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Montmartre secret

Montmartre secret

Pour les Amoureux de Montmartre sans oublier les voyages lointains, l'île d'Oléron, les chats de tous les jours. Pour les amis inconnus et les poètes.

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Publié le par chriswac
Publié dans : #MONTMARTRE. Rues et places., #MONTMARTRE Peintres.Artistes.Clébrités
Impasse du Cadran

Impasse du Cadran

Seule carte postale (à ma connaissance) de l'impasse du Cadran.

Seule carte postale (à ma connaissance) de l'impasse du Cadran.

A peine visible depuis le boulevard de Rochechouart, l'impasse du Cadran est si modeste que bien des Montmartrois ne connaissent pas son existence!

Impasse du Cadran. Montmartre. Folies Robert. Olivier Métra. Cinéma Palais Rochechouart.

Longue de 42 mètres et large de 7, elle doit son nom au cadran solaire qui au début du XIXème siècle avait été peint sur le mur qui la fermait et la séparait de la rue d'Orsel qui s'appelait alors rue des Acacias.

Le nom choisi remplaçait le nom originel : Impasse Danger. Non pas qu'il y eût des risques à s'y aventurer mais parce qu'un des propriétaires portait ce nom!

Est-ce cet nom qui a inspiré l'autrice de roman policier Claude Izner pour son "Minuit Impasse du Cadran"?

 

Impasse du Cadran. Montmartre. Folies Robert. Olivier Métra. Cinéma Palais Rochechouart.

Avant le rattachement de Montmartre à Paris, l'impasse était composée de modestes maisons et de remises.

Plusieurs clubs révolutionnaires comme il y en eut tant dans la première moitié du XIXème siècle y tinrent leurs réunions.

Impasse du Cadran. Montmartre. Folies Robert. Olivier Métra. Cinéma Palais Rochechouart.

Le Club de la Vengeance la choisit pour élaborer son programme révolutionnaire sous le Second Empire

La Garde Nationale en 1871 y réunit son Comité Central qui prit la décision d'enlever les canons de la place Wagram et de Neuilly pour les concentrer sur la Butte

Impasse du Cadran. Montmartre. Folies Robert. Olivier Métra. Cinéma Palais Rochechouart.

La même année, au mois de mai, y fut organisé le recrutement d'un corps de Francs Tireurs : Les Lascars de Montmartre.

Un roman d'Yves Carcenac raconte la vie de l'un d'entre eux, plus flamboyant que les autres : Ferdinand Janssoulé.

Impasse du Cadran. Montmartre. Folies Robert. Olivier Métra. Cinéma Palais Rochechouart.

Comment imaginer aujourd'hui devant cette impasse banale et sans intérêt qu'elle connut un tel bouillonnement d'idées, une telle activité révolutionnaire, une telle fabrique de rêves?

Impasse du Cadran. Montmartre. Folies Robert. Olivier Métra. Cinéma Palais Rochechouart.

Le lieu fait partie de l'histoire montmartroise pour une autre raison : il y eut à cet endroit un bal fameux : le bal des Folies Robert.

Impasse du Cadran. Montmartre. Folies Robert. Olivier Métra. Cinéma Palais Rochechouart.

C'était "une immense baraque de plâtre et de bois" dont le décor intérieur était un pastiche de palais mauresque. Il était dirigé par Gilles Robert qui y donnait des démonstrations de danses nouvelles.

Impasse du Cadran. Montmartre. Folies Robert. Olivier Métra. Cinéma Palais Rochechouart.

Quelques danseuses y éveillèrent bien des désirs : Elisa Belles Jambes, Bertha le Zouzou, Chicardinette...

Journalistes et écrivains appréciaient leurs talents divers et variés! Ils venaient s'encanailler dans ce bal mal famé qui ne prenait des airs décents que le dimanche quand la clientèle était composée de familles qui, sous le second Empire, passaient la barrière (avant 1860) comme on passe une frontière, pour s'aventurer à Montmartre!

Impasse du Cadran. Montmartre. Folies Robert. Olivier Métra. Cinéma Palais Rochechouart.

 

L'orchestre était dirigé par un jeune homme de 19 ans, Olivier Emart.

Plus tard, pendant la Commune, il sera Garde National au fameux 67ème bataillon de la rue des Rosiers (rue Chevalier de la Barre actuelle).

Impasse du Cadran. Montmartre. Folies Robert. Olivier Métra. Cinéma Palais Rochechouart.

Le nom d'Olivier Emart ne dit rien à personne mais son anagramme, Olivier Métra est beaucoup plus célèbre!

Impasse du Cadran. Montmartre. Folies Robert. Olivier Métra. Cinéma Palais Rochechouart.

C'est celui que choisit le musicien lorsqu'il dirigea l'orchestre du bal Mabille.

Il fut l'auteur d'œuvres très populaires, valses, quadrilles, polkas....

Impasse du Cadran. Montmartre. Folies Robert. Olivier Métra. Cinéma Palais Rochechouart.

Il composa des ballets pour les Folies Bergères et pour l'Opéra...

Impasse du Cadran. Montmartre. Folies Robert. Olivier Métra. Cinéma Palais Rochechouart.

Le bal des Folies Robert, après avoir été dirigé par son créateur, le fut par Gilles Jacquet.

Mais d'autres bals, trop nombreux, lui faisaient concurrence et il ferma ses portes en 1870.

Impasse du Cadran. Montmartre. Folies Robert. Olivier Métra. Cinéma Palais Rochechouart.

Le bâtiment, transformé un temps en usine pour ballons dirigeables, périclita peu à peu et c'est en 1912 qu'il connut une nouvelle carrière.

Une salle de cinéma fut édifiée à son emplacement : le Palais Rochechouart-Aubert.

 

Impasse du Cadran. Montmartre. Folies Robert. Olivier Métra. Cinéma Palais Rochechouart.

La salle était immense et accueillait plus de 1600 spectateurs...

Impasse du Cadran. Montmartre. Folies Robert. Olivier Métra. Cinéma Palais Rochechouart.

Elle faisait partie de la chaîne des cinémas Aubert.

Elle était de style art nouveau et fut hélas détruite pour adopter une architecture dépouillée et fonctionnelle en 1931.

Impasse du Cadran. Montmartre. Folies Robert. Olivier Métra. Cinéma Palais Rochechouart.

Elle fut rachetée par Gaumont et après des années de succès, subit la concurrence de la télévision, se dégrada, devint un lieu de drague.

Sa programmation faisait la part belle aux films de Kung Fu que peu de spectateurs regardaient!

Bruce Lee ne put en empêcher la fermeture en 1969, année pourtant érotique si l'on en croit Serge Gainsbourg.

 

Impasse du Cadran. Montmartre. Folies Robert. Olivier Métra. Cinéma Palais Rochechouart.

Elle céda la place à un ensemble commercial assez foutraque avant d'être détruite et remplacée par un magasin Darty (aujourd'hui Boulanger).

Impasse du Cadran. Montmartre. Folies Robert. Olivier Métra. Cinéma Palais Rochechouart.
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Côté impair de l'impasse, un immeuble de belle architecture, abrite au Rez de chaussée un magasin de "mode"  barbésienne : "La Rose d'Orient".

Il y avait au 8 un immeuble qui fut détruit au profit du magasin qui de ce fait réduisit l'impasse de plusieurs mètres.

Nous avons gardé quelques traces de l'existence de ce 8 disparu où l'entreprise Vigron se spécialisait dans le "brossage, grattage, silicatisation, badigeon à la chaux....

 

Impasse du Cadran. Montmartre. Folies Robert. Olivier Métra. Cinéma Palais Rochechouart.

Au fond de l'impasse s'élève sur plusieurs niveaux un magasin spécialisé dans le "bizness" du mariage....

 

Faut-il en conclure que le Mariage est aujourd'hui dans l'impasse car le grand magasin est aujourd'hui fermé et se dégrade.

Impasse du Cadran. Montmartre. Folies Robert. Olivier Métra. Cinéma Palais Rochechouart.
Impasse du Cadran. Montmartre. Folies Robert. Olivier Métra. Cinéma Palais Rochechouart.

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Publié le par chriswac
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Exposition Auguste Herbin au musée de Montmartre. De l'impressionnisme à l'abstraction.

