconstruite, contrairement à l'immeuble du 22.

Rues Chevalier de La Barre, Lamarck, Paul Albert. Un carrefour sous les bombes. Diorama de Jerusalem. Maison Fernand Jobert. Centre Israélite de Montmartre. Le Rocher Suisse. Morelli.

On peut voir sur ce cliché de 1948 le terrain arasé où s'élevaient la maison et l'immeuble du 22.

Rues Chevalier de La Barre, Lamarck, Paul Albert. Un carrefour sous les bombes. Diorama de Jerusalem. Maison Fernand Jobert. Centre Israélite de Montmartre. Le Rocher Suisse. Morelli.

Aujourd'hui un ensemble assez banal occupe cet espace. Il ne porte aucun vestige des dioramas ou de la demeure d'artiste qui occupèrent un temps cet endroit si particulier de Montmartre.

Rues Chevalier de La Barre, Lamarck, Paul Albert. Un carrefour sous les bombes. Diorama de Jerusalem. Maison Fernand Jobert. Centre Israélite de Montmartre. Le Rocher Suisse. Morelli.

Le côté impair de la rue du Chevalier est occupé par le CIM, Centre Israélite de Montmartre qui accueille des personnes en grande difficulté, notamment des mamans.

Pendant la guerre de nombreux orphelins y étaient hébergés jusqu'au jour où, transférés dans un autre abri après les bombardements, Ils furent raflés par la Gestapo et envoyés dans les camps de la mort.

Une plaque rappelle ce crime, une plaque semblable à celles si nombreuses qui ont été apposées sur le mur de nos écoles. 

Rues Chevalier de La Barre, Lamarck, Paul Albert. Un carrefour sous les bombes. Diorama de Jerusalem. Maison Fernand Jobert. Centre Israélite de Montmartre. Le Rocher Suisse. Morelli.

Avant la construction de ce centre, un restaurant avec jardins occupait tout l'espace de ce côté de la rue. Il s'agit du célèbre Rocher Suisse auquel nous avons consacré dans ce blog un long article.

Immeuble remplacé aujourd'hui par le CIM

Immeuble remplacé aujourd'hui par le CIM

Rappelons qu'à l'origine, un savoyard avisé, Mr Daudens acheta les terrains à un gros propriétaire dont une rue voisine porte le nom, Mr Feutrier. Peu à peu il le transforma en restaurant rustique qui évoquait ses Alpes natales.

Rues Chevalier de La Barre, Lamarck, Paul Albert. Un carrefour sous les bombes. Diorama de Jerusalem. Maison Fernand Jobert. Centre Israélite de Montmartre. Le Rocher Suisse. Morelli.

L'établissement connut divers avatars et divers propriétaires avant de rendre l'âme définitivement en 1921, racheté par la Société Israélite caritavive.

Rues Chevalier de La Barre, Lamarck, Paul Albert. Un carrefour sous les bombes. Diorama de Jerusalem. Maison Fernand Jobert. Centre Israélite de Montmartre. Le Rocher Suisse. Morelli.

Il y aurait bien des anecdotes encore à raconter sur ce petit quartier montmartrois que nous aimons et qui a, comme l'aurait dit Arletty,  "une gueule d'atmosphère"

                                                 Le 18 avec Arletty

Liens

Les rues et places de Montmartre

Les peintres, artistes et célébrités de Montmartre

Monuments et curiosités

Je tiens à remercier Hélène, grande amie montmartroise qui m'a fourni des éléments indispensables et précieux pour cet article. 

 

Voir les commentaires

Publié le par chriswac
Publié dans : #MONTMARTRE Peintres.Artistes.Clébrités

Parmi les plus originaux, généreux, révoltés et fraternels poètes qui fréquentèrent notre Butte, voilà sans doute l'un des plus authentiques : Gaston  Couté!

Je me rappelle comment ma voisine de la rue Paul Albert chantait ses textes, accompagnée à l'accordéon par Léonardi. J'ouvrais mes fenêtres pour mieux l'entendre et pour voyager dans le Montmartre à la fois misérable et étincelant du début du XXème siècle.

