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Montmartre secret

Montmartre secret

Pour les Amoureux de Montmartre sans oublier les voyages lointains, l'île d'Oléron, les chats de tous les jours. Pour les amis inconnus et les poètes.

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Publié le par chriswac
Publié dans : #MONTMARTRE Peintres.Artistes.Clébrités, #MONTMARTRE. Rues et places.
Rue Biot

Rue Biot

...Bien sûr quand on pense à Gainsbourg on pense à la rue de Verneuil où il a vécu et où il a tiré sa révérence, mais c'est oublier l'importance qu'a eue Montmartre dans sa vie.

A l'occasion de l'ouverture de sa maison-musée, je republie cet article écrit il y a plus d'un an.

Gainsbourg et Montmartre.

     C'est dans la Nouvelle Athènes, 11 bis rue Chaptal qu'il vient vivre en 1932  alors qu'il n'a que 4 ans  avec ses parents Joseph et Olia Ginsburg.

 

       Il est né près de Notre-Dame, à l'Hôtel-Dieu, de parents qui ont fui Odessa.  Tous deux artistes, elle chanteuse lyrique, lui pianiste, ils courent les cachets aussi modestes fussent-ils pour permettre à leur famille de vivre correctement.

Serge qui s'appelle alors Lucien a une sœur jumelle, Liliane, et une sœur aînée, Jacqueline, de deux ans plus âgée. Le frère aîné, Marcel, n'a pas survécu à une pneumonie.

Gainsbourg et Montmartre.

     La rue Chaptal n'est pas une adresse passagère. C'est là que pendant quinze ans la petite famille va vivre.

   

               Lucien, Jacqueline et Liliane Ginsburg

         C'est dans le petit appartement que Lucien subit avec ses sœurs des leçons de piano. En effet quand on a 6 ou 7 ans, on apprécie moyennement l'heure d'exercice pianistique que vous imposent vos parents, chaque jour à la sortie de l'école. Exercices qui se terminent souvent dans les larmes.

Gainsbourg et Montmartre.

    Il est comme il le dira, un enfant trouillard qui a du mal à s'endormir et dont les rêves sont peuplés d'images inquiétantes venues des contes qu'il dévore (Grimm, Andersen). Sur le petit lit pliant installé dans la salle à manger qui lui sert de chambre, il appelle Jacqueline afin qu'elle le rassure la nuit tombée.

Ecole 15 rue Chaptal.

Ecole 15 rue Chaptal.

    Enfant solitaire, il joue seul le plus souvent avec son meccano ou des voitures miniatures. Il  aime son fusil à air comprimé qui lui est confisqué lorsqu'il casse un carreau de l'école maternelle en face de chez lui.

Gainsbourg et Montmartre.

    Il descend la rue Blanche pour aller au square de la Trinité, devant l'église qu'il n'aime pas " la plus laide église que j'aie jamais vue".

Il joue au ballon ou il fait flotter un bateau sur le petit bassin aux fontaines.

La cité Chaptal où vivait Fréhel.

La cité Chaptal où vivait Fréhel.

    Parmi ses souvenirs liés à la chanson, il y a cette rencontre avec Fréhel qui habitait le même quartier, cité Chaptal et qui était alors très populaire.

 

   Le jeune Lulu venait de recevoir la croix d'honneur dans son école et rentrait fièrement, en l'exhibant.

     Fréhel passait par là et émue par le gamin se pencha sur lui.

 

 

  Voici comment en parle sans ménagement Gainsbourg :

"J'avais neuf-dix ans et voilà que je croise Fréhel qui ressemblait à un tas immonde et qui habitait à deux pas, dans l'impasse Chaptal où il y avait le Grand Guignol. Elle se baladait dans la rue avec un pékinois sous chaque bras, en peignoir, avec un gigolo à distance réglementaire, cinq mètres derrière, comme à l'armée. Je revenais de mon école communale et j'avais la croix d'honneur sur mon tablier. Fréhel m'a arrêté, elle m'a passé la main dans les cheveux, elle m'a dit : T'es un bon petit garçon (elle ne me connaissait pas!). Tu es sage à l'école, je vois que tu as la croix d'honneur, alors je vais te payer un verre. Je revois parfaitement la scène, c'était en terrasse du café qui fait le coin de la rue Chaptal avec la rue Henner. Elle s'est pris un ballon de rouge et m'a payé un diabolo grenadine et une tartelette aux cerises."

Gainsbourg et Montmartre.

Au 15 rue Chaptal, le café et sa terrasse sont toujours là. A nous d'imaginer Fréhel et ses deux pékinois, son gigolo à proximité, assise à côté de Lulu qui arborait sa croix d'honneur, peu de temps avant de la remplacer par l'étoile jaune, son "étoile de shérif".

Gainsbourg et Montmartre.

     "L'étoile de shérif" c'est ainsi que Lulu appelle l'étoile jaune qu'il est contraint de porter, cousue sur son tablier.

Il fréquente l'école de la rue Blanche où son instituteur, monsieur Charlet, plutôt que de prononcer son nom l'appelle "le petit juif".

 

Antoine Doinel. Le vol de la machine à écrire. (Les 400 coups)

Antoine Doinel. Le vol de la machine à écrire. (Les 400 coups)

     Cette période de sa vie fait penser à celle d'un autre enfant, moins aimé cependant, le jeune héros des 400 coups. Rappelons que Truffaut passa son enfance non loin de la rue Chaptal,  33 rue de Navarin dans le 9ème arrondissement où il fera habiter dans son film, sorti en 1959, Antoine Doinel et ses parents.

     Lucien n'aime pas l'école. Il rêve, il fait la classe buissonnière, il chaparde dans les magasins : "Je deviens un petit voleur. Je chaparde des soldats de plomb de grand prix, des petites voitures de course, des pistolets que j'arrachais des panoplies et faisais tomber dans mon cartable."

   

Joseph entouré de Lucien , Liliane et Jacqueline (debout)

      La famille depuis la fin des années 30 passe l'été à Dinard où Josef exerce son art de pianiste dans des établissements comme le Balnéum. L'été 40, la famille envisage de ne pas rentrer à Paris afin d'échapper aux menaces qui se précisent. Lucien ne souffre pas de ce premier exil temporaire à Dinard. Jacqueline parlera de cet été comme un temps de vacances et d'insouciance : "Comme les enfants sont inconscients, la grande attraction c'était d'aller sur la place du Marché regarder l'arrivée des camions et des charrettes de l'exode."

Collège de Saint-Léonard de Noblat

Collège de Saint-Léonard de Noblat

    Mais il faut renoncer au retour à Paris où la chasse aux Juifs est de plus en plus active, avec un peu plus haut à Montmartre, un Céline dont les écrits violemment antisémites sont largement diffusés.

    C'est à Limoges, ville accueillante aux persécutés que se réfugient les Ginsburg. Il est cependant plus prudent de changer de nom et Ginsburg se mue en Guimbard, allusion peut-être à la guimbarde, modeste instrument de musique, appelé aussi "jew's harp" aux Etats-Unis où il accompagne les récits d'humour juif. Pour plus de sécurité, il est interne au collège de Saint Léonard de Noblat.

 

    Par chance le proviseur protège les Juifs et lorsqu'il apprend la visite de la milice, il prévient Lucien.

"Petit Ginsburg, il va y avoir une descente des miliciens pour voir, s'il n'y a pas de sémite ici. Je te donne une hache, tu files dans les bois et si tu croises des SS ou des miliciens, tu dis que tu es fils de bûcheron. J'ai attendu quelques jours et il m'a contacté en disant: tu peux rentrer."

    La guerre finie, Lucien reprend ses études à Condorcet où il s'ennuie. Il provoque la colère de ses parents en refusant d'aller jusqu'au bout de la terminale et de passer le bac (1945).

     Académie de Montmartre (Fernand léger) 104 bd de Clichy

Il continue de fréquenter avec plaisir l'Académie Montmartre devenue Académie Fernand Léger où il apprend le dessin et la peinture.

    C'est là qu'il rencontre en 1947 Elisabeth Levitsky, fille d'immigrés russes et mannequin.

 

      Elle habite près de la place Clichy où il la raccompagne après les cours et où il finit, malgré sa timidité par lui demander s'il peut monter chez elle. C'est Elisabeth qui évoque ce moment : "On se disait vous, il m'expliquait tous les accords de guitare très compliqués. Moi j'étais sur le lit de ma toute petite chambre et je me disais : "Qu'est-ce qu'il attend?" Il était trop tard pour son dernier métro. Alors je me suis poussée et je lui ai dit : "Viens donc!" Il s'est assis à côté de moi, il a posé sa guitare et il a éteint..."