     Depuis le 15 mars, le musée de Montmartre propose une nouvelle exposition. J'avoue que je ne connaissais rien d'Auguste Herbin (1882-1960), un peintre qui eut pourtant un vrai rayonnement et fut apprécié par certains de ses contemporains et dénigré par d'autres.

 

Nature morte aux grenades (1904)

Nature morte aux grenades (1904)

                                                             Autoportrait 1903

       Homme du nord, il est fasciné par les couleurs. Pas étonnant qu'il soit lié comme Matisse à la ville du Cateau-Cambrésis où il s'initie au dessin et à la peinture. 

Il fréquente ensuite l'école des beaux Arts de Lille où il est attiré par l'Impressionnisme et le pointillisme.

                                             Toits de Paris sous la neige (1901)

    Il arrive à Paris en 1901. Il est influencé par Cézanne et Van Gogh. C'est sous leur influence qu'il ose les couleurs franches de l'un et la composition plus géométrique de l'autre.

                                                          Les trois vases

                                                      Portrait de jeune fille 1907

                                                            Autoportrait 1906

      Il est alors considéré par la critique  comme un Fauve. "La marque du Fauve est partout" écrit à propos de son œuvre un critique américain.

C'est le début pour Herbin d'une longue vie d'artiste faite de métamorphoses qui désorientent et, selon moi, expliquent en partie l'oubli dans lequel il est tombé

                          Après la période fauve, il se convertit au cubisme.

     Il expose avec Braque, Picasso, Metzinger, non pas en suiveur mais en artisan majeur de ce mouvement. S'il ne noue pas de véritable amitié avec ces peintres, il les côtoie cependant et c'est à Picasso qu'il succède dans l'atelier que le Catalan louait au Bateau-Lavoir. Il y restera dix-huit ans.

                                              Famille femme et enfant (1914)

     Il se distingue par sa palette colorée et contrastée.

     La majeure partie de l'exposition est consacrée, à juste titre, à cette période créatrice.  

                                                     Paysage à Hardicourt (1911)

 

Jardin devant une maison (1914)

Jardin devant une maison (1914)

Le tableau "Jardin devant une maison" est surprenant. Il est à la fois réaliste avec ses maisons en arrière plan et déjà abstrait avec cet arbre-jardin qui gravite sur lui-même comme une planète.

Après guerre, Herbin quitte ses années cubistes comme on se défait d'une mue pour s'intéresser à l'Art Monumental que défendent le Bauhaus en Allemagne ou le Constructivisme en Russie.

                                            Composition 1,2 et 3 (1919)

J'avoue que cette partie de son œuvre ne me touche pas beaucoup.  J'y vois un exercice intellectuel, une composition théorique dont la qualité principale cependant reste la franchise des couleurs.

Devant l'échec commercial de ses compositions et l'impasse où il s'est engagé, Herbin change du tout au tout.

                               Nature morte à la nappe  (1937)

 Il revient à la figuration, période qui correspond à son adhésion temporaire au Parti Communiste.

                                                            Joueurs de boules 2 (1923)

Nous pourrions croire devant l'aspect monumental un peu figé de ses personnages qu'il se rapproche de l'esthétisme du réalisme socialiste. En réalité, il n'en est rien car Herbin insuffle dans ses compositions une atmosphère étrange, quasi surréaliste.

 

 

Exposition Auguste Herbin au musée de Montmartre. De l'impressionnisme à l'abstraction.
Exposition Auguste Herbin au musée de Montmartre. De l'impressionnisme à l'abstraction.

Ses natures mortes semblent s'animer et devenir animales comme ces concombres, nœud de serpents!

                                                   Les concombres 1926

Un  critique parle de "réalisme magique" pour définir cette période qui à mon goût est, avec la période cubiste, la plus intéressante et la plus originale.

                                                       La fabrique 1925

     Mais Herbin ne se satisfait pas de son nouveau travail. Lui qui avait déjà été tenté par l'abstraction retrouve son attirance pour les lignes et les couleurs qui ne cherchent pas à dessiner une réalité.

                                                    L'homme oiseau 1926

                                 Et maintenant l'abstraction devient la règle.

                                                    Synchronie en jaune 1940

Nous ne trouverons plus de tentation figurative. Herbin devient et restera jusqu'à sa mort en 1960, un peintre abstrait.

    Fasciné par les formes et les couleurs capables de tout exprimer sans avoir besoin de figurer la réalité, comme le Rimbaud des Voyelles, il met au point un alphabet plastique. Chaque lettre correspond à une figure géométrique, chaque couleur est évocatrice de sentiment ou d'atmosphère.

 

Par exemple dans le tableau intitulé "Lune", nous allons trouver le triangle jaune du L, la forme hémisphérique bleue du U, le triangle blanc du N, la forme sphérique rouge du E :

                                                                      Lune 1945

Je reconnais que je reste un peu hermétique à cette "écriture" qui pour être comprise exige que nous soyons francophone! 

                                                             Parfum 2. 1954

   Herbin ne cessera dans les dernières années de sa vie de jouer avec son alphabet.

Plutôt que d'essayer de traduire ses formes et ses couleurs,  mieux vaut les recevoir telles qu'elles s'offrent à nous et nous touchent selon notre sensibilité. 

Herbin et sa femme

Herbin et sa femme

    L'exposition se termine avec les tableaux alphabétiques. Ils sont la dernière mutation, la dernière métamorphose d'un peintre toujours en recherche.

     Impressionniste, fauve, cubiste, Monumentaliste, réaliste, abstrait. C'est beaucoup pour un seul homme! 

                                                                  Dieu 1957

      Nous pouvons admirer cette disponibilité d'un explorateur de nouveaux chemins, comme nous pouvons nous demander pourquoi cet explorateur n'est jamais allé au bout de ces chemins. 

 Les uns admireront son "évolution" et son dernier travail qui ouvre sur l'art cinétique et l'art optique, les autres regretteront qu'il n'ait pas exploré plus longuement les territoires successifs qu'il découvrait.

                                                          Génération 1959

Mais tous les visiteurs auront l'occasion de rencontrer les différents avatars d'Auguste Herbin et d'accueillir ce qui reste une constante de son art : le goût des couleurs de plus en plus franches,  hymne à la vie et à sa diversité.

Liens : peintres artistes personnalités de Montmartre

 

                                  Route muletière et maison à Céret 1913

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Publié le par chriswac
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rue Feutrier

rue Feutrier

     Voilà des mois et des mois que fleurissent sur nos murs les parapluies qui font penser à une comédie musicale sans cesse renouvelée. J'ai voulu en recueillir quelques uns qui font chanter les rues de Montmartre avant qu'ils ne pâlissent et se décollent.

Street art. Les parapluies à Montmartre. Romano. Le Mouvement.

     Ils ne laissent personne indifférent qu'il pleuve ou que le soleil brille. Les touristes aiment se faire photographier devant eux et seuls les esprits chagrins et pluvieux les dénigrent.

Street art. Les parapluies à Montmartre. Romano. Le Mouvement.

     Ils sont l'œuvre d'un collectif d'artistes des rues ("street artists" comme on dit en français moderne) qui se sont réunis sous le nom qui nous promet bien des voyages : Le Mouvement.

Rue Norvins

Rue Norvins

    Nous trouvons dans ce collectif Romano, Riks et Tiez. Ils ont le désir de favoriser les rencontres et d'associer les passants à leur création. Ils photographient les gens, vous et moi, dans la rue et leur demandent l'autorisation d'utiliser ces photos dans des montages qui seront collés sur les murs.

Street art. Les parapluies à Montmartre. Romano. Le Mouvement.
Street art. Les parapluies à Montmartre. Romano. Le Mouvement.

     Il n'y aura plus qu'à les munir d'un parapluie et les faire chanter sous la pluie! Couples insolites et complices, souvent souriants et amoureux, ils se détachent de la foule sans visage, ils nous invitent à entrer dans le jeu, à danser avec eux sous la pluie.

Street art. Les parapluies à Montmartre. Romano. Le Mouvement.