 

La voix intense, à fleur de blessure, forte et près de la brisure de Morelli me révélait des textes qu'à ma grande honte j'ignorais comme ce "jour de lessive", ce désir fou de sortir de la boue pour retrouver la pureté de l'enfance. Le poème est une métaphore. Le jeune désenchanté revient chez sa mère un jour de lessive :

Je suis parti ce matin même,
Encor soûl de la nuit mais pris
Comme d’écœurement suprême,
Crachant mes adieux à Paris…
Et me voilà, ma bonne femme,
Oui, foutu comme quatre sous…
Mon linge est sale aussi mon âme…
Me voilà chez nous !

Ma pauvre mère est en lessive…
Maman, Maman,
Maman, ton mauvais gâs arrive
Au bon moment !…

Tout comme le linge confie
Sa honte à la douceur de l’eau,
Quand je t’aurai conté ma vie
Malheureuse d’affreux salaud,
Ainsi qu’on rince à la fontaine
Le linge au sortir du cuvier,
Mère, arrose mon âme en peine
D’un peu de pitié !

Et, lorsque tu viendras étendre
Le linge d’iris parfumé,
Tout blanc parmi la blancheur tendre
De la haie où fleurit le Mai,
Je veux voir mon âme, encor pure
En dépit de son long sommeil
Dans la douleur et dans l’ordure,
Revivre au Soleil !…

 

Gaston Couté à Montmartre. Poète anarchiste.

Mais avant de désirer ardemment ce retour impossible vers l'enfance, Gaston Couté a rêvé de Paris depuis Meung sur Loire où Villon fut emprisonné, où Jean de Meung écrivit le Roman de la Rose et où son père était un riche meunier. Déjà la poésie et déjà les moulins (fussent-ils à eau). 

                                                 Moulin à Meung sur Loire

Il n'aime pas l'école même s'il ne manque pas de dons qui se révèlent déjà. Il la quitte pour devenir commis à la recette des impôts d'Orléans. Il est difficile de l'imaginer dans un tel poste! Il compense en écrivant dans le Progrès du Loiret et en publiant des poèmes, parfois en parler beauceron. Encouragé par des critiques flatteuses, il décide d'aller à Paris. Il a 18 ans.

 

Le Paris des poètes, des maudits, des révoltés, c'est Montmartre bien sûr! Et c'est à Montmartre qu'il débarque pour partager la vie difficile des artistes.

 

  Il va y mener la vie de bohème et loger au jour le jour dans des hôtels borgnes ou à la belle étoile. Parfois il est hébergé dans les cabarets où il commence à dire ses poèmes.

                       Le décor de céramique qui a survécu sur la façade de l'Âne Rouge

Il est accepté à l'Âne Rouge avenue Trudaine où, paraît-il, il n'est payé qu'en nature avec un café-crème quotidien. La légende de l'anarchiste miséreux est sans doute "embellie" par ce détail et il y a de fortes présomptions que selon l'habitude du cabaret il ait été payé de boissons plus fortes et de quelque relief de repas. 

Sur la droite "Souvenirs" le 84 où était le Chat Noir et sur la gauche, le 88, immeuble moderne où était Al Tartane.

On le retrouve au 88 boulevard de Rochechouart, aux soirées chantantes du modeste cabaret Al Tartane (la tartine) presque voisin du premier Chat Noir (au 84) où il dit ses poèmes devant un public qui commence à le reconnaître.

 

Gaston Couté à Montmartre. Poète anarchiste.

     Il apprécie les escaliers de la Butte qui lui permettent, jour après jour, de pratiquer un exercice de forçat : gravir les marches, un sac pesant sur les épaules, le dos courbé le pas alerte. C'est qu'il s'agit de perdre les quelques centimètres de sa petite taille qui, si modeste fût-elle, ne lui permettait pas d'échapper au service militaire et à la conscription. N'étaient exemptés que les hommes mesurant 1m54 ou moins. Or notre pacifiste engagé mesurait 1m56.

 

Des gâteux qu’on dit immortels,
Des louftingues en redingote
L’adorent au pied des autels
De leur ligue de patriotes :
Des écrivassiers de mon cul
En touchants mélos d’ambigu
Ou romances pour maisons closes
Nous chantent cette horrible chose :
La Guerre !