                                            Autoportrait

    C'est le début d'une vie de bohême marquée par "la dèche" et l'amour. Serge continue de peindre sans oser vendre ses toiles. Il dira plus tard que cette période a été malgré la misère une des plus belles de sa vie :

        Enfants au square, tableau offert par Gainsbourg à Greco.

"J'avais trouvé là un art majeur qui m'équilibrait... La chanson et la gloire m'ont déséquilibré. J'ai tellement aimé la peinture..."

Rue Royer Collard

Rue Royer Collard

    Bientôt les amoureux vont quitter Montmartre pour changer de rive et  habiter notamment à l'hôtel Royer Collard (aujourd'hui disparu) près de la Sorbonne,  dans la chambre où avaient vécu un temps Verlaine et Rimbaud et à côté d'un autre couple, Léo Ferré et Madeleine.

L'histoire de Gainsbourg et Montmartre s'arrête là. Ses rêves d'être un grand peintre cesseront un peu plus tard.

        Il a épousé Elisabeth en 1951 et a divorcé six ans plus tard. Elle ne supportait pas les nombreuses conquêtes de son mari qui avouera: "Parce que je suis con... Parce que je suis polygame."

Gainsbourg et Montmartre.

   Nous pouvons encore citer quelques attaches avec Montmartre comme le cabaret "chez Madame Arthur" où il remplace son père au piano, ou les Trois Baudets où il rencontre Canetti qui le pousse à se lancer sur scène.

      C'en est fini du Gainsbourg de la Butte. On prétend que l'homme est l'enfant ce celui qu'il a été avant son adolescence... Serge Gainsbourg est donc l'enfant du montmartrois Lucien Ginsburg de la rue Chaptal et du boulevard de Clichy!

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Ellen Andrée fut une actrice d'un certain renom, interprète de Courteline, de Guitry, et choisie par André Antoine pour jouer dans Poil de Carotte de Jules Renard ou La Terre de Zola.

Pourtant, si son nom reste connu aujourd'hui c'est parce qu'elle a servi de modèle à quelques uns des plus grands peintres de son temps.

Ellen Andrée par Nadar

Ellen Andrée par Nadar

Ellen Andrée (1857-1925) commence tôt sa carrière d'actrice. Elle a 17 ans quand elle débute au théâtre du Palais Royal.

Elle jouera par la suite aux Variétés, à la Renaissance, aux Folies Bergères...ng>

Elle est vite remarquée par les artistes qui sont attirés par sa "présence", sa sensualité et sa bonne humeur.

Parmi les premiers à lui demander de poser, Manet n'est pas le moindre !

Manet. La parisienne (Ellen Andrée) 1874

Manet. La parisienne (Ellen Andrée) 1874

Dans la Parisienne (1874) elle est une femme élégante et digne, vêtue de noir. Etonnant tableau qui prend le contrepied de ce que son titre peut suggérer. La Parisienne n'est pas la coquette, piquante et accueillante qui fait fantasmer l'Europe mais une femme endeuillée, figure austère et hiératique, un portrait qui évoque Goya (la Marquise de la Solana).g>

Elle semble sortir du poème "A une passante" de Baudelaire:

(...) Longue, mince, en grand deuil, douleur majestueuse,

Une femme passa, d'une main fastueuse

Soulevant, balançant le feston et l'ourlet.

(...)

Car j'ignore où tu fuis, tu ne sais où je vais,

Ô toi que j'eusse aimée, ô toi qui le savais.

Manet. La Prune. (Ellen Andrée) 1878

Manet. La Prune. (Ellen Andrée) 1878

Peint quatre ans plus tard, le tableau "La Prune" donne une autre image de la femme. Ellen Andrée en bonne comédienne, peut jouer tous les rôles!

Elle est attablée dans un café, le verre avec le fruit et l'eau de vie devant elle. Le décor est celui de la Nouvelle Athènes que fréquentait Manet, place Pigalle. Les lignes du cadre à l'arrière-plan mettent en valeur le visage de la femme, une femme du peuple, soeur de celles que décrit Zola. Fatiguée, dans une attitude de laisser-aller, elle s'abandonne un moment, la cigarette éteinte, au plaisir d'un moment de solitude et de rêverie.

Manet. Chez le père Lathuille (1879)

Manet. Chez le père Lathuille (1879)

Dans le célèbre tableau peint chez Lathuille en 1879, on la retrouve avec à ses côtés Louis Gauthier-Lathuille, le fils du cabaretier.

Elle est de nouveau vêtue en bourgeoise, un peu raide, à la fois intéressée et sur la réserve devant un jeune homme sensuel et dragueur. A l'arrière plan, un garçon de café observe la scène. Il est l'image même du peintre ou de l'écrivain naturaliste (Zola, Manet) qui observent la société!

Ellen Andrée. Modèle à Montmartre. (Manet, Degas, Renoir...)

Quittons Manet et revenons en arrière, en 1874, quand Gervex (un authentique Montmartrois, né en 1852 dans le village que Paris n'avait pas encore annexé) peint Rolla en s'inspirant du poème de Musset. C'est Ellen Andrée qui pose pour lui mais exige que son visage ne soit pas reconnaissable!

.

"Henri Gervex répandit mon anatomie sur le lit de son "Rolla". Je ne tenais pas à être reconnue en cette Manon d'une tenue si abandonnée. Je recommandai à Gervex : surtout ne lui donnez pas ma figure!

Bref, pour le visage, c'est une brune qui posa...." ng>Ellen Andrée.

Ellen Andrée. Modèle à Montmartre. (Manet, Degas, Renoir...)

Elle n'a que 21 ans quand elle pose pour ce tableau et elle ne tient pas à compromettre sa jeune carrière.

De plus, elle subit encore l'influence du milieu familial et d'un père officier qui ne badine pas avec la morale!

Ellen Andrée. Modèle à Montmartre. (Manet, Degas, Renoir...)

Le tableau fait scandale et il est exclu du salon, ce qui assure sa célébrité! Les curieux émoustillés défilent en rangs serrés dans l'atelier de Gervex pour l'y voir!

Le poème de Musset nous présente un jeune débauché qui, écoeuré par sa vie sans idéal, décide de se suicider alors que Marie, la prostituée avec qui il a une liaison est étendue, abandonnée sur le lit.

J.K. Huysmans remarque surtout la figure masculine dans le tableau de Gervex. Il écrit :

"Le jeune homme regarde, regrettant et dégoûté, la fille inerte, avachie dans un long somme. Cette figure ravagée et sombre, détachée dans un flux de lumière blanche est vraiment belle. Dans ce dépoitraillé de costume, dans cette chemise au plastron et aux manches froissées, cet homme a grande allure et je vois dans cette fille éboulée, après des intimités haletantes, sur un lit, un coin de parisianisme et de modernité qui évoque en moi des souvenirs du grand et divin poète Charles Baudelaire."

Gervex. Avant l'opération. 1887.

Gervex. Avant l'opération. 1887.

Ellen Andrée pose pour un autre tableau de Gervex quelques années plus tard. Le tableau "Avant l'opération" s'intitulait en réalité "Le docteur Péan enseignant à ses élèves à l'hôpital Saint-Louis, sa découverte du pincement des vaisseaux"!g>

C'est un hommage à Rembrandt et à sa Leçon d'anatomie.

La fin du déjeuner; Renoir.

La fin du déjeuner; Renoir.

Renoir ne manque pas de la remarquer chez ses amis et il la fait poser pour plusieurs de ses toiles comme "la fin du déjeuner"....ong>

Ellen andrée. Renoir

Ellen andrée. Renoir

Le déjeuner des canotiers. Renoir.(1881)

Le déjeuner des canotiers. Renoir.(1881)

Dans le célèbre déjeuner des canotiers, elle est présente parmi les 4 personnages du groupe principal, autour de la table. A droite, assis à califourchon sur sa chaise, le peintre Caillebotte semble plus intéressé par la femme en face de lui que par sa voisine (Ellen Andrée) vers laquelle se penche le journaliste italien, Maggiolo.

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Renoir privilégie sa sensualité et sa grâce. Ell sera satisfaite du résultat et considérera que c'est lui qui aura été le plus fidèle à sa nature de femme libre et vivante.

L'Absinthe. Degas. 1873

L'Absinthe. Degas. 1873

Elle ne pense pas la même chose de Degas qui la fait poser pour son tableau "l'Absinthe".

