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Montmartre secret

Montmartre secret

Pour les Amoureux de Montmartre sans oublier les voyages lointains, l'île d'Oléron, les chats de tous les jours. Pour les amis inconnus et les poètes.

Publié le par chriswac
Rue de la Tour des Dames.
Rue de la Tour des Dames.

     C'est une courte rue de Paris (160 mètres) mais quelle richesse! Quelques unes des plus grandes "stars" de la première moitié du dix-neuvième siècle y ont vécu, au cœur de ce quartier à la mode dont les artistes qui y vécurent firent une "Nouvelle Athènes" dans un Paris qui artistiquement était le centre du monde.

Hôtel de Lestapis, emplacement du moulin des Dames (avec son voisin)

Hôtel de Lestapis, emplacement du moulin des Dames (avec son voisin)

     Le nom de la rue a pour origine un moulin de pierres, au niveau du 2 actuel, qui appartenait depuis le quinzième siècle aux abbesses de Montmartre.

Cette tour existait encore en 1820 quand se lotissait la rue. Elle était située entre l'hôtel Lestapis et son voisin avant d'être détruite.

Village des Porcherons.

Village des Porcherons.

     La rue porta différents noms quand elle faisait encore partie du village des Porcherons. Ruelle Baudin, rue Baudin, puis en 1789 rue de la tour des Dames.

Hôtel de Mlle Mars

Hôtel de Mlle Mars

Façade sur jardin.

Façade sur jardin.

    Au numéro 1 nous voyons l'hôtel particulier de Mlle Mars. Nous avons consacré un article à cette actrice qui fut une star de son époque.

Mademoiselle Mars (Gérard)

Mademoiselle Mars (Gérard)

     L'actrice préférée de Napoléon fut pendant 40 ans la vedette de la Comédie Française. "Elle est divine, elle est parfaite" écrivit Stendhal qui fermait les yeux en l'écoutant de peur de tomber amoureux.

 

Rue de la Tour des Dames.

     Son hôtel appartint à Bougainville pour qui il fut construit en 1820 par l'architecte Visconti, un des meilleurs représentants du style "Restauration" auteur entre autres du tombeau de Napoléon aux Invalides et de la fontaine de la place Saint-Sulpice.

Mademoiselle Mars (François Lagrenée)

Mademoiselle Mars (François Lagrenée)

     Mlle Mars qu'on appelait "le diamant" fut une grande amoureuse, fidèle plusieurs années à plusieurs hommes successifs avant de connaître un dernier grand amour avec un homme de 25 ans plus jeune qu'elle et qui l'aima jusqu'à sa mort.

Rue de la Tour des Dames.

     Le 2 est l'hôtel de Lestapis construit entre 1822 et 1824 par l'architecte Biet pour le Prince de Wurtemberg. Son nom vient de la famille qui l'acquit et l'occupa entre 1838 et 1870, 

Rue de la Tour des Dames.

    Le 3 est un autre hôtel particulier qui fut celui d'une actrice, une tragédienne qui fut la Phèdre de son temps: Mademoiselle Duchesnois (1777-1835)

     Mademoiselle Duchesnois n'avait pas la grâce de sa voisine. Elle était un peu hommasse mais habitée par le sens de la tragédie. En pleine période romantique elle resta fidèle à Racine. Chaque représentation de Phèdre à la Comédie Française se donnait à guichets fermés!

     Elle fut, elle aussi, une grande amoureuse et eut trois enfants de trois pères différents.

Rue de la Tour des Dames.

     L'hôtel qu'elle acheta en 1822 avait été construit deux ans plus tôt par Auguste Constantin, un des principaux architectes de la Restauration.

Rue de la Tour des Dames.

    Le 4 est l'hôtel Cambacérès. On a vu que le fameux moulin s'élevait en partie sur le terrain où il fut construit. Son architecte est Clouet.