Oui mais, si nous avions la guerre,
Devant le feu, qui donc filerait comme un pet ?
Voyons les cabots de la guerre,
Foutez-nous la Paix ! .

   

C'est Théodore Botrel qui ,l'un des premiers, reconnaît son talent et lui offre de participer à sa revue "La Bonne Chanson". Sans doute est-il séduit par la poésie franche, marquée par son terroir, de Couté. Plus sans doute que par ses idées libertaires et par son engagement avec les dreyfusards alors que Botrel fait partie des patriotes anti-dreyfusards.

Jehan-Rictus (Steinlen 1895)

Jehan-Rictus (Steinlen 1895)

    Mais Couté ne pouvait qu'attirer l'attention d'un autre poète, bien plus proche de lui par ses idées, Jehan-Rictus.  Comme lui, Rictus qui aime employer le langage populaire et patoisant est révolté par les injustices sociales et le conformisme qui écrase et nivelle. On peut dire qu'il est son frère en poésie et l'on peut trouver chez l'un et l'autre les mêmes thèmes.

 

Extrait du Christ en bois de Couté

« Mais, toué qu’les curés ont planté
Et qui trôn’ cheu les gens d’justice,
T’es ren !… qu’un mann’quin au sarvice
Des rich’s qui t’mett’nt au coin d’leu’s biens
Pour fair’ peur au moignieaux du ch’min 

 Extrait du Revenant de Rictus                             

Avoue-le va... t’ es impuissant,
Tu clos tes châss’s, t’ as pas d’ scrupules,
Tu protèg’s avec l’ mêm’ sang-froid
L’ sommeil des Bons et des Crapules.
Et quand on perd quéqu’un qu’on aime,

Tu décor’s, mais tu consol’s pas. 

   

 

 

 

 

 

Gaston Couté à Montmartre. Poète anarchiste.

Rictus l'admire et écrit de lui qu'il est "un adolescent de génie qui a des dons extraordinaires".

Il lui facilite l'accès aux cabarets montmartrois : Les Quat'z'arts boulevard de Clichy, les Funambules, la Truie qui file rue Fontaine et bien sûr le mythique Lapin Agile.

 

    Couté impressionne mais n'est pas impressionné par les disputes et les querelles artistiques. Il juge élitiste et coupé des réalités le débat sur le cubisme par exemple. En revanche il ne manque pas de provoquer l'intérêt des habitués du Lapin. Il se lie d'amitié avec Carco, Mac Orlan, Dorgelès.

Mac Orlan est convaincu que ce jeune provincial est habité par le feu dévorant de la révolte poétique comme le fut, arrivant à Montmartre, Rimbaud. "Son renom grandira tout d'un coup un jour quelconque de l'avenir!"

  Mais le gars ne cherchait pas à plaire et à briller. Les artistes devenus célèbres qui l'ont connu ont fort peu parlé de lui, comme s'il était marginal parmi les marginaux, trop marqué par son goût pour le patois beauceron, trop engagé, trop violent par ses textes, trop révolutionnaire.... Bref il arrivait sur la Butte avec une trentaine d'années de retard, il avait manqué la Commune et son idéal libertaire.

 

 De plus, le beauceron qui ne s'aimait pas physiquement devait effaroucher les femmes. Il vivait la plupart du temps en solitaire.

Il était une fois un gars si laid, si laid
Et si bête ! qu'aucune fille ne voulait
Lui faire seulement l'aumône d'un sourire 

 

 

 

Gaston Couté à Montmartre. Poète anarchiste.

Son adresse principale à Montmartre, la seule qui soit certaine, c'est à l'hôtel Bouscarat, refuge d'artistes fauchés. Il louait là un garni. L'hôtel qui faisait partie du Montmartre légendaire a été détruit et remplacé par un petit immeuble qui enlaidit  la place du Tertre.

 

Ironie du sort, le restaurant qui occupe le rez de chaussée s'appelle aujourd'hui "La Bohème". Couté aurait eu du mal à s'y payer un café-crème!

Une plaque a été apposée sur le mur de briques côté rue du Mont-Cenis. Des touristes de bonne volonté tentent de la lire sans comprendre qui est honoré en ce lieu. 