Elle est assise à côté de Marcellin Desboutin dans le café de la Nouvelle Athènes, place Pigalle, où Manet avait déjà peint "la Prune".>

Degas donne à voir l'isolement des buveurs enfermés dans leur monde. Zola apprécie l'oeuvre et il dira à Degas, à propos de "l'Assommoir" : "J'ai tout bonnement décrit quelques uns de vos tableaux."

Ellen Andrée s'inquiète d'être assimilée à la femme alcoolique que le peintre a représentée. Elle insiste pour qu'il précise qu'elle était une femme tout à fait sobre et qu'il lui avait fait jouer un rôle de composition!

Ellen Andrée. Modèle à Montmartre. (Manet, Degas, Renoir...)

A force de fréquenter les peintres, Ellen Andrée finit par en épouser un!

En 1887, elle devient la femme de Henri Drumont, un vrai Montmartrois puisqu'il est né en 1859 dans la commune libre (comme Gervex), un an avant qu'elle ne soit rattachée à la capitale!

Près de la barque; Henri Drumont.

Près de la barque; Henri Drumont.

Laissons les derniers mots à Ellen Andrée qui évoque son existence d'artiste et de modèle :

"J'ai toujours été fourrée dans les peintres : Degas, Renoir, Manet... Ils m'ont tous fait mon portrait plus ou moins, souvent plutôt deux fois qu'une, mais j'ai perdu tout cela en des ventes, je partais pour l'Amérique, j'étais amoureuse..."

(Ellen Andrée par Jean d'Arc. Le Courrier Français 1891

Un coin d'atelier (1887) Edouard Joseph Dantan (Ellen Andrée)

Un coin d'atelier (1887) Edouard Joseph Dantan (Ellen Andrée)

Ellen Andrée. Degas (1876)

Ellen Andrée. Degas (1876)

Femme dans la rue. Degas. 1879. (Ellen Andrée)M

Femme dans la rue. Degas. 1879. (Ellen Andrée)M

Au café. Manet (1878) (Ellen Andrée)

Au café. Manet (1878) (Ellen Andrée)

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Peintres et artistes à Montmartre

Monuments et lieux célèbres de Montmartre

Les rues de Montmartre

Cimetière de Montmartre

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Publié le par chriswac
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Giorgione. La tempête. Accademia. Philippe Sollers.

    Après la mort de Sollers, j'ai voulu relire son Dictionnaire amoureux de Venise. Comme il y des années, alors que je ne connaissais qu'à peine la Cité des Doges, j'ai relu avec la même curiosité, voire étonnement, son attachement passionnel pour le tableau de Giorgione "La Tempête", exposé à l'Accademia.

   Sollers en parle comme d'une amoureuse que l'on voudrait n'avoir que pour soi seul. 

"Je voudrais le voler, le garder pour moi, dormir près de lui, être le seul à le voir matin et soir. Je ,voudrais survivre en lui, me dissoudre en lui, haute magie, alchimie."

Nous pouvons parler sans jeu de mots d'un "coup de foudre"!

Le tableau peint vers 1506 a provoqué beaucoup d'hypothèses et a fasciné plus d'un amoureux de la grande peinture occidentale. Il a fait l'objet de multiples interprétations avant celle de Sollers.

Voici quelques unes parmi les plus répandues.

 Le "berger" et la femme seraient Adam et Eve après avoir été chassés du Paradis protégé par ses murailles. Eve nourrirait son premier fils Caïn. L'éclair dans le ciel figurerait la colère divine. Il s'agirait alors d'une interprétation peu fréquente dont on peut trouver quelques exemples comme avec cette gravure de Nuremberg de 1493. Sur la droite Eve et ses deux enfants, Abel et Caïn, sur la gauche Adam.

      Une autre interprétation ferait du tableau une illustration d'un roman vénitien (de Colonna) qui connaissait un grand succès : "Le songe de Poliphile".

Le jeune homme est à la recherche de sa bien aimée. Il s'endort, son rêve l'entraîne à travers ruines et villes antiques à la découverte de sa bien aimée avec laquelle il part pour Cythère, l'île de Cupidon.

 Iasion et Demeter

 

  Une autre encore se réfère à l'Odyssée. Iasion tombe amoureux de Demeter avec qui il a un enfant, Ploutos. Zeus se venge de ce mortel qui a osé séduire une déesse en le foudroyant.

     N'oublions pas d'autres explications comme celle de figures allégoriques de la Force (l'homme et son bâton symbole de virilité) et la Charité (la femme donnant généreusement son lait). Cette représentation de la Charité était courante.

                                                  La Charité (Andrea Del Sarto)

    Aucune de ces interprétations n'a satisfait Sollers qui nous donne un conseil judicieux : nous asseoir devant le tableau, nous laisser envahir par lui avant d'émettre quelque hypothèse que ce soit.

"Restez simplement là, devant, taisez-vous, oubliez tout. Le tableau a lieu maintenant pour vous, pour vous seul. Il vous parle du temps par-dessus le temps. C'est sa vocation, sa grandeur, son calme."

"Sur la droite une femme aux trois quarts nue allaite un enfant, attentive, protectrice, un peu inquiète."

     "Sur la gauche, séparé de la femme par une rivière en ravin, un homme désinvolte, jeune, veste rouge, tenant un bâton plus grand que lui (...) Est-ce un père? Un fils? Un passant?

Ce bébé c'était lui dans une autre vie. Naissance d'un côté, virilité de l'autre. La culotte du jeune homme ne dissimule pas une proéminence lovée. Le bâton la souligne."

Sollers note la présence derrière le jeune homme de colonnes brisées qui seraient des tombes. Il fait du tableau une allégorie du temps et du cycle mort-renaissance.  L'homme a été le bébé. Il est passé par la mort. Il renaît, semblable et différent. "Il meurt et devient."

Giorgione. La tempête. Accademia. Philippe Sollers.

En arrière plan s'élève une ville sous l'orage. L'écrivain nous invite à regarder de plus près, à remarquer une touche blanche sur une terrasse, à nous approcher et reconnaître un héron tourné vers l'éclair, vers la tempête annoncée.

"Le musicien et libertin Giorgione s'amuse, puisque c'est là un symbole ancien de l'activité sexuelle frénétique."

Donc en arrière plan, la ville et la luxure et au premier plan, comme protégés de la tempête annoncée, une femme, un bébé et un homme, passés, présents, futurs.

Giorgione. La tempête. Accademia. Philippe Sollers.Giorgione. La tempête. Accademia. Philippe Sollers.

"On est encore en été. Le temps, ensuite, fait son oeuvre de destruction, comme le prouve, du même pinceau, le tableau d'avertissement solennel qui se trouve juste à côté de la tempête : La Vecchia, "La Vieille". C'est la même femme, cinquante ou soixante ans plus tard. Même regard, même intensité traversant les siècles, mais lisez l'étiquette qui remplace l'enfant au sein : COL TEMPO, "avec le temps". Une autre femme, la même, jeune et tranquille est déjà en train de reprendre le rôle dans les bosquets. Et ainsi de suite."

"L'homme, lui, le peintre, s'est éclipsé, mais il va revenir, toujours au même âge."

J'aime cette affirmation parce qu'elle dit au fond à quel point l'art permet de conjurer la mort. En effet Giorgione se serait représenté lui-même dans ce beau jeune homme en habit vénitien. Nous savons qu'il est mort en 1510, à 32 ans lors d'une épidémie de peste.

Nous le voyons aujourd'hui, toujours jeune, beau, énigmatique à gauche de cette "tempête". Orage des passions, violence du temps qui passe sans pitié. Eternité temporaire des créations humaines. Il est là devant nous, il est passé par la peste, par la mort, il est vivant.

Giorgione. La tempête. Accademia. Philippe Sollers.

Pour Sollers ce mystérieux tableau n'est rien moins qu'une image de la condition humaine. "Il est d'un temps nouveau : le plus que présent permanent."

Libre à nous d'adhérer ou non à son analyse. Libre à nous de nous asseoir devant La Tempête et de nous laisser happer par ce paysage, par sa poésie, par son mystère.

Liste des liens

Peintres et étude précise de certains tableaux

Peintres artistes célébrités de Montmartre

                                                      Garçon à la flèche (Giorgione)

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Publié le par chriswac
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Exposition à la Commanderie. Peinture et poésie. 21ème salon des Artistes Lepic-Abbesses.

Voilà que j'arrive une fois de plus après la bataille! L'exposition de peinture à la Commanderie est terminée depuis une semaine.

Le 21ème salon des Artistes Lepic-Abbesses a fermé ses portes le 7 mai!