    Romano, l'un des artistes s'est fait connaître par de nombreuses fresques et de nombreux collages. Parmi ses réalisations les plus marquantes il y a la fameuse fresque peinte sur les quais d'Auxerre : l'Arche de Noé. Plus d'actualité que jamais (bien que réalisée en 2018)

Street art. Les parapluies à Montmartre. Romano. Le Mouvement.Street art. Les parapluies à Montmartre. Romano. Le Mouvement.
Street art. Les parapluies à Montmartre. Romano. Le Mouvement.Street art. Les parapluies à Montmartre. Romano. Le Mouvement.
Street art. Les parapluies à Montmartre. Romano. Le Mouvement.Street art. Les parapluies à Montmartre. Romano. Le Mouvement.

     Elle représente en 7 panneaux des animaux solitaires sur des barques reliées par des cordes à un enfant qui peut-être pourra les sauver. Le singe nasique, l'ours polaire, l'antilope, le tigre blanc le léopard d'amour sont tous menacés d'extinction.

                                                                Romano

Rue Saint Rustique

Rue Saint Rustique

Rue Saint Eleuthère

Rue Saint Eleuthère

Riks a débuté avec des lettrages de couleur aux formes souples avant de s'initier au collage et au pochoir.

 

Street art. Les parapluies à Montmartre. Romano. Le Mouvement.
Rue Saint Eleuthère

Rue Saint Eleuthère

     Tiez est pour moi le plus mystérieux car j'ai cherché en vain des photos de ses réalisations. Peu importe puisqu'il fait partie de ceux qui font éclore les parapluies sur nos murs! J'ai d'ailleurs un problème avec les signatures de ces collages qui varient d'un mur à l'autre pour les mêmes figures.

Street art. Les parapluies à Montmartre. Romano. Le Mouvement.Street art. Les parapluies à Montmartre. Romano. Le Mouvement.Street art. Les parapluies à Montmartre. Romano. Le Mouvement.

 

Street art. Les parapluies à Montmartre. Romano. Le Mouvement.

     Depuis que j'ai commencé à rechercher ces fameux parapluies à Montmartre, il pleut sans fin sur la Butte!

                                      Rue Joseph de Maistre/Caulaincourt

Il suffira d'un peu de soleil pour que les parapluies se transforment en ombrelles. Ils en ont déjà la couleur et la légèreté!

Street art. Les parapluies à Montmartre. Romano. Le Mouvement.
Rue du Chevalier de La Barre

Rue du Chevalier de La Barre

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Publié le par chriswac
Publié dans : #MONTMARTRE Peintres.Artistes.Clébrités, #Peintres

  

             Jardin de Paris: Jane Avril, 1893. Lithographie 4 couleurs (124 x 91,5 cm)

 Jane Avril est à part dans le monde nocturne de Montmartre. Elle n'a pas la sensualité débridée de Nini patte en l'air ou de la Goulue. Elle séduit sans se prostituer; elle danse sans se déshabiller. Etrange et mystérieuse, elle traverse la nuit comme un navire traverse un détroit houleux.  

 

         Toulouse Lautrec ne s'y trompe pas... Il la reconnaît comme une soeur douloureuse. Pour elle, il délaisse la Goulue à la sensualité débordante. Il la regarde, il l'aime, il saisit sa solitude, son désarroi, sa dignité. Il la montre telle qu'elle est quand elle danse, avec cette énergie qui stupéfie, avec cette distinction qu'on retrouvera plus tard chez Marlène dietrich...

    Dans la rue, elle marche seule, avec son lourd passé de petite fille mal aimée, d'enfant battue par une mère alcoolique qui n'était préoccupée que d'elle et d'elle seule. Elle se sait fragile, à la merci d'une crise d'épilepsie. Elle a rendu visite à Charcot à la Salpétrière. Elle a espéré qu'il la guérirait de ses angoisses et de cette hystérie qui parfois la submerge et lui vaut des surnoms sans pitié : Jane la folle, Mélinite...

                                              Jane-Avril-008.JPG

      Entre artistes on se comprend. On voit ce que les autres ne voient pas. Cette tristesse, ce refuge du corps dans les étoffes fermées.

     Ce désir inexprimé d'un ailleurs. D'une vie avec un homme aimé, loin des paillettes et des bulles de champagne.

                               Jane-Avril-012.JPG

 

     Comment imaginer que ce visage-là déchaîne l'enthousiasme et la passion?

C'est qu'elle est double Jane Avril. Elle est la danseuse montmartroise, du Divan Japonais, des Folies Bergères... Elle est en même temps l'amie d'écrivains rares comme Huysmans ou Alphonse allais qui rêve de l'épouser...

       Sur l'affiche du Divan Japonais, elle est assise devant la scène où Yvette Guilbert croise ses gants noirs, mais c'est elle la vedette. Elle est la longue dame noire. Elle est l'élégante à l'éventail vers qui se penche Edouard Dujardin, ami de Mallarmé et passionné de Wagner ...

      Elle est l'ambassadrice d'un French-Cancan qui serait dansé par une reine. C'est elle qui à Londres ou à Madrid, en donnera l'image la plus vive et la plus poétique. Une danse violente de sexe et de passion, mais aussi une danse de l' immédiat, du moment réel contre l'éternité abstraite.

                                   Jane-Avril-018.JPG

Jusqu'à la mort du peintre, elle restera son amie. Il y eut entre eux une proximité plus forte que l'union des corps.

 

                       Le peintre l'a vue, l'a peinte comme un voyant sait peindre. Le mouvement, l'ondulation, le jeu, la tragédie...

Le serpent qui frôle le sein sur la robe noire. Le serpent de Cléopâtre. Le serpent du temps qui glisse...

 

      Jane Avril a fini par trouver l'homme de sa vie, le journaliste et dessinateur Maurice Blais qu'elle a suivi à Jouy en Josas pour y vivre 16 années plus paisibles...

                                                        Jane Avril par Maurice Blais

Quand il meurt, il la laisse sans un sou et Jane n'a même pas la ressource de vendre les dessins et les croquis que Toulouse Lautrec lui a offerts. Il y a longtemps déjà qu'elle en a fait cadeau à des amants de passage...

Sacha Guitry interviendra pour la faire entrer dans un hospice où elle passera les dix dernières années de sa vie.

 Elle dansera une ultime fois, à 67 ans, invitée par Max Dearly.

     Elle mourra huit ans plus tard et sera enterrée au Père Lachaise.

            Sans doute eût-elle préféré Montmartre où elle rencontra son  grand ami, Toulouse Lautrec, celui grâce à qui elle est vivante aujourd'hui....

 

 

Liens :

Liste et liens: Peintres et personnages de Montmartre. Classement alphabetique.

Musée de l'érotisme. Pigalle.

Poulbot. Panneaux de Faïence. Rue Damrémont. Montmartre.

 

avril-005.JPG

 

 

...

 

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Publié le par chriswac
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Louise Weber est devenue une légende montmartroise et c'est grâce à Toulouse Lautrec qu'elle est aujourd'hui connue dans le monde entier.

Elle ne pouvait naître qu'en été (juillet 1866) dans une banlieue populaire (Clichy La Garenne).

Ses parents sont des Juifs alsaciens modestes qui ne se doutaient certes pas que leur fille poserait ainsi, les seins offerts aux regards avides de ses admirateurs.

 

.la goulue nue

     Elle passe à la postérité sous le nom de "La Goulue" que lui aurait valu sa propension à vider tous les verres qui se trouvaient sur son passage. Peut-être se souvint-on également, en la baptisant, qu'elle fut plus ou moins découverte par un dénommé Goulu-Chilapane qui l'accueillit dans son hôtel particulier de l'avenue du Bois.

Son corps sensuel, un peu provocant correspond au goût de l'époque qui appréciait la féminité généreuse.

goulue st vincent 056

                                      La Goulue (à droite) et Casque d'or (à gauche)

    C'est au Moulin Rouge qu'elle rencontre la gloire, après avoir dansé au Moulin de la Galette, à l'Elysée-Montmartre et au Jardin de Paris.

Il est difficile d'imaginer en voyant ces photos, avec quelle vitalité canaille elle danse le cancan. Elle en est le vedette et elle a toutes les audaces, interpellant les mâles quel que fût leur rang.