 

     Parmi les autres lieux qu'il fréquenta dans le quartier il y a la Maison du Peuple, impasse Pers,  le Progrès Social rue de Clignancourt... Il participa à  plusieurs journaux libertaires, "la Barricade" et surtout "La Guerre Sociale" hebdomadaire anti militariste où il publiait chaque semaine une chanson.

 

Son ami le journaliste Victor Méric évoque cet engagement populaire de Couté :

"Il connut, impasse Pers, de prodigieux succès. Il entrait de plain-pied dans la confiance populaire. Ses poèmes colorés, directs, aux images audacieuses et brutales, frappaient les imaginations, allaient au cœur des foules. Xavier Privas devait plus tard l’appeler le  Mis­tral de la Beauce. Et il ajoutait :

            N’est-ce pas le sourire aux lèvres et le couplet joyeux à l’esprit que ce paysan philosophe a fustigé l’hypocrisie sociale et cinglé les vices humains ?"

 

 

(...) Mais en nos âmes de vingt ans,
Gronde une révolte unanime :
Nous ne voulons pas plus longtemps
Être des tâcherons du crime !
Pourtant, s’il faut encore avant
De jeter nos armes au vent
Lâcher leur décharge terrible,

Nous avons fait choix de nos cibles :
En nos mains de semeurs de blé
Dont on voyait hier voler
Les gestes d’amour sur la plaine,
En nos mains de semeurs de blé
Puisqu’on vous tient, fusils de haine !…
Tuez ! s’il faut tuer demain,
Ceux qui vous ont mis en nos mains !…

Il ne connaîtra pas la terrible boucherie de la première guerre puisqu'il mourra en 1911.

 

Gaston Couté à Montmartre. Poète anarchiste.

   C'est dans son garni de la place du Tertre qu'il traîne une tuberculose aggravée par ses conditions de vie et son goût trop prononcé pour l'absinthe. Il est frappé d'une congestion pulmonaire et transporté à l'hôpital Lariboisière où il meurt le 28 juin 2011. 


 

Il sera inhumé à Meung sur Loire, dans la ville où Villon quelques siècle plus tôt, écrivait son "Testament" en commençant par ces mots "En l'an trentième de mon âge."

Gaston Couté lui est en l'an trentième et demi de son âge. 

Il était une fois un gars si laid, si laid
Et si bête ! qu'aucune fille ne voulait
Lui faire seulement l'aumône d'un sourire ;
Or, d'avoir trop longtemps souffert l'affreux martyre
De ne pas être aimé lorsque chante l'amour,
Le pauvre gars s'en vint à mourir un beau jour...
On l'emmena dormir au fond du cimetière,
Mais, son âme, un Avril, s'échappa de la terre
Et devint une fleur sur sa tombe, une fleur
Qu'une fille cueillit et mit près de son cœur.


 

Voir les commentaires

Chez Mimiche. Temple Debray. 48 rue du Chevalier de La Barre. Michel Lafond dit Mimiche.

Voilà une maison devant laquelle on passe, entre colifichets et tableaux montmartrois peints en Chine, sans savoir qu'elle a sa modeste part dans l'histoire de la Butte.

Chez Mimiche. Temple Debray. 48 rue du Chevalier de La Barre. Michel Lafond dit Mimiche.

Lorsque la rue s'appelait rue des rosiers, cette maison était située au 20. Elle était au XIXème siècle la propriété d'Auguste Pierre Debray. Un nom bien connu sur la Butte, celui d'une famille de meuniers qui a su en temps voulu passer des moulins aux affaires.

Abside de l'église et jardins (1900)

Abside de l'église et jardins (1900)

La maison commence à se faire remarquer quand les archéologues à la recherche des vestiges gallo romains de Montmartre situent le temple de Mars à proximité de l'église Saint-Pierre. 

Abside vers l'endroit où s'élevait le temple.

Abside vers l'endroit où s'élevait le temple.

L'un d'eux, Vacquer, émet l'hypothèse qu'il s'élevait à l'emplacement de la maison, dans le prolongement du cimetière du Calvaire. 