     Cet hôtel me pose deux problèmes. Son architecte tout d'abord, inconnu au bataillon, Cambacérès ensuite car Wikipédia qui sait tout prétend que c'est le comte Etienne Hubert de Cambacérès, archevêque de Rouen qui l'acquit en 1826, or à cette date le saint homme était mort depuis huit ans!

   

     Dans la lignée Cambacérès le seul dont les dates pourraient correspondre est Pierre Hubert de Cambacérès, pair de France sous Louis Philippe, Duc sous le 2nd Empire et qui à partir de 1832 devint conseiller municipal de Verrières le Buisson où il acquit un grand domaine.

       Je livre cette double énigme à d'éventuels lecteurs amoureux du quartier.

Le 5

Le 5

     Au 5 a vécu le peintre Horace Vernet ( 1789-1863) qui fut célèbre en son temps pour ses toiles de bataille et ses sujets orientaux. Amoureux des paysages algériens, il acheta, la gloire venue, un vaste domaine près de Hyères où il se fit construire un grand château composite.

Iéna (Vernet)

Iéna (Vernet)

     Baudelaire est sévère avec lui et le définit comme "un militaire qui fait de la peinture"!

                                                       Mazeppa

     Il se montrait sans doute sévère. Si le succès du peintre lui était assuré par ses toiles historiques, il fut un romantique par son goût de l'orient, par la violence des contrastes. Il peignit à la mort de sa fille "l'Ange de la mort" qui aurait pu toucher le poète des Fleurs du Mal.

 

     L'architecte de cet hôtel est Louis Pierre Haudebourt surtout connu pour avoir eu pour femme une artiste de grand talent, Hortense Haudebourt-Lescot dont quelques toiles sont conservées au Louvre.

                                 Autoportrait (Hortense Haudebourt-Lescot)

Le 7

Le 7

     Avec le 7 nous sommes en pays de connaissance car le peintre Paul Delaroche  (1797-1836) qui y vécut n'était autre que le gendre d'Horace Vernet qui vivait au 5!

Les enfants d'Edouard (Delaroche)

Les enfants d'Edouard (Delaroche)

     Il est peintre lui aussi et comme son beau-père connaît un grand succès en un temps où l'on aime les scènes historiques et les anecdotes célèbres. Son tableau "Les enfants d'Edouard" connut un vif succès.  La scène des enfants emprisonnés dans la tour de Londres et bientôt assassinés ne manque pas d'émouvoir un public sensible au thème comme au style "troubadour".

 

Il consacra quatre années à peindre la fresque de l'amphithéâtre des Beaux-Arts.

     L'architecte du 7 est Auguste Constantin qui réalisa comme nous l'avons vu le plus bel immeuble de la rue, celui de Mademoiselle Duchesnois.

Du 8 au 12

Du 8 au 12

     Un coup d'œil sur le belle façade un peu écrasante de cet immeuble post haussmannien (1910) qui après divers avatars a été transformé en logements sociaux. J'aurais aimé pendant mes années de galère trouver une HLM dans un tel immeuble!

Le 9

Le 9

    Le 9 fut l'hôtel de Talma (1763-1826) le comédien le plus populaire de son temps et apprécié de Napoléon. Il faut avouer que l'acteur préféra sa soeur la Princesse Pauline Bonaparte avec qui il eut une liaison.

 

    Il révolutionna la manière de dire les vers tragiques de façon plus naturelle. Sa déclamation tranchait avec celle de ses rivaux. Quand il jouait Le Cid à la Comédie Française, tout Paris pour Rodrigue avait les yeux de Chimène!

 

     Il fit construire en 1820 son hôtel de la rue de la Tour des Dames et il demanda à Delacroix d'en assurer la décoration. Le jeune Delacroix était un grand admirateur du tragédien qu'il rencontra peut-être grâce à Vernet. Il peignit pour la salle à manger de l'hôtel quatre panneaux représentant les saisons. Malheureusement ces œuvres ont été dispersées.

