La rue de la Vieuville commence Place des Abbesses et s'achève rue des Trois Frères. C'est une petite rue (173 mètres) de Montmartre qui profite pleinement de la vogue du quartier....
A l'origine, elle s'appelait rue de la Mairie et s'achevait devant la vieille mairie où Verlaine se maria, où Clémenceau siégea, nommé par Arago en 1870 et où Jean-Baptiste Clément fut nommé maire pendant la Commune, au beau temps des cerises...
La mairie construite en 1836 par l'architecte Lequeux s'avéra trop exiguë après le rattachement de Montmartre à un des arrondissements les plus étendus et les plus peuplés de Paris. Le préfet Poubelle fit acquérir des terrains devant l'église N. D. de Clignancourt pour y édifier la nouvelle mairie.
Le vieux bâtiment fut détruit. A son emplacement s'ouvre aujourdhui un jardin.
1 rue de La Vieuville. Le square.
C'est le square Jehan Rictus, au 1 rue de la Vieuville.
Peut-être en hommage aux jours de révolte et d'espoir de la Commune, un mur s'y élève, non pas un mur qui sépare mais un mur qui unit... Le mur des "je t'aime".
La phrase de la vie y est inscrite dans toutes les langues tandis que des éclats rouges, fragments de coeur, attendent d'être réunis pour ne faire qu'un seul coeur et pour que revienne le temps des cerises...
Le 3
et le 5
Une ancienne maison villageoise est la première de la rue côté impair (3 et 5).
Début de la rue de La Vieuville, Place des Abbesses (côté pair)
Face à elle, côté pair s'élève un immeuble de rapport du XIXème dont le rez de chaussée abritait un atelier connu des peintres de la Butte.
C'était l'atelier d'Anzoni, un encadreur qui tint entre ses mains des toiles de Lautrec, Degas, Signac, Valadon, Utrillo... qui appréciaient de trouver chez lui un crédit bien utile...
C'est dans son atelier que la première toile du jeune Utrillo fut exposée... Aujourd'hui vous n'aurez pas la chance d'en trouver ni de tomber sur un talent pictural en herbe...
Vous vous contenterez de souvenirs made in China !
C'est en 1867 que la rue de la Mairie fut baptisée la Vieuville du nom de Mathurin Jules Anne Micault de la Vieuville (1755-1829) qui fonda à Montmartre, rue des Martyrs l'Asile de la Providence pour héberger des vieillards et des infirmes. L'asile ne pouvait accueillir qu'une soixantaine de résidents alors que la demande était considérable.
La rue vers la Place des Abbesses
Micault de la Vieuville créa alors la Société de la Providence pour venir en aide aux plus démunis. Il devint par ailleurs sous-lieutenant des gardes du Corps du Comte d'Artois après le retour des Bourbons (1814). Mais c'est par son oeuvre caritative qu'il se fit connaître et apprécier des Montmartrois.
La Maison de la Providence existe toujours, 77 rue des Martyrs, avec pour voisins Madame Arthur et Michou. C'est un bon voisinage puisque Michou est un des Montmartrois les plus généreux et qu'il invite régulièrement dans son établissement pour les fêter et les gâter des personnes âgées du quartier...
La rue de la Vieuville vers la rue des Trois Frères
Quelques immeubles de la rue sont répertoriés dans le plan de protection patrimoniale du XVIIIème arrondissement ...
Le 8, petit immeuble de rapport ... selon la formule consacrée !
Le 9, maison construite en 1886 par Léon Guélorget en 1886.
Guélorget est un architecte qui a beaucoup travaillé dans la Seine Saint-Denis et notamment à Pantin. Il est le premier architecte des Grands Moulins de Pantin.
Le 11 est le plus bel immeuble de la rue, remarquable par l'originalité de ses frontons. Il date de 1840 et profite d'une belle situation plein sud face à la rue des Martyrs.
Le 13, petit immeuble de rapport qui date de la création de la rue et qui ressemble à tant d'autres sur la Butte...
Le 14, plus bourgeois, construit en 1840, à l'angle avec la rue des Martyrs.
Le 15 qui date de la même année, abrita le siège du journal anarchiste le père Peinard.
Le titre est ironique pour un hebdomadaire révolutionnaire créé en 1889 par Emile Pouget, partisan de l'action directe et de la grève générale.
Le 19, immeuble de rapport à pan coupé fait face à une impasse qui a gardé l'ancien nom de la rue...
C'est la Cité de la Mairie... qui n'est pas une cité mais un cul de sac de petits immeubles montmartrois (comme le prétendent les agences immobilières).
Cité de la Mairie
Grille du 22
Voilà une façade bien gaie et un titre bien prometteur pour un mini restaurant bio-végétarien sage et terne.
La rue s'achève ici, rue des Trois Frères, entre un immeuble à pan coupé et le restaurant La Grolle, savoyardo-touristique, pas vraiment plébiscité par les habitants du quartier.
Fin de la rue vers les Trois Frères
Rue drevet vue de la Vieuville. Emile Laurent (1928)
Dans le prolongement de la Vieuville la rue Drevet s'envole vers les hauteurs...
Emile Pouget
En relisant des articles du père Peinard, j'ai été frappé par le style percutant, direct et inventif d'Emile Pouget.
Un Céline avant la lettre.... Avec la même haine, la même démesure anticapitaliste mais pas la même folie antisémite!
S'il est vrai qu'au début de l'affaire Dreyfus, Pouget parle de "youtre alsacien", il évolue assez vite. Il écrit : "en se laissant embarquer dans l'antisémitisme, le populo serait la dupe des petits-bourgeois et des noblaillons". Il cesse de publier son Père Peinard pour participer au quotidien dreyfusard et anticapitaliste Le Journal du Peuple...
Quelques citations de Pouget :
La Politique c'est tout l'opposé du Socialisme : c'est l'art d'embistouiller le populo, de lui faire avaler des couleuvres, de le mener par le bout du nez, de l'abrutir, de le mater s'il se rebiffe... Tout ça s'exprime d'un seul mot : gouverner !
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Voilà le sabotage chouettement défini : à mauvaise paye, mauvais travail.
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Ceux qui aiment la discussion se foutent de raisonner comme un pot de chambre sous le cul d'un malade.
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Les moeurs contre toute nature sont le produit inévitable de l'amoncellement des types d'un même sexe : dans les prisons, il se passe de sacrées malpropretés et c'est kif-kif aux biribis africains. La frocaille ne peut échapper à la fatalité! Bien au contraire, le voeu de chasteté que les ensoutanés prononcent les prédisposent à toutes les cochonneries : ce voeu les tourneboule, la luxure les brûle et ils se vautrent vite dans toutes le salauderies!
(...) Il n'y aurait qu'un moyen de foutre les enfroqués à l'abri du vice malpropre : ce serait de les chaponner!
Puisque ces porcs jurent de rester chastes, il n'y a pas de mal à ce qu'on les fiche dans l'impossibilité de succomber à la tentation; une fois châtrés on pourrait les laisser courir en liberté, sans crainte qu'ils violent leur parole et les gosses.
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Lien : Articles du blog sur les rues de Montmartre. classement alphabétique : Rues de Montmartre. Classement alphabétique.
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