                           Une des colonnes gallo-romaines de réemploi dans l'église

Il appelle "Temple Debray" le fameux édifice qui aurait pu donner son nom à Montmartre bien que linguistes et spécialistes soutiennent la thèse selon laquelle c'est du temple de Mercure, situé plus à l'ouest que viendrait ce nom  (Mont Mercure.... Montmarcre.... Montmartre).

 L'explication la plus serinée "le mont des martyrs", est assurément la plus fantaisiste.

Chez Mimiche. Temple Debray. 48 rue du Chevalier de La Barre. Michel Lafond dit Mimiche.

Ce même Vacquer  que contredisent ses collègues reconnaîtra s'être trompé quand il découvrira les substructions du temple de Mars à l'est du chevet de l'église, sur un espace aujourd'hui occupé par la rue du Cardinal Guibert et le flanc ouest du Sacré-Cœur. Peu importe! Le nom de Temple Debray subsistera longtemps après la rectification.

Le restaurant dans la 3ème maison en partant de la gauche.

Le restaurant dans la 3ème maison en partant de la gauche.

La maison n'a pas fini son voyage historique. Elle se transforme en restaurant au début du XXème siècle. Restaurant dont le nom n'est pas forcément engageant : "Chez ma concierge".

Chez Mimiche. Temple Debray. 48 rue du Chevalier de La Barre. Michel Lafond dit Mimiche.

Et puis un beau jour, une belle personne haute en couleurs et au cœur plus grand que lui, le clown Mimiche remplace la concierge pour donner son nom au nouveau restaurant : "Chez Mimiche".

 

Mimiche a abandonné sa tenue de clown blanc mais il continue de pratiquer son instrument favori, le violoncelle. Il aime jouer avec Marcel Aymé avec qui il a noué des liens d'amitié, dans la fanfare créée par le peintre Gen Paul : "la Chignolle à Gégène".

                                                       La Chignolle à Gégène

L'enseigne aujourd'hui disparue le représentait penché sur son instrument.

 

     Il faut dire quelques mots maintenant de cet homme exceptionnel dont le vrai nom est Michel Lafond, né à Boulogne sur mer en 1899.  Il entre au Conservatoire pour apprendre le violoncelle. En même temps il est attiré par le cirque installé près de la boulangerie de ses parents. Il est doué et descend à Paris pour parfaire sa formation. La guerre le rattrape, il est mobilisé. Il échappe à la tuerie et quand il revient, il trouve un poste de violoncelliste au Café de Paris à Monaco. Ainsi jouera-t-il dans la cathédrale Saint-Charles pour le baptême du Prince Rainier.

 

Il n'a pas oublié son désir d'une autre vie, tournée vers les autres, afin de les faire rire et parfois pleurer. Quand il découvre les Fratellini, il décide de remettre sa tenue de clown blanc et de chanter, de raconter des histoires tout en ponctuant son numéro avec les mélodies joyeuses ou plaintives de son violoncelle. Il rencontre le succès sous le nom de Melody's et joue dans des salles prestigieuses comme l'Olympia ou le Lido. 

                                                       Les Fratellini

Il se produit souvent bénévolement afin d'aider des orphelinats, notamment à Bruxelles, ville dont il recevra une décoration reconnaissante. Quand il rencontre les clowns Antonet et Baby, il se laisse entraîner par eux et, changeant de nom pour devenir Mimiche, petit nom affectueux qu'employaient ses parents, il se produit dans de grands cirques en France et à l'étranger.

 

Quand il revient à Paris, le poste convoité de chef d'orchestre des Folies bergère lui est proposé. Il l'accepte comme il acceptera celui du Caveau du Moulin Rouge. C'est l'époque où il se lie d'amitié avec quelques personnalités comme Edith Piaf ou Mermoz.

 

La 2ème guerre, on n'ose écrire la seconde, le rattrape une fois encore. Quand il est libéré, il passe d'un orchestre à l'autre, de Léo Vali à Ray Ventura et sa générosité naturelle, sa curiosité des autres font qu'il est apprécié de nombreux artistes comme Dufy, Lorjou, Jean-Pierre Cassel ou Marlène Dietrich.