Elle n'hésite pas à lancer au prince de Galles, futur Edouard VII : "Hé Galles! Tu paies l'champagne! C'est  toi qui régales ou c'est ta mère qui invite?"

     Imaginez la meneuse de revue du Moulin-Rouge, lançant une telle question à notre président ? 

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                         La Goulue et Valentin le Désossé à l'Elysée-Montmartre

Valentin le désossé en fait son élève préférée. C'est avec elle qu'il danse le chahut. Toulouse Lautrec les représente tous les deux sur la célèbre afffiche du Moulin rouge.

 

Etonnante affiche d'une simplicité qui n'est qu'apparente. Valentin apparaît, silhouetté en gris au premier plan tandis qu'à l'arrière des ombres chinoises suggèrent tout un monde de noceurs, chapeaux hauts- de-forme et aigrettes, tournés vers la vedette, celle qui saute comme "une chèvre" et lève la jambe comme aucune autre, faisant tourbillonner ses jupons affolants.

Le regard est attiré vers ses cuisses, vers la corolle blanche qui accroche la lumière. En quelques traits Lautrec suggère le mouvement et l'audace.

                                                       La Goulue et Valentin

                   Le peintre reste l'ami de la Goulue bien après les triomphes.

               Sur cette photo, ils sont côte à côte, comme un couple de bons vivants...

    Elle est représentée sur cette litho, croquée de dos, silhouette nerveuse et coiffure portée comme un emblème, une plume d'apache!

La femme à ses côtés a parfois été prise pour sa soeur car elle l'accompagnait souvent. Il s'agit en réalité de la Môme Fromage, grande amie de la Goulue.

                                                        Au Moulin-Rouge ou la Promenade (La Goulue). 1892. Peinture sur carton

                                                                        La goulue entrant au Moulin-Rouge. 1892. Huile sur carton.

C'est un des portraits les plus célèbres de la Goulue. Lautrec ne l'a pas flattée. Elle arrive en tenue provocante, les seins presque nus, le corps souple et cambré.

  Elle est saisie à son insu, un sourire amer, un sourire qui tourne à la grimace et qui est empreint de lassitude sur un visage fatigué. Le corps joue toujours le jeu mais le visage tombe le masque. Le temps commence à gagner la partie...  

     Bientôt la goulue plaira moins. Elle se mettra à son compte et s'exhibera dans les foires foraines. Son ami peint pour elle les grands panneaux décoratifs exposés en façade de sa baraque.                                

                                          La danse au Moulin rouge 1895

           Pour attirer le passant, il rappelle le prestigieux passé de l'artiste. Il la représente au Moulin-Rouge avec Valentin le Désossé (Jane Avril apparaît à l'arrière-plan, avec son immense chapeau).

                                                              La danse mauresque, les Almées, 1895.

     Le deuxième panneau est une annonce de son nouveau spectacle donné dans la baraque. On reconnaît au premier plan Jane Avril, Lautrec lui-même, blotti contre elle, le critique Félix Fénéon.

Quelques années plus tard, la Goulue endettée devra vendre ces panneaux qui seront découpés par un marchand cupide et stupide. Ce n'est qu'en 1929 qu'ils seront rachetés et restaurés par le Louvre. Ils sont aujourd'hui exposés au musée d'Orsay.

    Les dernières année de La Goulue ressemblent à un roman tragique. Elle apprend à dompter les fauves qui  l'agressent au cours d'un spectacle. Son mari, Joseph Nicolas Droxler, épousé en 1900, magicien de métier,  ne parvient pas à s'escamoter devant les balles prussiennes et meurt à la guerre de 1914.

        Le Petit Journal. La Goulue et son mari agressés par un puma le 24 janvier 1904

            

               Son fils, né de père inconnu mais qu'elle prétend "prince"meurt à 27 ans.

Goulue-et-Simon.JPG

                                                      La Goulue fait la parade à côté de son fils Simon... 

Elle va vivre dans une roulotte à Saint-Ouen. Elle recueille sans rancune des animaux de cirque éclopés, des chiens et des chats qu'elle nourrit en se privant du nécessaire. 

 

Elle retourne au Moulin-Rouge mais sans y entrer, sur le trottoir où elle vend des cacahuètes et des cigarettes.

Elle meurt à l'hôpital Lariboisière en janvier 1929 et elle est enterrée à Pantin. C'est en 1992 que ses restes sont transférés à quelques dizaines de mètres du Moulin-Rouge, au cimetière de Montmartre où sa tombe est toujours fleurie.

 

          A en croire les nuages qui juponnent si souvent dans le ciel de Paris, La Goulue danse toujours le french-cancan avec les anges tandis que Lautrec, un verre d'absinthe (herbe sainte) dans une main et fusain dans l'autre crayonne sur le ciel blanc.

 

 

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Jehan-Rictus par Steinlen.

Jehan-Rictus par Steinlen.

Poète à part, virtuose de l'argot et du parler populaire, Jehan-Rictus ne pouvait trouver refuge que dans le Montmartre des artistes fauchés et des anars.

Jehan-Rictus par Léandre.

Jehan-Rictus par Léandre.

Gabriel Randon (véritable nom de Jehan-Rictus) est né en 1867 à Boulogne sur mer.

On ne peut pas dire qu'il ait eu une enfance heureuse, non reconnu par ses parents, élevé par une mère névrosée qui rêvant d'une gloire théâtrale s'installe avec son fils âgé de huit ans à Paris.

Gabriel Randon est né au 8 de la place Navarin bombardée en 1915.(Boulogne sur mer)

Gabriel Randon est né au 8 de la place Navarin bombardée en 1915.(Boulogne sur mer)

Il racontera son enfance de garçon mal aimé dans son roman Fil de Fer publié en 1906 qui n'est pas sans évoquer Poil de Carotte.

A 14 ans, il cesse d'aller à l'école. Il est employé dans des maisons de commerce comme apprenti jusqu'à l'âge de 16 ans où il se sépare de sa mère.

Très vite il est attiré par Montmartre où il survit grâce à de petits boulots qui lui assurent à peine de quoi se payer nourriture et abri. En 1889 il vit dans la rue avec les clochards et les laissés pour compte qui trouvent refuge dans le maquis. Il n'oubliera jamais cette période de sa vie où il fait l'apprentissage de la misère.

Le maquis de Montmartre (1904)

Le maquis de Montmartre (1904)

C'est là qu'il rencontre pour la première fois Steinlen dont le Cat's Cottage est en bordure du maquis. Steinlen deviendra un ami fidèle et c'est lui qui illustrera son plus célèbre recueil : Les Soliloques du Pauvre.

Il représentera page apès page le poète comme un errant, un passant tragique à la silhouette de Juif errant. Ses dessins sont au plus près de l'os, images charbonneuses d'un artiste mangé par la misère et la nuit, image un tant soit peu fantasmée du clochard idéal!

Jehan-Rictus à Montmartre.
Jehan-Rictus à Montmartre.

Gabriel Randon qui n'a pas encore choisi de s'appeler Jehan-Rictus se sent poète. Il admire alors Heredia qui l'aide à trouver un emploi dans l'administration de la Préfecture de la seine.

A la même époque il se lie d'amitié avec un poète symboliste, Albert Samain.

On a du mal à reconnaître l'écorché vif dans les vers qu'il écrit, inspirés des Parnassiens ou des Symbolistes....

Jehan-Rictus à Montmartre.

(...)

Vous me refusez. Adieu! tout s'écroule.

Je sais une mer, là-bas, dont la houle

Fermera sur moi son linceul flottant.

 

Si vous demeurez dédaigneuse, altière,

Je sais une croix dans un cimetière

Où j'irai clouer mon coeur palpitant."

 

Gabriel Randon. (sonnet à Léonie Godart. 1887)

 

En 1892, le poète qui ne donne pas satisfaction à l'administration qui ne lui en donne pas plus, va exercer sa plume dans le journalisme. Sans grand succès.

Il se sent poète avant tout et commence à fréquenter les cabarets où il lit ses textes.

Les Quat'z'Arts 62 bd de Clichy

Les Quat'z'Arts 62 bd de Clichy

Aujourd'hui! lingerie sexy à l'emplacement des Quat'z'Arts!

