Alors que Beaubourg consacre une passionnante exposition au Surréalisme, le petit musée de Montmartre ouvre ses portes à un poète qui participa à ce mouvement et fut ami de quelques uns des plus grands peintres de sa génération.
Prévert et Picasso
L'exposition est riche de documents et de photos qui retracent la vie de Prévert. Comme souvent dans les expos ambitieuses, la dispersion, le picorage font partie de la balade proposée.
Je ne m'attacherai dans ce résumé de ma visite qu'à la période montmartroise qui fut féconde.
Prévert au Marché Saint-Pierre
Prévert ne s'était jamais vraiment fixé dans une rue de Paris, dans un quartier. Il a l'âme et l'esprit voyageurs. Il survole, il se pose, profite du soleil ou de la pluie puis repart se poser sur une autre branche.
Et voilà qu'en 1953, il lui est proposé de se poser à Montmartre.
Dans une impasse qui jouxte le Moulin Rouge et qui a conservé ses jardins, ses oiseaux et ses chats : La Cité Véron.
Pour la première fois, il a l'occasion de "s'installer", lui qui a vécu comme un bohême d'hôtel en meublés occasionnels. Le lieu est exceptionnel, lumineux, ouvert sur une large terrasse qui donne sur le Moulin Rouge.
Il fait appel à un ami architecte Jacques Couëlle qui restructure l'espace sur les conseils d'Alexandre Trauner (génial décorateur des "Enfants du Paradis" dont Prévert est le dialoguiste)..
L'espace blanc joue avec la lumière en ménageant des endroits plus secrets. Prévert se sent enfin "chez lui" dans ce Montmartre vivant de nuit comme de jour.
Il a pour voisin, dans l'appartement qui donne comme le sien sur la fameuse terrasse dite "des Trois Satrapes", Boris Vian. Le lieu devient convivial et festif à l'ombre des ailes rouges.
L'exposition permet de voir le bureau et son univers qui mériterait un inventaire à la Prévert!
Des portraits, des livres, des jouets, des crayons, des pastels, des ciseaux et tout ce qui est utile pour les collages surréalistes.
Portraits de Prévert et Michelle
En effet, c'est là, dans son refuge montmartrois que Prévert réalise la plupart de ses collages.
Un des collages qui représente la cité Véron est dédicacé à son voisin Boris Vian
L'expo, comme d'habitude, pâtit du manque d'espace. Elle propose un grand nombre de photos, documents, lithographies qui retracent l'activité de Prévert et ses liens avec quelques uns des plus grands artistes de son temps : Calder, Miro, Picasso, Max Ernst, Braque, Chagall...
Avec Calder, Prévert illustre un recueil de lithos : "Fêtes". Il y insiste sur l'aspect joyeux et optimiste.
Avec Max Ernst, il s'amuse autant que le peintre en faisant parler les oiseaux
"La dépouille mortelle de l'homme est moins belle que celle de l'oiseau"
Il se sent proche de Miro par le côté enfantin et joueur. Pour une fois c'est le peintre qui dans l'ouvrage "Adonides" illustre les textes du poète alors que dans les autres recueils, les mots de Prévert accompagnent les dessins.
"Les secrets les mieux gardés sont ceux qui jamais n'ont été demandés".
"C'est quand il n'y a pas grand-monde qu'il y a grand-chose."
"Quand la vie a fini de jouer, la mort remet tout en place."
Dans l'avant dernière salle, disons plutôt dans le couloir étroit qui mène à la dernière salle, sont exposées quelques feuilles de l'agenda de Prévert.
Des feuilles format 21x27 sur lesquelles étaient inscrits les rendez-vous du jour (on y trouve Arletty ou Piaf) accompagnés de dessins de fleurs.
Je vous conseille de visiter l'expo aux heures creuses afin de ne pas être gêné par l'exigüité du musée et afin d'avoir envie de redécouvrir les poèmes de Prévert et, qui sait, de les relire avec les yeux de ce jeune visiteur devant le chat-serpent de Calder!
Liens:
Les artistes, les personnalités de Montmartre
Prévert au Marché Saint Pierre devant le magasin Merode!