Dans l'église Notre Dame de la Mer qui domine le port et les chalutiers de La Cotinière, une chapelle est consacrée aux gens de mer.
Les couleurs égaient l'église sombre un peu écrasée par une charpente, remarquable certes, mais lourde.
Les vitraux sont dus au maître verrier Jean Lesquibe (1910-1995) qui a créé des murs de lumière dans plus de 75 églises, chapelles ou oratoires en France et à l'étranger.
Un premier vitrail rappelle la prière bretonne : "Protège-moi mon Seigneur. Ma barque est si petite et ta mer est si grande"
Le deuxième commémore en 1966 le centenaire de la création d'une station de sauvetage (une des premières de France) à La Cotinière.
… ll rend hommage aux Péris en mer et à ceux qui tentent au péril de leur vie de les sauver.
Sur les murs des croix sont alignées. C'est la seule église de l'île où le nom des morts sont inscrits sur des croix et non sur des plaques de cuivre.
Il y aurait là l'influence des marins bretons venus à La Cotinière au XIXème siècle pour apprendre aux pêcheurs oléronnais l'art de piéger les sardines. Dans les îles de Sein et d'Ouessant ces croix qui sont courantes portent le nom de proellas.
Deux maquettes de bateaux naviguent immobiles au-dessus des croix. La première maquette est celle de la Muiron.
Elle a été offerte par un marin pêcheur de La Cotinière, Etienne Tétaud. Il a voulu par cette offrande, remercier le Ciel de l'avoir protégé pendant les tempêtes et les épreuves.
La Muiron est une frégate capturée par Bonaparte pendant la Campagne d'Egypte. Une maquette en a été faite sur demande de l'Empereur pour commémorer l'acte héroïque du colonel Muiron qui lui avait sauvé la vie. Sur le pont d'Arcole il s'était jeté devant lui pour le protéger et recevoir en pleine poitrine la balle qui lui était destinée.
La maquette est exposée au musée de la Marine et c'est elle que copia le marin pêcheur de La Cotinière...
La 2ème maquette est celle du Père Emile. Son origine est mystérieuse, son donateur n'a pas voulu qu'on le connaisse quand il a offert l'ex voto au curé de la paroisse qui s'appelait Emile.
Une croix plus grande porte le nom des dix victimes du naufrage de l'Essor lors de la Fête de la Mer, le 11 août 1996.
Comme chaque année, en mémoire des péris en mer et des disparus, une grande fête avait lieu à La Cotinière. Le port et les bateaux étaient pavoisés, l'ambiance était au sourire… Le patron de l'Essor avait embarqué sa famille et des passagers sans doute trop nombreux (son navire n'avait droit selon le certificat de l'Inspection maritime qu'à une vingtaine de personnes.)
Quand le curé jeta la gerbe de fleurs à la mer après l'avoir bénie, tout le monde se précipita du même côté, une vague prit le bateau par l'arrière et précipita le naufrage.
Loïc Riou patron du bateau perdit 7 membres de sa famille.
En quittant l'église j'ai rencontré sur le port celle que j'appelle "la mère des goélands".
Malgré les interdictions et les remontrances, elle est chaque jour sur le quai où elle nourrit les goélands voraces qui l'entourent...
J'ai pensé, alors que je venais de lire les noms des péris et des disparus en mer dans l'église, à la chanson écrite par Lucien Boyer pour Damia :
"Ne tuez pas le goéland
Qui vole sur le flot hurlant
Ou qui l'effleure
Car c'est l'âme d'un matelot
Qui plane au-dessus d'un tombeau
Et pleure... pleure "