Aujourd'hui! lingerie sexy à l'emplacement des Quat'z'Arts!

Il débute 62 bd de Clichy au cabaret des Quat'z'Arts. Il délaisse alors le formalisme des vers classiques pour s'exprimer dans un langage populaire mâtiné de patois picard et d'argot parisien.

Il rencontre le succès grâce à un de ses textes les plus forts : le Revenant.

Il est invité dans des fêtes syndicales pour le déclamer devant un public ému.

Il fréquente le Lapin Agile où il a l'occasion de rencontrer, sans pourtant les apprécier, Max Jacob et Apollinaire.

Illustration de Steinlen pour le Revenant

Illustration de Steinlen pour le Revenant

Le long poème donne la parole à un clochard qui voit surgir face à lui, un soir de brume, le Christ, aussi décharné et aussi désespéré que lui.

Il compatit au sort misérable de l'homme divin et lui présente la société moderne plus dure encore et plus injuste que celle pendant laquelle il a vécu avant de subir sa passion :

.

"-Ah! Comm' t'es pâle...ah! comm' t'es blanc.

Sais-tu qu't'as l'air d'un Revenant,

Ou d'un clair de lune en tournée?

T'es maigre et t'es dégingandé,

Tu d'vais êt' comm' ça en Judée

Au temps où tu t' proclamais Roi!

A présent t'es comm' en farine.

Tu dois t'en aller d' la poitrine

Ou ben... c'est ell' qui s'en va d' toi!

Steinlen. Illustration pour le Revenant.

Steinlen. Illustration pour le Revenant.

Après avoir soliloqué longuement, après avoir accusé le Christ d'être un défaitiste qui tend la joue gauche alors qu'il faudrait se révolter, après l'avoir vu pleurer...le clochard se rend compte que c'est à son propre reflet dans le miroir d'une devanture qu'il a parlé en croyant s'adresser au fils de Dieu!

.

-Et Jésus-Christ s'en est allé

Sans un mot qui pût m'consoler,

Avec eun' gueul si retournée

Et des mirett's si désolées

Que j' m'en souviendrai tout' ma vie.

Et à c' moment-là, le jour vint

Et j' m'aperçus que l'Homm' Divin...

C'était moi, que j' m'étais collé

D'vant l' miroitant d'un marchand d' vins!

On perd son temps à s'engueuler...

.>

Jehan-Rictus à Montmartre.

Le poème fera partie du recueil qui paraîtra en 1897 et qui assurera jusqu'à nos jours la renommée de Jehan-Rictus : "Les Soliloques du Pauvre".>

Heureuse époque où un recueil de poèmes pouvait rencontrer le succès, être épuisé en quelques jours et nécessiter une réédition (au Mercure de France) !

Le 64 rue Lepic où Jehan-Rictus vit de 1895 à 1904

Le 64 rue Lepic où Jehan-Rictus vit de 1895 à 1904

Le 50 rue Lepic où il vit de 1904 à 1913

Le 50 rue Lepic où il vit de 1904 à 1913

Pendant ces années d'intense activité entre écriture et cabaret, Jehan-Rictus habite au coeur de Montmartre, rue Lepic.

D'abord au 64 où il loue un modeste appartement, ensuite au 50 dans un immeuble proche de celui où vécut Théo Van Gogh et où Vincent séjourna.

Le Bateau lavoir, ancienne Maison du Trappeur.

Le Bateau lavoir, ancienne Maison du Trappeur.

Pendant ces années fécondes, il fréquente la Maison du Trappeur qui allait devenir le Bateau Lavoir. Il y rencontre des poètes et des peintres anarchistes.

L'esprit de la Commune est encore présent sur la Butte !

Un public chaleureux l'accueille à la Roulotte, cabaret proche de la place de Clichy (42 rue de Douai) où se produit un autre poète du Pas de Calais, Marcel Legay, l'auteur de la chanson "Ecoute ô mon coeur" qui met la larme à l'oeil de tous les Artésiens!

25 rue Lepic. Emplacement de la Vache Enragée.

25 rue Lepic. Emplacement de la Vache Enragée.

Parmi les lieux où il interprète ses poèmes, citons encore au 25 rue Lepic le Cabaret de la Vache Enragée.

Jusqu'en 1914 il publie divers recueils ( Le Coeur Solitaire, Doléances, les Cantilènes du malheur) des plaquettes (la Frousse, les petites Baraques) un roman (Fil de fer).

Après cette date, bien qu'il lui reste une vingtaine d'années à vivre, il ne produit quasiment plus rien, comme si l'embourgeoisement de la vie rangée l'avait privé d'un talent qu'irriguaient la révolte et la misère.

Jehan-Rictus à Montmartre.

L'anarchiste, le rebelle vit correctement de ses droits d'auteur et d'aides publiques. Il a abandonné tout espoir et même tout désir de révolution.

Pire, il se rapproche par certaines idées de l'Action Française!

Le pacifiste a abandonné ses rêves de fraternité et la guerre le contraint à renoncer à ses illusions d'entente entre les peuples.

..

"(...) Gn'y en a qui dis'nt que l' Monde un jour,

Y s'ra comme un grand squar' d'amour,

Et qu' les Homm's qui vivront dedans

S'ront d' grands Fan-fans, des p'tits Fan-fans,

Des gros, des beaux, des noirs, des blancs.

(La Farandole des pauv's tits fan-fans)


 
8 rue Camille Tahan où Jehan-Rictus vit de 1914 à sa mort en 1933.

8 rue Camille Tahan où Jehan-Rictus vit de 1914 à sa mort en 1933.

8 rue Camille Tahan depuis le cimetière de Montmartre!

8 rue Camille Tahan depuis le cimetière de Montmartre!

Il vit au dernier étage d'un immeuble cossu, 8 rue Camille Tahan. Il ne ressemble plus au Juif errant, au fantôme émacié qu'avait dessiné Steinlen.

Comme si après l'épuisement de son talent et de sa révolte, il n'attendait plus que la mort physique, il a choisi d'habiter contre le cimetière de Montmartre. Le mur pignon de son immeuble donne sur la ville des morts.

Il meurt en 1933.

Il est âgé de 66 ans.

Il ne saute pas par la fenêtre pour rejoindre le cimetière Montmartre.

Il est transporté dans sa boîte en sapin à Bagneux où il est enterré dans la 25ème section.

Sur sa pierre tombale sont gravés ces vers tirés des Soliloques :

.

"Voui, dormir... n'pus jamais rouvrir

Mes falots sanglants su' la Vie,

Et dès lors ne pus rien savoir

Des espoirs et des désespoirs.

Qu' ça soye le soir ou bien l' matin,

Qu'y fass' moins noir dans mon destin,

Dormir longtemps... dormir...dormir !

Jehan-Rictus (c'est en 1920 qu'il tient à écrire son nom avec le trait d'union) reste vivant aujourd'hui pour tous ceux qui ont lu ses poèmes.

Sa légende est plus coriace que sa biographie.

Il est à jamais l'homme des Soliloques, le poète de de la compassion et de la révolte.

Son long fantôme noir et voûté ne cesse de hanter les rues de la Butte....

Peut-être se plante t-il devant la vitrine d'une boutique de luxe des Abbesses pour apostropher le Christ :

"Avoue-le, va... t'es impuisssant,

Tu clos tes châss's, t'as pas d' scrupules,

Tu protèg's avec l' même sang-froid

L'sommeil des bons et des Crapules

Et quand on perd quéqu'un qu'on aime,

Tu décor's, mais tu consol's pas."

 

 

Illustration pour Le Printemps (Steinlen)

Illustration pour Le Printemps (Steinlen)

Au-dessus des murs des "Je t'aime" square Jehan-Rictus.

Au-dessus des murs des "Je t'aime" square Jehan-Rictus.

Ou bien, devant les couples qui s'embrassent dans le square qui porte son nom et où a été élevé le Mur des "Je t'aime" se laisse t-il émouvoir... un instant...

Des Enlacés pass'nt deux par deux

(Comm' la Mort toujours près d' la Vie)

Y m' frôl'nt, y vont - je m'fais des ch'veux

Car moi j' suis seul et ça m'ennuie.

