L'article de février 2016 est remis à jour aujourd'hui car une nouvelle fresque est apparue cette année...
La rue Poulet ne porte pas le nom des gallinacés décapités et plumés chaque année par milliards mais celui du propriétaire des terrains sur lesquels elle a été bâtie.
Sa femme l'appelait "mon poulet" et il appelait sa femme "ma cocotte". Mais le masculin l'emportant sur le féminin, c'est Poulet qui a donné son nom à la rue et non pas Cocotte! C'est dommage car la rue Cocotte ne manquerait pas d'un charme galant un tantinet canaille!
Cette rue fut à la mode quand Dufayel faisait de ses Galeries de la rue Clignancourt un centre commercial attractif avec serres tropicales, théâtre et cinéma. Après une période de déréliction, elle est redevenue à la mode, une mode africaine dont le centre névralgique serait Château Rouge. g>
Plus de vingt salons de coiffure s'y succèdent avec dans leurs vitrines des ribambelles de têtes coiffées de perruques.
Il faut le hasard d'une porte ouverte pour découvrir dans l'entrée d'un immeuble un univers qui nous invite lui aussi au voyage!
De même que Poulbot, rue Damrémont, a recouvert les murs de céramiques représentant les saisons à Montmartre, une artiste peintre qui habite là, a commencé à représenter les saisons sur le mur de droite.
C'est une des merveilles montmartroises que ces échappées vers le rêve que des artistes ont ouvertes généreusement pour les habitants et pour leurs visiteurs.
Les deux fresques évoquent le printemps et l'été. Des balustrades rouges forment un décor de Chine, devant un ciel immense.
Les enfants et les adolescents qui sont représentés, souriants et paisibles, sont des habitants de l'immeuble. Un jour lointain, ils auront plaisir à se revoir comme certains vieux Montmartrois ont revu avec émotion les gosses qu'ils étaient, saisis par Poulbot dans leurs jeux.
Pas de Montmartre sans chat!
Le chat de Bruant, les chats de Steinlen...
le chat de Michèle Lemercier!
Nous entrons dans un paysage harmonieux où les oiseaux chantent, les buissons fleurissent et les jeunes sourient...
Un paysage entre rêve et réalité, un moment éphémère et éternel...
Les couleurs franches et claires sont celles des primitifs italiens, de François parlant aux oiseaux...
Une troisième saison a fait son apparition sur les murs en l'année 2020... Il s'agit de l'automne.
Non pas l'automne languissant qui annonce les brumes et les froidures mais un automne de feu et de jeunesse.
Un moment suspendu comme le mouvement de la balançoire sur un fond de forêts rousses.
De part et d'autre du portique de jeunes enfants participent au jeu comme deux anges souriants de part et d'autre du portail des cathédrales.
Couleurs claires, bouquet de vie…
Etoile bleue
Par chance l'auteure de ces fresques passait par là. Elle nous a accueillis chez elle, dans son atelier ouvert sur un jardin.
Nous avons vu quelques uns de ses tableaux...
Un moment de grâce dans la lumière et les senteurs de l'été... Une jeune fille qui passe comme une caresse
La lumière et la sensualité de Bonnard sont présentes... et le chat qui dort sur le radiateur se sent parfaitement bien dans cette toile!
Quelques toiles évoquent d'autres influences comme celle de Morandi, avec ce triptyque de bouteilles. Mais malgré le thème différent et la nouvelle recherche, ce qui frappe c'est ce côté "zen", cette simplicité sans pathos, ce recueillement.
Avant de quitter l'atelier, je contemple cette toile qui me fascine et que j'emporterais bien si elle ne mesurait plusieurs mètres et si elle était à vendre!
Elle prend prétexte de la parabole de la visite de Jésus à Marthe et Marie pour transmettre un message dont notre époque a toujours besoin, un message humaniste et féministe.
Jésus à la fois simple et royal est représenté à droite tandis que Marie assise sur les tapis, à l'aise, discute avec lui.
On connaît la parabole: Jésus arrive dans une maison où Marthe s'évertue à le servir, à préparer le repas tandis que Marie s'assied pour échanger avec lui...
Marthe s'irrite : Je suis seule à faire le service, dites à ma sœur de m'aider!
Jésus répond : Marthe, Marthe, tu t'inquiètes et tu t'agites pour bien des choses. Une seule est nécessaire. Marie a choisi la meilleure part, elle ne lui sera pas enlevée!
Le message est adressé à ceux qui assignent à la femme (comme au temps de Jésus) un rôle d'épouse, de mère, de servante. Marthe accepte ce rôle, alors que Marie, encouragée par l'attitude du visiteur se met à son niveau, femme non pas soumise mais égale.
Dans la perspective, au centre Marthe montre sa désapprobation en se détournant de celui qui aimerait rencontrer son regard. Elle est triste, le visage penché vers une pomme, assise sur un canapé qui semble recouvert d'un linceul. Elle est la femme qui remplit le rôle auquel on lui a fait croire qu'il était le sien, le seul.
Cette toile élégante et sensuelle nous dit aussi qu'il faut profiter du moment présent, du cadeau des rencontres, être capable de nous détourner un instant de nos vains soucis.
C'est un tel moment que nous avons vécu en découvrant cette artiste, en regardant et en "écoutant" ses œuvres.
Merci à elle pour ce cadeau de la rencontre.