                                                    Ray Ventura

 Il décide de jeter l'ancre sur la Butte qu'il connaît bien puisque qu'elle est habitée par des gens qui sont devenus ses amis et avec lesquels il aime passer de longues soirées. Il y devient brocanteur-antiquaire puis, l'occasion faisant le larron, il tombe sur le 48 rue du Chevalier où ses économies lui permettent de créer son restaurant, ouvert aux amis, aux artistes, aux chanteurs des rues qui sont nourris dans cette bonne auberge!

 

André Roussard dans son dictionnaire des lieux de Montmartre évoque le restaurant dans ses heures joyeuses : "Une faune bien particulière de personnages farfelus, amateurs de canulars, attirait un grand nombre de jeunes femmes assez libres de moeurs. On y montait des canulars qui feraient dans les jours suivants l'actualité de la Butte. Par exemple, un jour on avait décidé d'installer nuitamment un panneau de rue avertissant le piéton du passage de gros gibiers. Ce panneau resta plusieurs mois...

 

Mimiche n'oublie pas sa ville natale où il se rend souvent pour parrainer l'orphelinat de la Marine dont il devient bienfaiteur. Sans avoir connu Poulbot, c'est à lui cependant qu'il ressemble le plus. 

                                                      Poulbot et les gosses

Quand Jeanne, sa femme qui gérait le restaurant, meurt, il se retrouve seul et désemparé. Il passe des nuits entières à jouer sur son violoncelle. (Les sanglots longs des violons...)

Son instrument est un Cecilium qui résonne un peu comme un harmonium et qui fut souvent utilisé dans les églises quand leur orgue avait été détruit pendant la guerre.

Il meurt peu de temps après Jeanne.

Il a pris soin de donner son argent à des œuvres caritatives et de léguer son violoncelle aimé au Conservatoire de Boulogne où, silencieux, protégé par une vitrine, il attend le Jugement Dernier pour retrouver Mimiche.

 

La suite n'a pas grand intérêt. L'enseigne de Mimiche disparut.

Le restaurant connut plusieurs avatars, service rapide, trattoria, avant de devenir récemment un commerce qui attire les passants narcissiques qui désirent se faire photographier l'iris! Opération qui ne se fait pas à l'oeil!

 

Chez Mimiche. Temple Debray. 48 rue du Chevalier de La Barre. Michel Lafond dit Mimiche.

C'est donc une parcelle de notre histoire montmartrois que raconte ce numéro 48 de la rue du Chevalier de la Barre. Une étincelle du joyeux kaléidoscope que fut notre Butte. Un temple romain, un clown, un violoncelle, du vin, des canulars, des rencontres amoureuses.... parfums d'une époque révolue mais que continuent de humer en passant les amoureux de Montmartre!

Mais je laisse la dernière parole à Mimiche qui a confié sa devise à son ami journaliste Roger Lemaire :

"Tu vois, ne penser qu'aux autres, c'est comme ça qu'on meurt heureux." 

 

Voir les commentaires

Publié le par chriswac
Publié dans : #MONTMARTRE Peintres.Artistes.Clébrités

     L'exposition du musée de Montmartre "Fernande Olivier et Picasso" (jusqu'au 19 février) présente les illustrations faites par Van Dongen pour illustrer le livre de son ami de bohème Roland Dorgelès "Au beau temps de la Butte".

Dorgelès parle du peintre dans son ouvrage : "Un grand fauve qui n'est pas gâté par le sort. Deux bouches à nourrir: sa femme et sa fille, or ses scènes de bal et ses fêtes foraines aux couleurs flamboyantes effraient les amateurs et rebutent  les marchands."

Page de titre"Comment! Vous me connaissez?"

Page de titre"Comment! Vous me connaissez?"

Dans son Prélude, l'écrivain, de retour sur la Butte après la 2ème guerre, rencontre une jolie femme qui lui rappelle celle qu'il a connue au Lapin Agile une trentaine d'années plus tôt. Il est "interdit" quand il l'entend le saluer par son nom.

"-Comment! vous me connaissez?

-Oh non! Mais maman vous connaît très bien.

Une dame parut. Elle avait les cheveux gris... C'était elle ma jeunesse, et non la blonde aux cheveux dorés." 

Lapin Agile. Frédé.

Lapin Agile. Frédé.