Mais l' ciel s' met eun' si bell' liquette,

L'ensemble il a l'air si joyeux,

Y fait si doux, y fait si chouette,

Qu' ça s'rait p'têt' vrai qu'y a un Bon Guieu!"

(Le Printemps. Les soliloques)

Le mur des "Je t'aime" square Jehan-Rictus
Le mur des "Je t'aime" square Jehan-Rictus

Le mur des "Je t'aime" square Jehan-Rictus

Liens :

Artistes, peintres célébrités de Montmartre

Rues, places de Montmartre

Monuments et lieux typiques de Montmartre

Cimeière Montmartre. Célébrités

Merci à Christian Tanguy de m'avoir signalé" quelques erreurs que j'ai pu corriger grâce à lui.

site : http://www.florilege.free/jehan-rictus

Il est le rééditeur de Fil de Fer et des poésies de Rictus aux éditions la part commune.

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Publié le par chriswac
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Montmartre. CHA-U-KAO la clownesse.

   

Sans Toulouse Lautrec, on aurait sans doute oublié ce personnage hors-normes des nuits montmartroises, à la fois danseuse, contorsionniste et clownesse : Cha-U-Kao.

 

Son nom pourrait faire penser qu'elle est Japonaise en un temps où le pays du Soleil levant inspirait les peintres et les artistes  (à commencer par Lautrec lui-même).

Mais il n'en est rien! Son nom vient d'une danse dérivée du cancan, très en vogue au Moulin Rouge : le chahut, mis à la mode par la Goulue et Valentin le désossé. Quant au chaos, il s'agit de l'agitation et des cris qui s'élevaient de la salle quand les artistes faisaient leur entrée.

 

                                                                           Au Moulin Rouge. Entrée de Cha U Kao. (1896)

Parce qu'elle était spectaculaire l'entrée de la dame!

 Perchée sur une mule, encadrée de gardes, elle déboulait dans le hall du Moulin Rouge et gagnait la salle, sous les ovations! 

Sans Lautrec il n'y aurait presque plus de traces (quelques rares photos) de cette femme à laquelle il a offert une "éternité" dans quelques-uns des plus grands musées...

 

... Mais que savons-nous d'elle? Si peu de choses!

Quel était son véritable nom? D'où venait-elle? Pourquoi n'a t-elle suscité aucune recherche d'un quelconque plumitif soucieux de faire revivre le passé glorieux du Moulin Rouge?

     Elle s'est produite au Nouveau Cirque de la rue Saint-Honoré, établissement très à la mode grâce à son éclairage électrique et à sa piste escamotable et transformable en piscine..

Le Nouveau Cirque qui aimait exhiber nains et lilliputiens, avait aussi l'habitude de ponctuer ses spectacles par des apparitions de clowns, parmi lesquels les célèbres Footit et Chocolat. 

                                     cha-u-kao-006.JPG

Une photo nous montre la danseuse nue au temps de sa splendeur. Elle a sur ce cliché une petite allure de Cambodgienne!

     Quand elle se produit au Moulin Rouge, elle n'est plus la jeune et svelte danseuse de ses débuts. Les années ont empâté son visage et alourdi son corps.

C'est alors que ne pouvant plus séduire par sa nudité, elle se déguise, se campe sur ses jambes, prend une allure canaille et apostrophe les spectateurs... Elle devient pour la postérité :  la clownesse Cha U Kao...

       Sur cette toile de 1895, on la voit arriver, avec son costume de scène, au bras de Gabrielle qui ressemble à une concierge mais qui est en réalité une prostituée et modèle que Lautrec a représentée maintes fois comme sur cette huile sur carton: le sofa...

                                     Le Sofa (1894). Au premier plan, Gabrielle.

 

Sur "l'entrée au Moulin Rouge",Cha U Kao est légèrement tournée vers l'arrière comme si elle retardait le moment de son exhibition alors que Gabrielle avance sans hésitation comme une paroissienne allant à la messe!

La clownesse a le regard triste malgré le maquillage et les rubans jaunes de sa coiffure grotesque.

Lautrec n'essaye pas de l'embellir ni de tricher sur son âge. Pourtant ce portrait loin d'être une caricature comme sait les réaliser brillamment le peintre est empreint d'une douceur et d'une mélancolie qui émeuvent. 

                                                                                     La clownesse assise. British Museum. Londres

Là encore, elle sourit, comme surprise par le regard d'un client, alors qu'elle se repose un instant sur la banquette rouge, lasse peut-être d'avoir une fois de plus fait son numéro d'amuseuse. Il y a dans ce sourire de coin quelque chose de désabusé et d'ironique à la fois, l'air de dire que le véritable clown n'est pas celui qu'on pense!

         Et cette toile... Une des plus belles, par sa composition, ses couleurs...

La clownesse qui a contraint son corps à entrer dans son déguisement, semble ici sortir de son carcan, la poitrine libérée, le soleil de tulle jaune glissant sur ses hanches.

Elle représente pour Lautrec tout ce qui remet en cause un ordre et des conventions qui font souffrir ceux qui ne correspondent pas aux normes (ce qu'était le peintre).

Cha U Kao est une femme qui joue le rôle réservé aux hommes, celui de clown...

                   Cha U kao est aussi une femme qui aime les femmes.

                                                                              Les deux valseuses. Prague.

Lautrec la peint en train de valser avec une compagne :                                        

Moment de paix, intervalle de tendresse. Le monde des plaisirs et des fêtes frelatées s'efface un instant. Aucune caricature dans cet instant volé, dans cette chaude complicité.

Cha U Kao, sobrement habillée, son déguisement au vestiaire, guide son amie dont la main est posée sur son épaule.

                                                              Le baiser. (1892)

                                                                                              Les deux amies. Albi. (1894)

 

Pour nous, Cha U kao garde son mystère et pour toujours émerge de sa collerette de soleil...

Liens: 

Montmartre: Jane Avril, Toulouse Lautrec.

Montmartre. La Goulue et Toulouse Lautrec.

 

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Place Juliette Drouet rue Pigalle et La Rochefoucauld. Victor Hugo et Juliette.

Depuis mes derniers articles sur les rues Pigalle et La Rochefoucauld quelques années ont passé.

L'abbesse a retrouvé sur les plaques son prénom : Catherine de La Rochefoucauld comme ses semblables non loin de là : Marguerite de Rochechouart et Emilie de la Tour d'Auvergne....

 

Le delta entre les rues Pigalle et Catherine de La Rochefoucauld jusque là anonyme a été baptisé "place Juliette Drouet" en 2017. 

 

Place Juliette Drouet rue Pigalle et La Rochefoucauld. Victor Hugo et Juliette.

     Avez-vous remarqué que tous ces mini espaces récupérés sur la voirie sont la plupart du temps devenus des "places" dédiées à des femmes. La mairie tente de réparer un "oubli" de plusieurs siècles. Les rues de la ville ont le plus souvent ignoré la moitié de l'humanité. 

Voilà donc que la femme de lettres, la passionnée, l'inlassable amoureuse de Victor Hugo a enfin à Paris un endroit qui la commémore. 

Place Juliette Drouet rue Pigalle et La Rochefoucauld. Victor Hugo et Juliette.

 Victor Hugo de retour d'exil loue en 1871 le premier étage de l'hôtel Rousseau 66 rue La Rochefoucauld.

 

Un bel hôtel dû à l'architecte Pierre Rousseau connu pour avoir réalisé l'Hôtel de Salm, un des plus beaux monuments civils de Paris (restauré après les incendies de la commune).

Victor Hugo y reçoit de nombreux écrivains, les Goncourt, George Sand ainsi que des politiques comme Clémenceau ou Gambetta. C'est là qu'il consacre une partie de ses journées à ses petits enfants Georges et Jeanne et qu'il écrit "L'art d'être grand-père".

Prenez garde à ce petit être ;

Il est bien grand, il contient Dieu.

Les enfants sont, avant de naître,

Des lumières dans le ciel bleu.

Place Juliette Drouet rue Pigalle et La Rochefoucauld. Victor Hugo et Juliette.

L'appartement que Juliette a choisi est presque en face de l'hôtel Rousseau là où la rue Pigalle fait un delta avec la rue Catherine de La Rochefoucauld. C'est aujourd'hui un hôtel de tourisme.