 

  

 

     L'architecte à qui Talma confia les travaux est Paul Lelong (1799-1846). On lui doit le Bazar de l'Industrie boulevard Poissonnière ainsi que les bâtiments de la rue de la Banque dont il supervisa le percement.

Le 11

Le 11

     Le 11 fut habité par Charcot. Là encore je me pose des questions sans trouver de réponses. Il est bien fait mention sur différents sites de cette adresse où aurait vécu le "médecin" Charcot, sans plus de précision. J'ai suivi à la trace Jean-Martin Charcot, fondateur de la neurologie moderne, admiré de Freud… De sa naissance au Faubourg Poissonnière, en passant par la Cité Trévise, la rue du Coq, la rue Laffitte et le faubourg Saint-Germain, je n'ai rien trouvé qui puisse accréditer cette thèse.

Jean-Martin Charcot (neurologue) Jean-Baptiste Charcot (médecin explorateur)Jean-Martin Charcot (neurologue) Jean-Baptiste Charcot (médecin explorateur)

Jean-Martin Charcot (neurologue) Jean-Baptiste Charcot (médecin explorateur)

     J'ai pensé à Jean Charcot (Jean-Baptiste) fils du précédent, médecin lui aussi et célèbre explorateur dont le Pourquoi-pas? fit naufrage en 1936. Rien de probant!

Je me réfère donc à Wikipédia ou à "Paris-Révolutionnaire" pour mentionner cette résidence temporaire de Charcot! Le neurologue ou le commandant, ou aucun des deux. Au fond ça n'a pas d'importance, pas de quoi faire une crise d'hystérie!

Le 13

Le 13

     Le 13 passerait inaperçu s'il n'avait hébergé entre ses murs une de nos gloires nationales Jean-Philippe Smet futur Johnny Hallyday!

    Enfant, il vécut chez sa tante paternelle Hélène Mar, ancienne star du muet, dans un deux pièces partagé avec ses deux cousines.

On imagine quelle pouvait être la vie dans un petit appartement sans confort. Il fallait alors pour prendre une douche se rendre à l'établissement de la rue des Martyrs.

 

    On sait que dans ce quartier proche de l'église, il fit partie de la bande de la Trinité avec Dutronc et Eddy Mitchel.

Rue de la Tour des Dames.

    Du 14 au 18 l'ancienne sous-station d'EDF construite en 1929 a été reconvertie, en gardant par bonheur la façade, en centre sportif et d'animation culturelle. 

Rue de la Tour des Dames.

     Il y eut à cet emplacement des bureaux de la Poste aux chevaux de Paris dont la façade était 2 rue Pigalle. C'est là que les derniers maîtres de poste, les Dailly  transférèrent leur établissement. Ils se firent construire un hôtel particulier aux 67-71 rue Pigalle, détruit pendant les années pompidoliennes qui ne furent pas à un vandalisme près (Médrano, Halles de Baltard, Palais de marbre rose…)

     Il ne reste dans la cour du méchant immeuble qui l'a remplacé que l'ancien abreuvoir épargné par les démolisseurs.

Rue de la Tour des Dames.

    Les chevaux ne passent plus dans la rue… les admirateurs n'envoient plus de fleurs à leur "idole", Talma, Mlle Mars ou Mlle Duchesnois… les peintres n'y rêvent plus de batailles… 

La rue s'est endormie et n'émeut plus que les amoureux de Paris...

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M
Une mine de renseignements passionnants.
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A
WOUAOU! Quelle rue! Si courte et si peuplée de gloires. Le début est impressionnant avec ces voix illustres du théâtre. On aimerait les entendre, comprendre pourquoi elles passionnaient à ce point! Mais nous n'avons que la voix de Johnny, ce qui n'est pas si mal....<br /> Belle invitation à la promenade dans Paris en été!
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C
Merci mais il est vrfai que Paris est un opéra!

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