 

    Cette expo est pourtant ce qui correspond le mieux à l'esprit du Montmartre que nous aimons, celui des rêveurs, des artistes.

Modeste, vivante, talentueuse... elle réunit des peintres qui aiment partager les couleurs de leurs rêves.

 

   Leur professeur, Christian Mangin, peintre lui-même les guide dans leur apprentissage.  Il n'a pas la grosse tête et son abord est chaleureux.

   J'ai choisi dans cet article quelques oeuvres exposées à la Commanderie et j'ai dû à regret écarter celles qui étaient encadrées sous verre. Mon appareil photo ne supportant pas les reflets et les irisations qui mangent dessins et couleurs.

Gabriel Froget

Gabriel Froget

   J'ai donc retenu quelques toiles qui m'ont aussitôt plu. Si j'excepte Gabriel Froget dont j'ai parlé récemment, ce sont des toiles peintes par des femmes. Moi qui aime tant Valadon, je reconnais que ça m'a fait plaisir, cette année où de grandes expositions redécouvrent la fécondité et l'originalité des femmes injustement négligées (Eva Anna Bergmann au MAM, Françoise Petrovitch au musée de la Vie Romantique, les femmes surréalistes au musée de Montmartre....)

 

     Dès l'entrée dans l'octogone néo Renaissance de la Commanderie, c'est le rouge qui attire mon regard. Et si le poète Alain Duault parle de "rouge comme un chat", voulant dire que le chat est si particulier, si beau, si étrange qu'il attire le regard comme le fait la couleur rouge,  avec Alice Sauvages, nous pourrions dire "rouge comme un ibis".

Exposition à la Commanderie. Peinture et poésie. 21ème salon des Artistes Lepic-Abbesses.

L'oiseau rouge s'impose, sur un carrelage bleu près d'une baignoire d'angle qui s'emplit non pas d'eau mais de feuilles vertes. La pièce s'ouvre sur la nature, sur les herbes folles et les fleurs qui tournent comme des moulins à vents. Atmosphère onirique, traversée du miroir bien naturelle quand on s'appelle Alice... et... Sauvages

 

D'Alice Sauvages encore cette "poupée" seule et fragile devant un vase au décor de tiges-tentacules, tandis que derrière la fragile protection de la verrière passe un oiseau armé d'un bec menaçant. Une scène comme un rêve que l'on livrerait à son analyste. 

 

D'elle enfin ces nuages qui se referment sur le soleil. Ce ne sont pas "les merveilleux nuages" de Baudelaire mais ceux qui font naître la nuit. Il faut vite profiter du dernier soleil qui va toucher l'horizon.

 

     C'est une autre artiste, Stéphanie Mc Corry qui a peint cette "orque". Curieusement, le tableau fait écho à la poupée rousse et à l'oiseau qui vole contre les vitres d'Alice Sauvages. Ici la fillette, protégée par la serre de verre, regarde sans peur l'animal qui semble sourire et prend des allures de dauphin alors qu'il est un un super prédateur, appelé par les Anglais "baleine tueuse". La fillette se sent à l'abri, elle ne craint pas ce "dauphin". Abri illusoire? Rencontre redoutée et espérée peut-être avec l'inconnu? Virginité menacée? Libre à vous de libérer votre imagination devant cette belle toile!

 

     Toujours de Stéphanie Mc Corry "La fête est finie". La jeune fille, une flûte à la main est lasse et pensive sur les divans qui ressemblent à des algues. La boule scintillante qui tournait au plafond est tombée. Des méduses flottent dans leur aquarium. Quelques serpentins survivent sur le sol. Une scène qui, une nouvelle fois, laisse libre cours à notre imagination. Quand peinture et poésie sont indissociables...

"Le Lecteur". Le garçon est happé par sa lecture mieux que par un écran. L'univers des contes et des aventures prend vie autour de lui, avec lui. Il s'envole avec la fusée  qu'il chevauche vers les galaxies. C'est "L'enfant et les sortilèges" mais apaisé, sans la violence du conte de Colette!

 

 

 

Deux toiles encore de Stéphanie Mc Corry. "La Cité des artistes", la nuit, sous un éclairage de réverbères qui fait briller les pavés. Paysage urbain qui sans artifices, sans trucages, transmet poésie et vague inquiétude.

"Batiment B" est lui sous un grand ciel bleu, précis, frappé par la lumière. En général à Paris, les bâtiments qui ne sont pas en façade se gagnent en passant des cours sinistre. Ici il revendique fièrement sa lettre B! Le soleil lui donne sa beauté et son assurance.

Exposition à la Commanderie. Peinture et poésie. 21ème salon des Artistes Lepic-Abbesses.

Avec Claude Vigneau nous découvrons des paysages apparemment plus classiques. Mais c'est oublier dans "Invararay" le ciel tourmenté et son miroir sur lequel le bateau rouge à côte du voilier noir flotte comme flottent les drapeaux.

Et que dire de ce paysage bucolique "Higland cattle" qui rappelle à la fois l'art que l'on dit à tort "naïf" de Rousseau et celui, atttentif et lumineux de Rosa Bonheur.

                                  Place Dullin. Théâtre de l'Atelier

Je ne résiste pas au plaisir de proposer deux toiles qui ne font pas partie de l'expo. Elles sont de Claude Vigneau et montrent notre Montmartre, comme le faisait Utrillo, avec fidélité et aussi, comme lui, sensibilité et poésie.

                                                    Rue Norvins

 

     Pour terminer en musique, un dernier tableau de Brigitte Galinon : l'Opéra Garnier avec un relief, une lumière, un charme qui nous font regretter de ne pas voir plus de toiles de cette artiste.

 

    Une belle découverte pour moi que ces peintres de grand talent et cet atelier dirigé par Christian Mangin. J'espère que l'année prochaine je serai plus attentif et présenterai dès le premier jour le 22ème salon des Artistes Lepic-Abbesses!

Je pense, en voyant ces toiles à ce qu'écrivait Janson :

"Il ne faut pas peindre ce qu'on voit, il faut peindre ce qu'on sent. La ligne du dessin doit toujours être un peu la ligne du coeur  .. prolongée."

Liens ;

Montmartre, les peintres les artistes.

                                               Claude Vigneau

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Publié le par chriswac
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Le tigre de Sarah Bernhardt. Cernuschi.

Sarah Bernhardt avait un tigre, couleur noir et or...

Il montait la garde dans son hôtel particulier et impressionnait les visiteurs...

Le tigre de Sarah Bernhardt. Cernuschi.

     La diva avait une passion pour les fauves et les félins, à la manière de son époque où rares étaient ceux qui se préoccupaient de la souffrance animale. N'est pas Louise Michel qui veut!

 

     Elle posséda, à certaines périodes de sa vie, une arche de Noé composée de caméléons, de singes, de pumas, de crocodiles.

Animaux dont elle se défaisait dès qu'ils devenaient encombrants.

Le tigre de Sarah Bernhardt. Cernuschi.

      Elle acheta même à Mr Cross un lionceau qu'elle exposa dans une cage dans son hôtel. Au bout d'une semaine la puanteur était telle que le lionceau fut renvoyé à son vendeur.

Le tigre de Sarah Bernhardt. Cernuschi.

Et son tigre? 

     Eh bien il entra chez elle et y resta des années malgré sa belle taille : 88 cm de haut, 1 m35 de long.

Le tigre de Sarah Bernhardt. Cernuschi.

     Son âge exact, nul ne le sait vraiment. Il a vu le jour entre le début du XVIIIème siècle et la première moitié du XIXème, au Japon, pendant l'époque Edo.

Le tigre de Sarah Bernhardt. Cernuschi.

   Il a été acheté par Siegfried Bing, célèbre vendeur d'art japonais qui participa à la mode japonisante dans la création française. Sarah en fit l'acquisition dans son magasin de la rue Chauchat "Fantaisies Japonaises" où il était exposé et faisait l'admiration de tous les amateurs.

Il lui en coûta 6000 francs, environ 25000 euros! 

Le tigre de Sarah Bernhardt. Cernuschi.

     Il est exceptionnel et mérite bien ce prix! De laque et d'or, il semble avoir été surpris et, queue dressée, se mettre en position d'attaque, les yeux (de verre) exorbités. 

Réaliste et fantastique à la fois, il impressionne et fascine….

Le tigre de Sarah Bernhardt. Cernuschi.

     La patte avant droite porte une encoche qui laisse penser que manque une partie de la sculpture. Peut-être une proie maintenue au sol...