Van Dongen. Lithographies pour le livre "Au beau temps de la Butte" de Dorgelès

 La tonalité du livre est résumée par ce prélude. Dorgelès part à la recherche d'un Montmartre qu'il a aimé lorsqu'il était jeune. Un Montmartre qu'il ne retrouvera pas, pas plus que sa jeunesse !

Le Lapin Agile a changé lui aussi et survit grâce à sa réputation. En 1949 quand Dorgelès publie son livre, Frédé vit dans la garenne céleste où l'âne Lolo continue de peindre des couchers de soleil. Dorgelès se rappelle Frédé "courbé sur sa guitare, murmurant les Stances de Ronsard ou lançant à pleine gorge "la vigne au vin" que les braillards reprennent au refrain".

La laiterie place du Tertre

La laiterie place du Tertre

Van Dongen. Lithographies pour le livre "Au beau temps de la Butte" de Dorgelès

Van Dongen restitue l'image d'un Montmartre-village avec sa laiterie sur la place du Tertre.

Plus de lait, plus de vaches, plus de village aujourd'hui.... Pas même une boulangerie! La dernière, place Jean-Baptiste Clément, a été remplacée il y a une quinzaine d'années par un bazar de souvenirs made in China.

Van Dongen, Fernande, Picasso, Apollinaire et Max jacob aux Enfants de la Butte.

Van Dongen, Fernande, Picasso, Apollinaire et Max jacob aux Enfants de la Butte.

Voilà une des lithos les plus intéressantes de Van Dongen qui en réalité pense à son Montmartre plus qu'à celui dont parle Dorgelès avec ses trop personnelles histoires. Il se représente de dos, devant le couple mythique que formaient Picasso et Fernande Olivier. Sur le trottoir passent deux autres personnages éminents de cette époque : Apollinaire et Max Jacob... La plus belle figure est celle de Fernande Olivier que Van Dongen respectait plus que ne le faisait Picasso. Dorgelès l'évoque : "sa radieuse compagne aux longs yeux d'odalisque".

La vache enragée terreur de Montmartre

La vache enragée terreur de Montmartre

Pas de Montmartre sans vache enragée! Le fameux défilé carnavalesque organisé par les artistes défraya la chronique.

                                                  La vache enragée (Lautrec)

La vache n'eut pas de veaux et le défilé n'eut que deux éditions mais il marqua les esprits et la fameuse vache devint à l'instar du chat noir, une des icônes de la Butte.

Picasso dans son atelier

Picasso dans son atelier

Hommage à celui qui régnait, capitaine du Bateau-Lavoir, sur la bande qui l'entourait et l'admirait...

 

Max Jacob

Max Jacob

Max Jacob invité par Manolo

Max Jacob invité par Manolo

Deux lithos représentent Max Jacob, le plus aimé, le plus doux des poètes et des amis. Van Dongen l'a bien connu et Dorgelès parle de lui longuement dans son livre.

"Serein, lumineux, nimbé d'or, le voilà le Patron des bohèmes! Max Jacob, Max de la Butte, Max le visionnaire, Max du Sacré-Cœur (...) un tendre sourire aux lèvres et des étoiles au fond des yeux."

Dorgelès va jusqu'à imaginer qu'un jour l'église fera de lui "le bienheureux Max de Drancy!"

Il se trompait! L'amour trop sensuel de Max Jacob pour le Christ avait de quoi rebuter les croyants vertueux (!). Il écrit en effet, s'adressant au Christ décloué de sa croix : "J'aime sentir ton corps dans mes bras. ton ventre dur lui aussi. Dieu jeune homme plus que charmant, plus que séduisant, plus que génial (...) Corps de mon cœur, cœur de mon corps, reviens que je t'aime encore."

Van Dongen et Dorgelès au marché rue des Abbesses

Van Dongen et Dorgelès au marché rue des Abbesses

(...)"Van Dongen m'a représenté près de lui au marché ambulant de la rue des Abbesses."

Ici le peintre illustre un moment d'amitié avec Dorgelès, au temps de leur jeunesse et de leurs balades dans le quartier. Grande liberté du peintre dans le choix de ses lithos et je me demande parfois s'il a vraiment lu le bouquin de son ami ou s'il a préféré simplement évoquer le Montmartre de ses propres souvenirs.

