La rue Foyatier est une des plus photographiées de Montmartre ...
Elle escalade la Butte avec ses 220 marches qui par chance se répartissent en une dizaine de volées avec à chaque étape un palier de décompression qui permet de retrouver son souffle!
Elle a été baptisée en 1867 et comme de nombreuses rues du quartier (Pigalle, Cortot, Pilon, Goujon etc...) porte le nom d'un sculpteur.
Denis Foyatier (1793-1863,) artiste académique, reçut des commandes aussi bien de l'Eglise que de l'Etat!
Le régime de Vichy, on ne sait pourquoi, ne l'apprécia guère et envoya à la fonderie une bonne partie de ses oeuvres...
Il en reste ici ou là quelques unes...
Au Louvre par exemple où s'exhibe, athlète impassible au sexe miniature, son Spartacus brisant ses chaînes qui à l'origine se dressait dans le jardin des Tuileries...
A Orléans, sur la place du Martroi, sa Jeanne d'Arc caracole sur son cheval de bronze...
Place Suzanne Valadon
La rue prend naissance sur la petite place Suzanne Valadon qui faisait partie de la rue Foyatier avant de recevoir en 1961 le nom de la mère d'Utrillo.
La première curiosité que nous rencontrons est l'école élémentaire dont la porte d'entrée se situe "officiellement" au "1" rue Foyatier alors que la rue commence aujourd'hui trois mètres plus haut.
Suzanne Valadon. Catherine nue allongée. 1923
On voit ici les deux plaques (Valadon et Foyatier) et la porte d'entrée de l'école au 1.
En réalité, aucun Parisien n'a pour adresse la rue Foyatier qui, à l'est longe le funiculaire et à l'ouest est bordée par l'arrière des gros immeubles 1920 des rues voisines!
Revenons à l'école!
Elle a reçu dans ses murs Jean Jaurès qui à l'automne 1908 y prononça à l'occasion d'un meeting socialiste, un discours sur les menaces de la guerre.
Elle eut pour élève le jeune Samuel Tyszelman
Appelé "Titi" par ses camarades, il milita dans les jeunesses communistes et prenant une part active à la Résistance, fut arrêté par les Nazis et fusillé le 19 août 1941 dans le bois de Verrières. Il avait 20 ans.
Jean-Roger Debrais, jeune photograveur engagé dans la lutte armée contre l'occupant et ses complices a été, lui aussi, élève dans cette école.. Il est mort sous les balles, 35 rue d'Anjou.
Côté pair, la station du funiculaire.
A certaines heures une foule de touristes la prend d'assaut pour éviter l'ascension de la rue Foyatier.
Sur la place on trouve le plus souvent une double queue de touristes, devant le funiculaire et devant la sanisette.
La queue de la sanisette n'en finit pas de s'allonger car en ce lieu hyper touristique, elle est la seule à accueillir les vessies trop pleines de deux millions de passagers qui chaque année grimpent dans le funiculaire!
Le funiculaire inauguré en 1900 avait à l'origine pour vocation de faciliter l'accès des pèlerins à la basilique.
Ceux qui auront le courage de gravir les marches auront l'occasion de passer au pied des grands immeubles cossus construits dans les premières décennies du XXème siècle, quand les promoteurs investissaient la Butte.
L'escalier de la rue Barsaq vient se jeter dans celui de la rue Foyatier comme une rivière dans un fleuve!
L'immeuble d'angle s'arrondit à la proue...
Sur les murs s'improvise une galerie d'art éphémère...
Avant d'atteindre les sommets, la rue Foyatier reçoit une deuxième rue, la rue Gabrielle qui pourrait nous faire penser que la belle dame aimée du roi Henri serait passée par là.
Hélas! Il n'en est rien! Cette Gabrielle était la fille aînée du gros propriétaire des terrains sur lesquels la rue a été lotie!
Nous voici maintenant au seul endroit de la rue qui ouvre sur les escaliers.
Le bâtiment connut plusieurs métamorphoses.
Il abrite aujourd'hui le Corcoran's Sacré Cœur. Le célèbre pub irlandais de la place de Clichy a fait des petits et a ouvert sa 7ème enseigne parisienne au cœur de Montmartre.
Les whiskies et les bières ont remplacé le vin et l'eau bénite!
En effet le bâtiment rescapé de l'expo universelle de 1900 a longtemps accueilli les pèlerins. Il s'appelait alors "Au repos de Béthanie".
Quand les pèlerins se firent plus rares, il se métamorphosa en Café-Restaurant de Montmartre Belle-Vue.
...Et puis après la faillite, il abrita à partir de 1929 l'atelier d'un célèbre graveur, éditeur, imprimeur : Roger Lacourière.
Robert Lapoujade et Roger Lacourière dans l'atelier.
Roger Lacourière (1892-1966) a marqué l'art de la gravure en inventant de nouveaux procédés qui intéressèrent quelques uns des plus grands artistes de son temps comme Matisse, Braque, Chagall..
Ils fréquentèrent son atelier de la rue Foyatier et certains comme Picasso qui fut initié par lui à l'aquatinte au sucre devint son ami.
En 1957 Frélaut succéda à Lacourière jusqu'en 2008, date de la fermeture définitive de l'atelier connu aujourd'hui de tous les collectionneurs.
La partie haute du bâtiment est une boutique de souvenirs made in China au rez de chaussée et une salle pour fêtes et banquets avec vue panoramique sur Paris au premier!
Mais elle ne nous concerne pas puisque son adresse n'est pas rue Foyatier mais rue Saint Eleuthère!
Pour redescendre plus vite sans attendre le funiculaire, pourquoi ne pas choisir comme l'ancien maire de la Commune libre de Montmartre, Pierre Labric, le vélocipède?
Pierre Labric. Octobre 1922.
... et retrouver sur la place Valadon, le magicien et ses créatures irisées qui émerveillent les enfants!
Liens :
Les rues et les places de Montmartre (classées alphabétiquement)