Le tigre de Sarah Bernhardt. Cernuschi.

     Il se sentait bien chez Sarah, ne dérangeait personne, n'avait d'odeur que celle de l'encens qu'on faisait brûler devant lui...

Bref, il jouait son rôle décoratif à merveille jusqu'au jour où...

Le tigre de Sarah Bernhardt. Cernuschi.

     Nous sommes en 1895, Sarah joue dans une pièce de Victorien Sardou, "Théodora". Elle connaît toujours le succès mais ses dépenses folles menacent son équilibre financier.

   Il faut trouver au plus vite de quoi apaiser les créanciers dont la meute ne recule pas devant la gueule menaçante du tigre.

 

     Si l'on en croit Edmond de Goncourt, elle écrit à Cernuschi pour lui proposer d'acquérir l'animal :

" Je suis pauvre comme mon aïeul Job. Voulez-vous m'acheter 3000 francs un tigre que j'ai payé 6000 francs chez Bing? … Mais j'ai besoin d'argent tout de suite… Je m'adresse à vous, parce que mon tigre est superbe et japonais."

Le tigre de Sarah Bernhardt. Cernuschi.

    Et voilà comment , bradé à la moitié de sa valeur, le magnifique félin rejoint la collection Cernuschi.

    Il y est à l'honneur mais il garde quelque chose du prestige de son ancienne maîtresse car dans sa vitrine, son curriculum vitae rappelle qu'il fut "LE TIGRE DE SARAH BERNHARDT".

 

Le tigre de Sarah Bernhardt. Cernuschi.Le tigre de Sarah Bernhardt. Cernuschi.
Le tigre de Sarah Bernhardt. Cernuschi.Le tigre de Sarah Bernhardt. Cernuschi.

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Gabriel Froget exposition de peintures  à la Commanderie du Clos Montmartre.

 

  Pour la 2ème année la Commanderie accueille un peintre que nous avions découvert l'an dernier et qui nous avait impressionné par la précision de sa touche et l'ampleur de son imagination. 

Gabriel Froget exposition de peintures  à la Commanderie du Clos Montmartre.

La première toile qui attire notre regard et nous invite au silence et au voyage semble droit venue du romantisme allemand par son étrangeté et sa poésie. 

"La vie ne vient pas à nous".

Ce qui frappe tout d'abord c'est l'atmosphère de la toile. Celle d'un rêve ou d'un cauchemar avec ces trouées de lumière dans un ciel de plomb. Les couleurs, la précision, la composition nous disent que nous sommes en présence d'un peintre qui a sans doute été, comme tous les artistes en devenir, à l'école de grands devanciers, mais qui a dépassé le stade de l'imitation. 

Libre à nous d'interpréter cette vision. Devons-nous, à la seule force de la volonté, naviguer sur une eau épaisse et nocturne pour accoster enfin sur une île où grandit l'arbre de vie et où une possible rencontre nous attend?

Gabriel Froget exposition de peintures  à la Commanderie du Clos Montmartre.

   Mêmes teintes de gris et de miroir dans ce paysage romantique de montagnes, de lac, de château qui se confond avec les roches. "Peu de choses en somme". Tel est le titre de cet immense panorama sans autre trace d'humanité que ce château déserté. Mais en y regardant de plus près, on distingue une petite silhouette en marche. Peu de chose mais pourtant un vivant qui chemine dans l'implacable immensité du paysage.

Gabriel Froget exposition de peintures  à la Commanderie du Clos Montmartre.

     Retour de la couleur et du ciel avec cette grande toile "D'une relation compliquée". On pense bien sûr au Petit Prince et au lent apprivoisement nécessaire pour devenir amis et solidaires. Pourquoi ce titre? S'agit-il de la relation de l'homme avec la nature? Cette nature qui est là, éclatante, quand les monuments construits par l'homme sont en ruines? Quand l'homme fier de sa force combat les animaux sauvages?

Gabriel Froget exposition de peintures  à la Commanderie du Clos Montmartre.

C'est cette vision qui apparaît dans le ciel d'azur. Une vision qui semble appartenir à un autre monde que celui de l'enfant et du renard. J'aurais tendance à récupérer cette allégorie pour y voir l'espoir d'un monde réconcilié avec la nature tandis que subsiste, menaçant et prêt à repartir en guerre,  le désir qui se croit viril de dominer et détruire. 

 

Un arbre dont les feuilles attestent qu'il n'est pas mort, au bord d'un monde englouti où quelques sommets émergent des brumes...

C'est ce tableau que le peintre a choisi pour l'affiche de son exposition

                                                    "Ils étaient là".

Un tissu rouge est resté accroché à l'arbre, seule trace d'un moment heureux peut-être, d'une rencontre...  Dérisoire souvenir, comme le sont les ruines, de la vie qui se croyait immortelle. Voilà un tableau qui illustrerait les poèmes de Supervielle. 

C'est beau "D'avoir senti la vie, Hâtive et mal aimée, Et de l'avoir enfermée, Dans cette poésie".

Gabriel Froget exposition de peintures  à la Commanderie du Clos Montmartre.

                                 "La fin du cycle".

Magnifique toile, symphonie d'ombres et de lumières, d'éléments qui sont ceux d'une genèse où tout sera possible. Violence et fragilité, et toujours, perdue dans l'immensité, une silhouette, seule, témoin de la fin du monde et du renouveau. Toile romantique s'il en est. J'aime cet arbre tombé au dessus du gouffre et qui, s'il va mourir, va également permettre le passage d'une rive à l'autre.

Gabriel Froget exposition de peintures  à la Commanderie du Clos Montmartre.

D'autres toiles, si elles montrent la même maîtrise technique, se rapprochent du surréalisme. La sphère mystérieuse comme la pierre noire de 2001 de Kubrick, se déplace dans un monde minéral où les ruines elles mêmes sont falaises.

L'arbre si présent dans l'univers du peintre se tient debout comme une sentinelle. On ne sait quelle promesse de vie tient dans l'astre solitaire qui passe dans cet univers pétrifié comme passait la mince silhouette de "Peu de choses en somme" et comme était en attente celle  de "La vie ne vient pas à nous".  

Quelques dessins sont exposés dont celui que je préfère (je ne cherche pas à être objectif!)

                                                           Attente

L'exposition de Gabriel Froget se termine le 29 avril et je regrette d'avoir été absent et de n'avoir pu en rendre compte plus tôt.

Mais ce n'est que partie remise car je suis intimement persuadé que ce peintre ne s'arrêtera pas en si bon chemin. Son art maîtrisé va s'incarner dans des œuvres qui ne seront qu'à lui. Les influences s'estomperont pour laisser place au monde qui est le sien où lumières et ombres s'affrontent et où l'on sent la solitude et l'inquiétude combattues par un désir puissant de vie et de rencontre.

 

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 La place Ravignan.  La rue Feuchère. Enquête sur une place mystérieuse et une rue disparue.

Apparemment il aurait existé une place Ravignan à Montmartre si l'on en croit les clichés et cartes postales que l'on retrouve en abondance.

 La place Ravignan.  La rue Feuchère. Enquête sur une place mystérieuse et une rue disparue.

Et, mystère montmartrois, il en aurait existé non pas UNE mais DEUX! 

 La place Ravignan.  La rue Feuchère. Enquête sur une place mystérieuse et une rue disparue.

      La première aurait été la continuation de la rue Ravignan qui après quelques marches s'élargit devant le Bateau-Lavoir avant de reprendre son cours jusqu'à sa jonction avec la rue Gabrielle.

 La place Ravignan.  La rue Feuchère. Enquête sur une place mystérieuse et une rue disparue.
 La place Ravignan.  La rue Feuchère. Enquête sur une place mystérieuse et une rue disparue.

Elle faisait partie en réalité de la RUE Ravignan qui s'élargit sur une quarantaine de mètres après les quelques marches. Elle n'a jamais porté officiellement le nom de place, n'en déplaise aux nombreux clichés qui la présentent sous ce nom. Utrillo qui comme l'on sait, peignait souvent en reproduisant des cartes postales, a lui aussi appelé "place Ravignan" certaines de ses œuvres.

                                                        Place Ravignan (Utrillo)

    Ce qui est certain c'est que dès 1911, elle est détachée de la rue Ravignan pour devenir la place Emile Goudeau. Il n'empêche que de nombreux Montmartrois ont continué de lui donner un nom qu'elle n'avait jamais porté.

 

La rue Ravignan dépossédée de cet espace arboré continue son chemin vers les hauteurs comme une rivière qui disparaît soudain en s'enfonçant sous terre pour rejaillir, plus vigoureuse encore un peu plus loin. 