Vlaminck et Derain à Chatou

Vlaminck et Derain à Chatou

Allusion à des peintres dont Dorgelès parle à peine mais qui étaient proches de Van Dongen et du fauvisme.

Chanteurs de rues. Le rêve à bon marché.

Chanteurs de rues. Le rêve à bon marché.

Les chanteurs des rues comme Montmartre les accueillait et comme il les accueille toujours.

 

Utrillo... Litrillo... Deux êtres luttaient en lui

Utrillo... Litrillo... Deux êtres luttaient en lui

     Utrillo est appelé ironiquement "Litrillo" par Dorgelès qui parle de lui comme d'un possédé de l'alcool. Il évoque le temps où pour le prix d'un repas il aurait pu acheter ses toiles, mais il avait préféré inviter une belle à dîner et sans doute prolonger un peu plus la soirée.

Modigliani peintre maudit de Montparnasse

Modigliani peintre maudit de Montparnasse

Dorgelès écrit de nombreuses pages sur le quartier latin et sur celui de Montparnasse. Il a vu comment peu à peu Montmartre s'embourgeoisait et cessait d'attirer les peintres.

                                                  Modigliani et Picasso

Modigliani qui habite rue Caulaincourt où il est ami de la bande à Picasso, notamment de Van Dongen et d'Utrillo, doit quitter Montmartre quand les promoteurs détruisent les vieux quartiers populaires du maquis.

Le moulin de la Galette avant 1914

Le moulin de la Galette avant 1914

Evidemment le fameux Moulin de la Galette est évoqué. Celui, le vrai, qui était alors remonté à l'angle des rues Lepic et Girardon et celui, rue Lepic, devenu jumeau par le nom alors qu'il s'appelle en réalité le Blute fin 

André Salmon et Mac Orlan rue St-Vincent

André Salmon et Mac Orlan rue St-Vincent

       Salmon et Mac Orlan faisaient partie de la même bande d'amis qui fréquentaient le Lapin agile. Salmon habite un temps au Bateau Lavoir et publie son premier recueil avant Max Jacob et Apollinaire. Si l'on veut connaître le Montmartre de la bohème, le livre de Salmon "La négresse du Sacré-Cœur" nous apportera plus d'informations que celui de Dorgelès écrit après la guerre. 

Le Bateau-Lavoir

Le Bateau-Lavoir

Le mythique Bateau Lavoir fait partie des illustrations. Seule sa façade est représentée et non les couloirs et les coursives misérables où furent peintes quelques-unes des toiles les plus célèbres du monde!

 

Poulbot l'ami des gosses

Poulbot l'ami des gosses

Poulbot ne pouvait manquer à l'appel., "le grand Francisque Poulbot, patron des gosses".

 

Les couples du haut de la Butte, comme dans Louise

Les couples du haut de la Butte, comme dans Louise

 "Comme dans Louise", allusion à l'opéra de Gustave Charpentier qui connut un immense succès populaire.

Le compositeur qui habitait sur le boulevard de Rochechouart s'inspirait du petit peuple de son quartier : Louise une jeune couturière et Julien un peintre bohème qui se donnaient rendez-vous sur les hauteurs de la Butte.

Un coin fameux de la Butte, l'impasse Girardon.

Un coin fameux de la Butte, l'impasse Girardon.

La dernière litho de Van Dongen n'est pas la plus originale.

Elle représente l'impasse Girardon où Gen Paul avait son atelier.

     Les lithos de Van Dongen ne sont sans doute pas le meilleur de son œuvre. elles témoignent avant tout de son amitié pour Roland Dorgelès, une amitié nouée pendant les années de bohème et toujours vivace après la 2ème guerre, alors que l'écrivain est devenu célèbre depuis ses "Croix de bois" et le peintre avec ses toiles vendues dans les plus prestigieuses galeries.

La vache enragée fait désormais partie de leur passé et appartient au folklore du Montmartre de leur jeunesse, du beau temps de la Butte.

Voir les commentaires

<< < 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 20 30 > >>

Archives

Articles récents

Hébergé par Overblog