 

       L'année 1872 est tragique, c'est celle où la fille de Victor Hugo, Adèle, sombre dans la folie et doit être internée.

     Période noire pour le poète qui après avoir perdu son fils Charles l'année précédente, verra mourir son deuxième fils François-Victor l'année suivante. La présence de Juliette Drouet et les lettres qu'elle lui écrit le soutiennent dans l'épreuve. Il se réfugie chez elle et passe de plus en plus de temps à ses côtés.

Après un séjour de presque un an à Guernesey où il finit d'écrire son roman "Quatrevingt-treize", de retour à Paris,  il quitte l'hôtel Rousseau pour vivre chez Juliette rue Pigalle en 1873.

Cette place voit donc Juliette vivre enfin officiellement avec Victor Hugo! Et quand bientôt il louera l'hôtel du 130 avenue d'Eylau, elle l'y suivra.

124 avenue Victor Hugo (anciennement 130 avenue d'Eylau). Immeuble construit à l'emplacement de l'hôtel où Victor et Juliette vécurent ensemble leurs dix dernières années.

Tout a été écrit sur cette relation de sujétion qui sans doute irrite beaucoup de féministes. Je le comprends mais il y a là un mystère qui nous dépasse. Juliette qui connaissait les hommes, avait été mariée et mère, a choisi de lier sa vie à cet ogre de génie à qui elle apporta par sa fidélité une stabilité qui souvent lui manquait.

Je t'aime, toi, je ne pense qu'à toi. Je n'ai besoin que de toi. Je ne sais pas ce que je deviendrais s'il me fallait vivre maintenant sans toi, je crois que je ne vivrais pas.

 

Elle écrivit 22 000 lettres qui sont autant de déclarations. On y trouve, vigilant et brûlant,  le mot qui est le dernier de l'épitaphe que Victor Hugo fit graver sur sa tombe.

Quand je ne serai plus qu’une cendre glacée,
Quand mes yeux fatigués seront fermés au jour,
Dis-toi, si dans ton cœur ma mémoire est fixée :
Le monde a sa pensée, moi, j’avais son amour !   (Victor Hugo)

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Gustave Moreau. Exposition Le Moyen Âge Retrouvé. Musée-maison rue Catherine de La Rochefoucauld.

Comment le fou de Moreau que je suis a-t-il pu ignorer si longtemps cette exposition qui prendra fin dans moins de trois semaines?

Gustave Moreau. Exposition Le Moyen Âge Retrouvé. Musée-maison rue Catherine de La Rochefoucauld.

    Difficile à expliquer. Peut-être parce que je n'avais pas du tout aimé la dernière sur l'illustration des Fables de la Fontaine avec ses panneaux trop hauts qui cachaient les les toiles du musée.

La maison de Gustave Moreau

La maison de Gustave Moreau

      Cette expo, plus modeste a tenu compte des critiques formulées par les visiteurs. Sa disposition est judicieuse et ne nuit pas à la visite normale. 

Gustave Moreau. Exposition Le Moyen Âge Retrouvé. Musée-maison rue Catherine de La Rochefoucauld.

   Elle est modeste également et c'est une grande qualité devant un tel sujet et un tel peintre.

Gustave Moreau et le Moyen âge!

Comment aborder le thème? Comment avec un peintre si foisonnant, si éclectique faire un tri, choisir une ligne?

                                  

  En abordant tout d'abord le romantisme qui fut le grand "re-découvreur" du Moyen Âge. Moreau qui admire Delacroix ou Chassériau illustre à son tour Dante, l'Arioste ou Shakespeare.

                                                                   Hamlet

     Cet aspect est peu représenté dans l'expo qui évoque ensuite Les sujets mythologiques source privilégiée d'inspiration.

                                                        Orphée

Théophile Gautier parle à propos de son style, d'un "hellénisme gothique" et compare ses héroïnes à des "châtelaines du Moyen Âge."

 

 

                                                                  Héraut porte étendard

      L'expo évoque la guerre de 1870 et ses répercussions chez Gustave Moreau qui, profondément affecté par la défaite, représente des figures médiévales qui font partie du roman national : chevalier partant pour la Croisade, Jeanne d'Arc...

                                                     Deux hérauts

                                                        Jeanne d'Arc armée

Chasseur au faucon

Chasseur au faucon

Mort d'un jeune Croisé

Mort d'un jeune Croisé

Son "jeune Croisé mort" est un des plus beaux tableaux de l'exposition. Tout l'art de Moreau s'y déploie, la précision et le flou, l'androgynie, le réalisme et l'onirisme.

La mort offre des couronnes aux vainqueurs du tournoi

La mort offre des couronnes aux vainqueurs du tournoi

Une autre toile remarquable retient l'attention : "La Mort offre des couronnes au vainqueur du tournoi". Thème médiéval de la vanité de la gloire que l'on retrouve dans les danses macabres qui unissent dans la même farandole les seigneurs, les évêques, les mendiants...

Qui aime Moreau retrouve ici cette liberté qui le caractérise avec précisions et esquisses, avec paysage antique et rêvé. Avec au centre de la toile, la mort bien vivante devant la colonne qui porte une dérisoire victoire ailée.

Les licornes

Les licornes

Autre thème médiéval, celui de la licorne des enluminures et des miniatures.  Cette licorne de la tapisserie présentée à l'exposition de 1878 et confiée au musée de Cluny.

 

Femme et licorne

Femme et licorne

Les quelques œuvres ici proposées sont un résumé de l'art de Moreau capable d'allier l'extrême précision, hommage aux enluminures, à l'évaporation des formes, à l'atmosphère plus qu'à la figuration. La femme au corps blanc, la licorne au symbole phallique, tout concourt à la poésie du trouble et de la sensualité diffuse.

                                                         Poète persan

Fait rarissime, un homme peut être associé à l'animal fabuleux. Ici "le poète persan" chantre de la liberté des amours (on pense à Omar Khayyam) 

L'apparition

L'apparition

   Bien sûr le terme clé pour définir l'art de Moreau est "syncrétisme". La palette de ce peintre est un maelstrom qui mêle Antiquité, Renaissance, Moyen Âge, Romantisme, Symbolisme. Et bien avant leur heure le surréalisme et l'abstraction.

L'Apparition est une œuvre majeure. Outre qu'elle fascine par son sujet : Salomé voit apparaître la tête de Jean Baptiste dont elle a obtenu d'Hérode en dansant et en se dénudant qu'il ordonne sa décapitation. Sur la droite le bourreau comme une tache de sang. Sur la gauche Hérode enfoncé, ténébreux dans son trône près de sa femme instigatrice du supplice. Le décor fantasmé mêle les époques. La forte charge érotique de l'épisode se concentre sur le corps presque nu de Salomé.

 

 

Dessin d'un tympan de St-Pierre de Moissac (XIIème) et détail de l'Apparition.
Dessin d'un tympan de St-Pierre de Moissac (XIIème) et détail de l'Apparition.

Dessin d'un tympan de St-Pierre de Moissac (XIIème) et détail de l'Apparition.

Les colonnes sont gravées de figures empruntées à l'art roman. Le tympan de Moissac, ou les colonnes ornées de griffons de Brive

Détail du tableau et étude d'un chapiteau roman (St Martin à Brive, XIIème)
Détail du tableau et étude d'un chapiteau roman (St Martin à Brive, XIIème)

Détail du tableau et étude d'un chapiteau roman (St Martin à Brive, XIIème)

Une dernière partie de l'exposition évoque l'importance de la religion catholique sans laquelle il est impossible de comprendre le Moyen Âge. Chez Moreau, elle est présente, on pourrait dire omniprésente avec l'image de la femme tentatrice, une Eve susceptible de s'incarner dans les mythes qui la précèdent. Mais plus directement elle s'illustre avec les Saints les plus emblématiques comme Ste Cécile, St Martin ou Ste Elisabeth de Hongrie :

 

Si contrairement aux enluminures, les éléments architecturaux intérieurs gothiques sont rares chez Moreau il n'en est pas de même pour l'extérieur avec les anges voyageurs qui font halte sur les cathédrales. 