Rue Ravignan après la place Emile Goudeau (à droite rue Berthe, à gauche rue d'Orchampt)

 

          C'est au niveau de la rue Berthe que s'accomplit cette résurgence.

    Mais elle ignore notre chère rue Ravignan qu'elle va de nouveau être amputée, un peu plus loin, un peu plus haut. Cette nouvelle spoliation se fera à sa rencontre avec la rue Gabrielle.

C'est en effet à cet endroit qu'elle finit aujourd'hui sa course, rencontrant le petit immeuble où Picasso eut un atelier et où mourut son ami Casagemas.

 

   Naguère, la rue Ravignan ne s'arrêtait pas en si bon chemin, elle tournait quasiment à angle droit et poursuivait plein nord jusqu'à la rue Norvins. Seul son côté pair était bâti, du numéro 22bis au numéro 34. L'autre côté donnant sur un terrain devenu vague et inconstructible depuis que la guinguette "La Tour de Montmartre" avait été engloutie par un fontis.

Ancienne rue Ravignan devenue un des côtés de la place Clément.

Ancienne rue Ravignan devenue un des côtés de la place Clément.

La rue Ravignan arrivant rue Norvins. La boulangerie devenue bazar.

La rue Ravignan arrivant rue Norvins. La boulangerie devenue bazar.

Quelques vieilles maisons qui ont connu le temps où elles étaient rue Ravignan!

Quelques vieilles maisons qui ont connu le temps où elles étaient rue Ravignan!

Avant la création de la place Clément. On voit que l'endroit était appelé "Place Ravignan" et parfois "rue Ravignan".

Avant la création de la place Clément. On voit que l'endroit était appelé "Place Ravignan" et parfois "rue Ravignan".

  Exit la rue Ravignan et ses derniers numéros (transformés en numéros 2 à 12) lorsque fut créée par un décret de décembre 1905 (effectif en 1906) la place Jean Baptiste Clément.

sur la droite la rue Ravignan, sur la gauche la rue Feuchère et au fond la rue Lepic.

sur la droite la rue Ravignan, sur la gauche la rue Feuchère et au fond la rue Lepic.

Cette place est un triangle dont le côté nord est la partie extrême de la rue Lepic dont les numéros 97 à 101 sont devenus les numéros 7 à 11 de la place

                                     Arrière plan, la rue Lepic et le Réservoir.

 Le côté ouest était formé par une vieille rue, trop courte pour subsister, qui allait de la rue Ravignan à la rue Lepic. 

Il s'agit de la rue Feuchère dont les numéros 1 à 3 subsistèrent, augmentés d'un 5, sur la nouvelle place. 

Ancienne rue Feuchère (aujourd'hui place J.B. Clément)

Souvenons-nous un instant de cette modeste rue du haut Montmartre qui honorait le sculpteur Jean-Jacques Feuchère (1807-1852).

                    La rue Feuchère à gauche (un des rares clichés où elle est mentionnée)

Beaucoup de rues de Montmartre rendent hommage à des sculpteurs ou des graveurs, à commencer par Pigalle en passant par Pilon, Houdon, Coustou, Androuet, Girardon etc...

Jean-Jacques Feuchère malgré sa courte vie fut très sollicité et nous passons souvent à Paris devant ses sculptures ou bas reliefs en ignorant leur auteur...

Le cavalie arabe au pont d'Iéna (Feuchère)

Le cavalie arabe au pont d'Iéna (Feuchère)

   

Le passage du pont d'Iéna sur l'Arc de Triomphe (Feuchère)

 La liste serait trop longue mais contentons nous de mentionner son Bossuet de la Fontaine Saint-Sulpice, son cavalier arabe du pont d'Iéna, sa prise du pont d'Iéna de l'Arc de Triomphe, sa "Loi" place du Palais Bourbon, ses statues de la fontaine nord de la place de la Concorde...

 

Et voilà! Cette place Ravignan, comme celle située plus bas, N'A DONC JAMAIS EU D'EXISTENCE OFFICIELLE sinon dans la langue montmartroise qui donnait à ce terrain vierge le nom de la rue qui le bordait, le vieux chemin qui depuis des temps anciens montait, en courbes capricieuses jusqu'au cœur du village

 La place Ravignan.  La rue Feuchère. Enquête sur une place mystérieuse et une rue disparue.

Notre enquête s'achève sur ce constat qui évitera peut-être des recherches aux collectionneurs de cartes anciennes, dont certains sont des amis. 

                           Place Jean Baptiste Clément (Utrillo)

Nous quittons ce lieu haut perché avec notre Jean Baptiste (sans trait d'union, comme il le voulait pour se différencier de son père Jean-Baptiste Clément), communard, homme au grand cœur, Montmartrois d'âme et de corps puisqu'il eut non moins que 12 adresses sur la Butte, poète bien sûr. Une place où les merles moqueurs s'en donnent à bec joie et où nous revient sur les lèvres la chanson si souvent chantée par nos anciens, chanson qui évoque le printemps éphémère et la couleur des cerises, couleur de la  vie et du sang

Place Jean Baptiste Clément (Utrillo)

Place Jean Baptiste Clément (Utrillo)

 

J’aimerai toujours le temps des cerises:
C’est de ce temps-là que je garde au cœur
Une plaie ouverte!
Et dame Fortune, en m’étant offerte,
Ne pourra jamais fermer ma douleur…
J’aimerai toujours le temps des cerises
Et le souvenir que je garde au cœur!

 La place Ravignan.  La rue Feuchère. Enquête sur une place mystérieuse et une rue disparue.

Un grand merci à Pierre, ancien poulbot de la rue Lepic, d'avoir aiguillonné ma curiosité et de m'avoir transformé en enquêteur occasionnel!

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Rues et places de Montmartre

Peintres, artistes, célébrités de Montmartre.

 

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Publié le par chriswac
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Exposition Françoise Pétrovitch. Musée de la Vie romantique.

   Une belle rencontre avec une peintre rare, Françoise Pétrovitch, au musée de la Vie Romantique.

Le musée lui a donné carte blanche pour présenter ses œuvres...  

Le visiteur a ainsi l'impression d'être accueilli dans l'univers de l'artiste, comme dans sa maison. 

La première toile "dans mes mains" représente une adolescente, tenant tendrement un chien.  "C'est rose et ce n'est pas mièvre, c'est une adolescente d'aujourdhui, c'est une jeune fille vive et attentionnée."

Nous descendons dans la grande salle en sous-sol sous l'atelier d'Ary Scheffer. Ce qui frappe immédiatement c'est la paix, l'harmonie...

Nous  sommes invités à entrer dans les paysages mouillés, entre rêve et réalité. Ils sont des îles étranges, à la fois inquiétantes et en apesanteur. 

 

Exposition Françoise Pétrovitch. Musée de la Vie romantique.

Les plus beaux panneaux reprennent le thème du corps porté, soutenu par les bras de celui ou celle dont on ne voit pas le visage.

Les yeux sont fermés. Evanouissement ou mort? Corps sauvé ou cadavre déjà? C'est nous qui décidons, qui interprétons ces scènes puissantes. 

Le lavis laisse des traces sur les corps, comme des blessures, comme du sang. Mais ces mains qui se referment sur la lourdeur du corps sont le lien puissant qui unit les êtres. Ce lien qui porte secours et qui tente de remettre debout ceux qui sont tombés.

 

Exposition Françoise Pétrovitch. Musée de la Vie romantique.

Nous retrouvons ce thème dans la vaste salle qui servait d'atelier à Ary Scheffer. Cette fois les mains sont comme éclairées, vivantes, sur le cœur de celui qui est tenu, comme si la vie se réfugiait là et continuait de battre.

Exposition Françoise Pétrovitch. Musée de la Vie romantique.

Trois toiles formant triptyque représentent des adolescents. Les jeunes apparaissent souvent dans l'œuvre de Françoise Pétrovitch.

C'est l'âge des possibles, la période où l'on est pris entre le désir de rencontre et celui de solitude et de repli.

 Sur la gauche, deux jeune avancent les yeux ouverts contrairement à ceux qui figurent sur la plupart des autres toiles. L'une semble regarder vers le sol, l'autre regarder vers l'avant. Ils sont ensemble et seuls. Ce qu'ils ont en commun c'est la cigarette qui se consume.

Au centre, une des plus belles compositions de l'exposition, les jeunes sont deux encore, yeux clos. La fille semble parler. Le garçon tête baissée, les mains repliées dans les poches de son blouson reste silencieux. Rupture? Explication? Deux mondes séparés.

