La rue Ramey comme de nombreuses rues de Montmartre (Pigalle, Cortot, Girardon, Foyatier, Carpeaux etc... ) porte le nom d'un sculpteur.
Soyons plus précis, de deux sculpteurs, père et fils : Claude et Jules.
Claude, le père (1754-1838) Grand prix de Rome, a sculpté à Paris le bas relief de la Colonne Vendôme et le fronton nord de la Cour Carrée du Louvre où Napoléon 1er symbolise le Génie de la France!
Jules, le fils, (1796-1852) a été à l'instar de son père Prix de Rome et a décoré des monuments urbains (la porte d'Aix à Marseille avec David d'Angers). Certaines de ses œuvres ornent les jardins parisiens comme "Thésée et le minotaure" aux Tuileries.
La rue Ramey faisait partie de l'ancienne Chaussée de Clignancourt. La section de la rue, entre Marcadet et Hermel a été ouverte en 1858 par la commune de Montmartre qui voulait prolonger la Chaussée vers la nouvelle église N.D. de Clignancourt.
En 1863, après le rattachement de Montmartre à Paris, une autre section est tracée entre les rues Muller et Marcadet .
La rue est longue de 557m et large de 14.
La rue Ramey commence en beauté avec un bistro convivial fréquenté par la jeunesse, "Le clair de lune", hommage à Pierrot qui est aussi un personnage montmartrois créé par Willette.
Il y avait à son emplacement au début du XXème siècle une grande boucherie.
Le clair de lune me paraît plus sympathique que les cadavres d'animaux pendus aux crochets!
En face au n°2 une boutique qui récemment encore proposait des meubles asiatiques est tombée en déréliction.
Il est loin le temps où propriétaires, employés et passants posaient sur son trottoir
Au 6 a vécu pendant ses années parisiennes le peintre et caricaturiste Edouard Pépin (1842-1927, de son vrai nom Claude Guillaumin)
Anti clérical, anti monarchiste, anti boulangiste, anti socialiste, anti dreyfusard avant de devenir dreyfusard, il participa à la revue de Jules Vallès "La Rue" et au "Grelot".
S'il aimait peindre la nature, il lui arrivait de représenter Montmartre. Le musée Carnavalet possède deux toiles de lui : La place de l'Abreuvoir et La rue des Rosiers.
La rue des Rosiers (ancien nom de la rue du Chevalier de la Barre) donnait alors sur la Tour Malakoff où quelques années plus tard serait édifié le Sacré Coeur
Il reste ici et là des vestiges "archéologiques" des anciens commerces, comme au 5, cette marquise qui regrette le temps de sa jeunesse!
Des photos et des cartes postales représentent une assemblée de joueurs de trompe de chasse sous le nom de "Débuché" au 5 rue Ramey.
Débusquer ou "débucher" une bête qui ne demande rien à personne, consiste à la faire sortir du bois afin de la massacrer joyeusement à découvert.
Par extension le mot "Débuché" a qualifié un groupe de sonneurs de trompe de chasse dont la lourde musique terrifie les animaux traqués
.
Le Débuché de Paris qui rassemblait six champions souffleurs a été créé en 1927.
Leur musique poussive plaît encore de nos jours aux nostalgiques des traditions cruelles.
Certains immeubles sont classés. C'est le cas des 7 et 9. Ce sont des immeubles de rapport qui abritaient des familles modestes venues trouver à Montmartre des loyers plus abordables qu'à Paris.
On n'imagine pas qu'au 8, derrière la façade, il y eut une salle de spectacle, la salle Maurer. Elle faisait partie de ce qu'on a appelé à la fin du XIXème siècle, le Théâtre Social. Elle représentait des pièces engagées susceptibles de toucher un public ouvrier.
Jaurès a parlé de ce mouvement dans une conférence de presse restée célèbre. Dans sa conclusion, il appelait de ses vœux le développement de ce théâtre porteur "d'une œuvre vivante, multiple, immense, qui se confonde avec l'humanité affranchie".
Le 10 est connu des amateurs de musique électronique car il abrite le siège de Ed Banger Records, label français fondé en 2003 par l'ancien manager de Daft Punk, Pedro Winter. C'est en 2007 que le label commença à être connu avec le succès du groupe Justice.
La rue du Chevalier de la Barre commence entre les 9 et 11 de la rue Ramey. C'est une des plus pittoresques rues de Montmartre, surtout dans sa partie basse. Sinueuse et abrupte, elle évoque les vieux sentiers qui montaient à l'assaut de l'Himalaya montmartrois!
Les 11, 13 et 15 sont classés comme représentatifs des vieux immeubles populaires du XIXème siècle.
Entre les 17 et 19, s'ouvre le passage Cottin...
Il est lui aussi très pittoresque avec son escalier abrupt vers le Sacré Cœur qui évoque l'échelle de Jacob! Il a été maintes fois peint et photographié.
Au 21 actuel il y avait un commerce immortalisé par une photo où l'on voit un petit chat sur les épaules d'un homme.
Il a été remplacé par un restaurant-traiteur asiatique... où on ne cuisine pas les chats!
Entre les 21 et 23 commence la rue Nicolet où a vécu Verlaine chez ses beaux parents et où est né son fils Georges. La belle histoire conjugale prit fin avec le débarquement de Rimbaud à Paris....
Mais ce n'est pas notre sujet d'aujourd'hui!
Allons boire une absinthe avant de reprendre notre chemin dans la rue Ramey!
(à suivre!)