Moreau s'inspire de croquis de Violet le Duc pour Notre-Dame.

Et cette année qui va voir se rouvrir les portes de Notre-Dame qui faillit disparaître dans les flammes, j'aime terminer cette balade avec ces anges posés avec légèreté sur les tours, gardiens de la cathédrale et de la ville.

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Publié le par chriswac
Publié dans : #MONTMARTRE Peintres.Artistes.Clébrités, #MONTMARTRE. Rues et places.

 

     Chaque fois que je passe devant le 36 boulevard de Clichy je pense à Jules Pascin, peintre bulgare qui se donna la mort dans son atelier en 1930 à l'âge de 45 ans.

     Une mort difficile décidée après des années de dépression et de mal de vivre. Il se trancha les veines des deux poignets et la mort tardant à le libérer, il se passa une ficelle autour du coup et voulut se pendre. La ficelle ne résista pas, Pascin tomba sur le sol, nuque brisée. Il agonisa plusieurs heures. Il ne fut découvert que trois jours plus tard par sa maîtresse, Lucy, (de son vrai nom Cécile Vidil), mariée au peintre norvégien Per krogh neveu de Charles Munch. C'est son nom qu'il écrivit avec son sang sur les murs de son atelier.

                                                                  Lucy

    J'ai voulu retrouver dans notre quartier quelques endroits où il a vécu. Il est en effet lié à Montmartre et comme tous les artistes qui y ont travaillé, son fantôme est toujours présent dans l'air si particulier de la Butte.

 

   Jules Pascin, de son vrai nom Julius Mordecai Pincas est né en Bulgarie en 1885.

  C'est Apollinaire avec qui il se lia d'amitié qui lui proposa l'anagramme Pascin.

                                                       La famille turque (Pascin)                                            

     Il arriva à Paris en 1905 et atterrit à Montparnasse où alors qu'il était à ses débuts influencé par l'expressionnisme,  il se rapprocha des Fauves.

    Il séduit par son allure de prince en exil  et il participe aux folles nuits du quartier, ce qui lui vaut le surnom d "anarchiste déguisé en dandy".

                                               Photo prise au Dôme en 1910

 

1907 est une année décisive.

    Il rencontre la peintre Hermine David et il quitte Montparnasse pour s'installer (enfin!) à Montmartre.

                                       Hermine dans son lit (Pascin)

Sa première adresse montmartroise est l'hôtel Beauséjour, 1 rue Lepic. 

L'hôtel existe toujours mais il est devenu le Manolita et il cache bien ses cinq étoiles!

 

    Il vit avec Hermine une liaison orageuse car deux années plus tard il rencontre Lucy, modèle de Marquet, qui devient sa "seconde maîtresse". 

                                                     Hermine dans le studio

    C'est en 1909 qu'il change d'adresse à Montmartre pour occuper un atelier au 49 rue Gabrielle.

 

     C'est à cette adresse que débarqua Picasso en 1900, chez son ami le peintre Casagemas qui sombra dans l'alcool et se suicida en 1901 après avoir tenté de tuer la femme qu'il aimait.

 

   Les nombreux portraits que Pascin réalise d'Hermine, outre qu'ils montrent son amour pour elle, révèlent l'art sensuel et mélancolique du peintre qui ne se départit que rarement d'une tristesse existentielle profonde.

    En 1914 il est contraint de quitter la France car la Bulgarie est un pays ennemi. Il se réfugie aux Etats-Unis où Hermine le rejoint et où elle l'épouse en 1918, devenant Madame Pascin comme l'atteste intitulé de cette toile :

                                                  Portrait de Madame Pascin

 Le portrait laisse deviner la vieille blessure qui la mutila. Accident dû à une baleine (une baleine de corset plus précisément) catapultée dans les yeux d'Hermine qui en garda les séquelles après chirurgie, des yeux trop saillants, presque exorbités.

    Le "style" si particulier de Pascin apparaît dans ces toiles où l'on peut voir ce qu'il a retenu de l'expressionnisme, du Fauvisme, de l'Ecole de Paris....

 

   Si Hermine pose souvent pour lui, elle n'en est pas moins peintre elle-même, un peintre de grand talent qui s'épuise dans les trop nombreuses illustrations qui lui sont commandées mais reprend parfois le pinceau pour réaliser  des toiles de valeur comme sa fameuse Kiki de Montparnasse.

 

 

  Après les années américaines, le couple revient à Paris en 1920 et c'est à Montmartre que le peintre loue un atelier.

                                           15 rue Hégésippe Moreau

Il choisit la Villa des Arts, voie privée qui ouvre au 15 rue Hégésippe Moreau près du cimetière de Montmartre (sur des terrains récupérés sur lui).  C'était au XIXème siècle la plus grande cité d'artistes de Paris, avec une cinquantaine d'ateliers. Elle devrait susciter le même intérêt que le Bateau-Lavoir. Il suffit de nommer, parmi les nombreux peintres qui y créèrent : Cézanne, Carrière, Signac, Dufy, Rousseau... et Pascin!

                                                        Lucy (Melancolia)

     Le peintre retombe amoureux de Lucy qu'il n'avait jamais oubliée. Elle accepte de poser pour lui et de vivre une relation qu'elle veut garder secrète, étant mariée et mère d'un garçon.

C'est une nouvelle fois par ses portraits de femme que l'on peut apprécier l'art de Pascin. Lucy partage avec Hermine un grand nombre de portraits.

 

                                   Lucy à sa table (1928. Deux ans avant le suicide)

Nous pouvons les voir réunies sur une même toile :

 

     Le peintre est déchiré entre ses deux amours et par la souffrance qu'il inflige à sa femme. Ce déchirement fait sans doute partie des causes qui ont précipité son mal de vivre.

                                                         Jean Marchand

En 1922, il loue l'atelier du peintre cubiste Jean Marchand 73 rue Caulaincourt.

    L'immeuble est situé à l'emplacement du Cat's Cottage de Steinlen. C'est là que vécut et mourut l'un des plus beaux Montmartrois, peintre des chats et infatigable combattant contre la misère et l'injustice.

    Hermine encourage l'homme qu'elle aime à quitter Paris et ses démons pour voyager en Afrique du Nord, en Italie, aux Etats-Unis. Mais les retours se ressemblent et le mènent inévitablement dans les bars, les maisons closes, les fêtes.

                                                               Hemingway au Dôme (Pascin)

     Hemingway qui le rencontre au Dôme en 1924 l'évoque sans complaisance : "Pascin était un très bon peintre et il était ivre constamment, délibérément ivre et à bon escient..."

      En 1923, Pascin vient vivre dans ce qui sera son dernier appartement, au 36 boulevard de Clichy.

Il continue de peindre les pensionnaires des maisons closes, avec une attention teintée de tristesse et de sympathie qui fait de lui un frère de Toulouse Lautrec.

 

     Le 2 juin 1930, le jour même du vernissage de son exposition à la Galerie Georges Petit, il ferme sa porte à double tour, boit sans modération, comme il a l'habitude de le faire quasi quotidiennement et s'ouvre les veines.

C'est à Lucy qu'il pense et  c'est elle qu'il appelle en silence en écrivant son nom en lettres de sang sur le mur.

 

Alors qu'il a vécu l'essentiel de sa vie parisienne à Montmartre et qu'il y est mort, c'est au cimetière Montparnasse qu'il est enterré. Salmon qui fut un de ses amis, notamment au Bateau-Lavoir a écrit le poème gravé sur sa stèle :

" Homme libre      héros du songe et du désir     de ses mains qui saignaient poussant les portes d’or      esprit et chair     Pascin dédaigna de choisir       et maître de la vie il ordonna la mort ". 

 

    Depuis que je connais son histoire je ne peux m' empêcher chaque fois que je passe devant le 36 boulevard de Clichy, d'imaginer derrière les murs, cet homme qui après avoir choisi la mort peignit une dernière fois  avec ce qui lui restait de vie un adieu à la femme la plus aimée.

Dans cet adieu sanglant, je pense à Apollinaire qui avait donné à Pascin son nom :

"Et tu bois cet alcool brûlant comme ta vie

Ta vie que tu bois comme une eau de vie (...)

Adieu adieu

Soleil cou coupé"

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