Sur la droite le garçon est seul. Sa cigarette est éteinte. Il est perdu dans ses pensées. Il est l'écho d'une autre solitude rencontrée dans la salle en sous-sol. Une jeune fille dans un monde qui se liquéfie autour d'elle.

 

Des toiles de plus petit format couvrent le mur sous les verrières. Les mains de la jeune fille entourent comme un nid l'oiseau fragile . Lèvres et ongles rouges ont les couleurs de la vie autour de l'animal fragile, couvert de bleus.

 

Les mains encore, toujours présentes, mains ouvertes pour donner ou recevoir... 

Mains qui se détachent, mains blessées, mains qui cherchent à se rejoindre encore...

Rare scène de tendresse. Mais les visages qui s'abandonnent expriment une grande tristesse. Une douleur, une douceur. Un deuil peut-être. Mère et fille, amie et amie, bleu et rouge et vert... mains que l'on devine réunies, serrées.

Main qui reçoit un oursin d'étoile bleue. Une blessure? Une promesse? 

Un des rares tableaux où les yeux ne sont pas fermés mais à la fois ouverts et aveugles. Les paupières ont-elles été inconscientes, en se levant, du danger d'abolir la frontière entre l'intérieur et le monde. Ne reste que le masque bleu, lèvres closes.

 

Il faut lever les yeux pour voir cette toile. C'est la seule de toute l'expo qui nous demande de regarder vers le haut. Vers l'espoirI

 

Il s'agit d'une jeune fille aux ongles jaunes, abritant la flamme de son briquet. Elle a été peinte le jour de l'invasion de l'Ukraine. Le visage frappé par la lumière est celui de la jeunesse, de l'avenir.

Exposition Françoise Pétrovitch. Musée de la Vie romantique.

Il faut quitter l'atelier pour rejoindre la maison d'Ary Scheffer qui abrite le musée de la Vie Romantique dans ce quartier de la Nouvelle Athènes où vécurent tant d'artistes du XIXème siècle.

 

Et tout d'abord George Sand qui vivait non loin de là avec Chopin. Hommage lui est rendu avec cette femme moderne qui fait penser à Jeanne Moreau et qui fume comme on revendique sa liberté, comme Sand fumait le cigare et portait le pantalon.

 

 

L'expo se termine avec cette rencontre d'une femme peintre et d'une écrivaine, libres toutes deux, engagées dans leur art et dans le partage.

 

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Publié le par chriswac
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Musée de Montmartre. Exposition Le Surréalisme au féminin ?

    L'affiche laisse espérer de belles découvertes et un voyage dans un mouvement foisonnant et briseur de frontières. Un voyage au féminin car les mâles surréalistes sont si connus et reconnus qu'on imagine mal une exposition ayant pour titre "Le Surréalisme au masculin".

Nous pouvions penser qu'enfin une injustice serait désignée et que nous allions remettre les montres, qu'elles soient molles ou non, à l'heure.

Dorothea Tanning. Un tableau très heureux. 1947

Dorothea Tanning. Un tableau très heureux. 1947

    Hélas il faut bien le dire, si le parcours est pédagogique et ne manque pas de panneaux explicatifs un tantinet rébarbatifs, l'éclatement, la dispersion sont au rendez-vous.

La matière était trop riche et la cinquantaine d'artistes retenues trop nombreuses pour que la rencontre avec elles puisse vraiment se faire.

Dora Maar. Les yeux. 1932-1935

Dora Maar. Les yeux. 1932-1935

   Précisons que l'exigüité du musée est peu adaptée aux grandes expositions (bizarrement la plus grande salle, celle du rez-de-chaussée est consacrée à une autre exposition).

Les grandes œuvres féminines, les chefs d'œuvre reconnus sont absents. Question de format sans doute et de budget peut-être. 

Rita Kernn-Larsen. 1930-1939

Rita Kernn-Larsen. 1930-1939

    Nous trouverons beaucoup de petits cadres, petites photos, petits dessins.... et peu de grandes toiles. Nous sommes prévenus il est vrai dès le palier. Je cite ce passage affiché dès l'accueil car il marque les limites, modestes, que se sont fixées les organisateurs :

Judith Reigl. "Ils ont soif insatiable de l'infini". 1950

Judith Reigl. "Ils ont soif insatiable de l'infini". 1950

"Conçue comme une hypothèse plutôt que comme une démonstration (là j'ajoute "hélas"), cette exposition propose un inventaire non exhaustif d'une cinquantaine d'artistes ou poètes dont les créations datées des années 30 aux années 2000 excèdent la date de dissolution officielle du groupe surréaliste (1969) (Là je rajoute "hélas"). Cette exposition tente de cerner ce que fut la part féminine du surréalisme et se veut une invitation à poursuivre les recherches sur un sujet infiniment complexe et varié.

    Claude Cahun. Autoportrait avec Marcel Moore et un chat.

Claude Cahun. Autoportrait avec Marcel Moore et un chat.

   

 

Tout est dit. Sujet complexe certes mais qui n'est guère clarifié tant sont nombreuses les pistes suggérées et jamais approfondies. Sujet varié certes qui aurait mérité un élagage plus qu'un embroussaillage (néologisme assumé).

Musée de Montmartre. Les jardins Renoir.

Musée de Montmartre. Les jardins Renoir.

    J'ai retenu de ma visite quelques œuvres pour vous donner envie peut-être d'aller au musée de Montmartre. De me contredire peut-être. De toutes les façons, on ne perd jamais sont temps quand on se rend dans ce lieu magique, veillé par la grande Suzanne Valadon.

Musée de Montmartre. Exposition Le Surréalisme au féminin ?

      Jacqueline Lamba. "La femme blonde" 1930. Artiste connue mère de la petite Aube qu'elle eut avec Breton, elle est liée à notre quartier puisqu'elle se produisit rue Marguerite de Rochechouart, en naïade, ou plutôt "ondine". Rappel de l'Amour Fou et du "Ici l'on dîne". 

"L'art, la poésie, c'est le précipité de la beauté dans l'émotion." (J. Lamba)

Musée de Montmartre. Exposition Le Surréalisme au féminin ?

      Paule Vézelay. Paysage, three horses. 1929. Un peu Dufy, un peu Chagall, mais tout à fait Paule Vézelay!

"Je suis certaine que les formes dans mes œuvres non figuratives, sont inventées et ne trouvent pas leur genèse dans des formes naturelles". (Paule Vézelay)

Musée de Montmartre. Exposition Le Surréalisme au féminin ?

Jane Graverol. Hautes herbes. 1946.

Référence claire au Douanier Rousseau et au rêve de Yadwiga. Le sommeil est attente de toutes les surprises, de tous les voyages. 

                                                Le sacre du printemps (1960)

    C'est le tableau qui a été choisi pour l'affiche de l'exposition. C'est un choix judicieux qui promet beaucoup au risque de la déception. Ici le surréalisme prend tout son sens, tremplin vers l'imaginaire, trouble du désir.... Le sein dénudé, le bec agressif, le rouge de la chemise... Chacun pourra divaguer, naviguer selon ses fantasmes! N'oublions pas que le Sacre du Printemps de Stravinsky met en scène le sacrifice d'une jeune fille offerte aux dieux.

Jane Graverol. Ni titre ni date. Ce livre surnage dans l'océan qui cerne un piédestal  survivant du désastre qui a anéanti la civilisation.

Le livre seul, menacé, vulnérable est encore vivant.  

"Être surréaliste est un état que l'on porte en soi ou non. Sans théorie, je possédais ce qui me fondait à eux." (Jane Graverol)

                                                 Valentine Hugo. Le Toucan. 1937.

Valentine Hugo est présente avec ce toucan-serrure et avec un dessin qui illustre le rêve qu'elle fit le 21 décembre 1929.

Elle a épousé l'arrière petit fils de Victor Hugo mais tous ceux qui étudient le surréalisme savent qu'elle a eu une liaison avec Eluard d'après Gala et avec Breton.

"Je peux dire que Paul Eluard et André Breton que j'ai admirés dans leurs œuvres depuis toujours et pour toujours m'ont sauvée du désespoir." (Valentine Hugo)

Ce qui ne l'empêcha pas de quitter le surréalisme en 1937!

 

Musée de Montmartre. Exposition Le Surréalisme au féminin ?

Une belle surprise avec cette toile, une des rares de cette importance dans l'exposition : "Couple d'oiseaux anthropomorphes" de Suzanne Van Damme (1946).

 

Elle est belge comme de nombreux surréalistes mais vient à Paris où elle vit plusieurs années à Montmartre. On aurait aimé voir quelques toiles de cette importance de Léonor Fini par exemple qui n'a droit qu'à une aquarelle de petit format alors qu'elle est sans doute la surréaliste la plus emblématique du rêve, de la poésie, de la sensualité!

                     Léonor Fini. L'homme entre deux âges et deux maîtresses. 1961

 

    On se consolera peut-être avec le beau tableau de Leonora Carrington, "Sans titre" (1929), d'un imaginaire proche de celui de Léonor Fini. La même élégance, la même étrangeté, la même poésie. J'allais dire le même œuf!

"Je n'ai pas eu le temps d'être la muse de qui que ce soit... J'étais trop occupée à me rebeller contre ma famille et à apprendre à être une artiste." (Léonora Carringtam)

Mimi Parent. Sans titre. 1961

Mimi Parent. Sans titre. 1961

    Mimi Parent est une des artiste les plus présentes dans l'exposition. Une grande broderie (cliché de l'occupation féminine) reprend le thème de l'oiseau et de la femme (cliché de la peinture mythologique). 

                                                 Mimi Parent. "Léda". 1997

Bien que très tardive, cette "boîte" correspond bien à l'élan surréaliste qui entraînait et fusionnait les arts jusque là séparés, peinture, sculpture, poésie....

"La fête reprendra, mais spontanément; la braise est là, il suffira d'un jour de grand vent." (Mimi Parent)

                                          Rachel Baes. "La première leçon" 1951

Avec Rachel Baes, la jeune fille-enfant habillée comme une poupée est enfermée dans une pièce sans issue, les mains liées. Sexualité, violence, viol, innocence pas si innocente...

"Je n'aime pas l'hypocrisie, je n'aime pas les hypocrites. C'est peut-être pour ça que je peins des petites filles un peu hypocrites. (Rachel Baes)

L'exposition se termine avec une ouverture sur l'après surréalisme et la fécondité du mouvement. Une toile de Toyen nous attend dans la dernière salle. Toyen! Sans doute la plus grande peintre surréaliste! Une formidable exposition lui a été consacrée au Musée d'Art Moderne, vaste, claire, sans pathos, une exposition idéale qui permettait une vraie rencontre.

                                           Toyen "En proie à leurs regards". 1957

 

Nous quittons l'exposition pas franchement convaincante avec une légère frustration et beaucoup de questions.

Mais.... mais... Que ne l'avais-je remarqué? L'affiche annonçait la couleur! Je n'avais pas vu le point d'interrogation qui suivait le titre.  Un immense point d'interrogation!

 

 

 

Tout est dit! 

 

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Publié le par chriswac
Publié dans : #MONTMARTRE. Rues et places., #MONTMARTRE Peintres.Artistes.Clébrités
Rue de Dunkerque (partie centrale)

Rue de Dunkerque (partie centrale)

     Elle descend en ligne droite entre le boulevard Marguerite de Rochechouart au niveau de la place d'Anvers et la Gare du Nord où elle cède la place à Napoléon III (ancienne place de Roubaix) avant de reprendre son chemin sur une cinquantaine de mètres jusqu'à la rue d'Alsace. 

Rue de Dunkerque à partir du Magenta, vers la Gare du Nord.

Rue de Dunkerque à partir du Magenta, vers la Gare du Nord.

La numérotation voudrait qu'on dise plutôt qu'elle monte de la rue d'Alsace jusqu'au boulevard de Rochechouart mais comme nous avons Montmartre pour épicentre, nous la parcourrons en commençant par les derniers numéros, près du square d'Anvers.

Rue de Dunkerque. Montmartre. 1) Entre le boulevard de Rochechouart et la rue du Faubourg Poissonnière.. Ancienne rue Neuve du Delta. IXème arrondissement.

Nous pouvons la diviser en trois parties pour raconter sa création.

La plus ancienne partie court sur plus de 500 mètres entre la Gare du Nord (faubourg Saint-Denis) et le faubourg Poissonnière.

Son plan de lotissement est tracé en 1827 sur les terrains de l'Enclos Saint-Lazare.

Il faudrait des centaines de pages pour retracer l'histoire de ce clos qui remonte au XIIème siècle quand il fallut isoler les lépreux dans des bâtiments entourés de murs (sous la protection de Saint Lazare).  Au XVIIème siècle c'est là que St Vincent de Paul créa les Filles de la Mission et recueillit les orphelins. C'est un des lieux les plus chargés d'histoire de Paris.

 

 La rue nouvellement créée prend le nom des Abattoirs de Montmartre situés plus haut pour remplacer les nombreuses "tueries" insalubres. Elle gardera ce nom jusqu'en 1847 pour prendre celui de Dunkerque. Plusieurs rues du quartier rendront hommage à des villes du nord de même que sur la façade de la gare, des statues de pierre les représenteront telles des déesses antiques.

 

 La rue était prolongée à l'est par une impasse "le cul de sac Saint-Lazare" qui devint "impasse des Abattoirs" puisqu'elle prolongeait la rue du même nom.

Enfin quand Dunkerque remplaça 'les Abattoirs", l'impasse transformée en rue, fit partie de la nouvelle rue.

Rue de Dunkerque au boulevard de Rochechouart (en arrière plan l'Elysée Montmartre)

Rue de Dunkerque au boulevard de Rochechouart (en arrière plan l'Elysée Montmartre)

    La dernière partie va de la rue du Faubourg Poissonnière au boulevard Marguerite de Rochechouart. 

C'était à l'origine la rue Neuve du Delta qui portait ce nom à cause du jardin d'attractions sur lequel elle avait été lotie en 1839.

Ce grand jardin attirait de nombreux parisiens émerveillés par les spectacles de feux d'artifice de Ruggieri. Il avait remplacé les "Promenades Egyptiennes" ou avaient été inaugurées les ancêtres des montagnes russes. C'est à la suite de nombreux accidents que les Promenades Egyptiennes avaient cédé la place au jardin du Delta.

                          La Place du Delta, la rue de Rochechouart

La rue du Delta voisine et la place du même nom en perpétuent la mémoire.

 

La rue Neuve du Delta fut réunie en 1854 à la rue de Dunkerque et prit son nom. Et voilà! Nous avons notre rue en son entier sur 1km 100. 

Nous commençons notre balade par la fin de la rue, comme nous l'avons dit, là où elle est montmartroise. Elle débouche sur la place d'Anvers, devant le boulevard Marguerite de Rochechouart, à deux pas du square d'Anvers.

Débouché de la rue sur le boulevard, vers l'Elysée Montmartre et le métro Anvers

Débouché de la rue sur le boulevard, vers l'Elysée Montmartre et le métro Anvers

Rue de Dunkerque. Montmartre. 1) Entre le boulevard de Rochechouart et la rue du Faubourg Poissonnière.. Ancienne rue Neuve du Delta. IXème arrondissement.

Le Café des Oiseaux côté impair nous invite à prendre un peu de hauteur afin d'éviter les ordures qui s'entassent depuis près de trois semaines. Mes photos éviteront donc les rez-de-chaussée nauséabonds et grouillants de rats! Un seul exemple suffira (suffi- rat)

            84 rue de Dunkerque. Entrée de l'espace de réunions de l'hôtel "Le Régent"

     Le café des Oiseaux est cité dans l'Amour Fou  de Breton.

Le boulevard, le square d'Anvers et à gauche la rue de Dunkerque et le café des oiseaux.

C'est là que l'artiste rare, peintre de talent, Jacqueline Lamba, lui donne rendez-vous, pour, après deux heures de conversation, déambuler dans les rues d'un Paris nocturne et magique.

                                      Le cirque (Jacqueline lamba)

                                        Jacqueline Lamba et Breton

Cette femme "scandaleusement belle" sera la 2ème femme de Breton et la mère de leur fille Aube. Elle est à peine mentionnée hélas dans l'exposition que le musée de Montmartre consacre jusqu'en septembre 2023 aux femmes surréalistes.

 

Rue de Dunkerque. Montmartre. 1) Entre le boulevard de Rochechouart et la rue du Faubourg Poissonnière.. Ancienne rue Neuve du Delta. IXème arrondissement.

La partie de rue qui va jusqu'au croisement avec l'avenue Trudaine possède de beaux immeubles haussmanniens construits en même temps que l'avenue. Ils sont comme il se doit, de même hauteur (6 étages) avec décoration de moulures et de corniches avec balcon à l'étage noble (2ème) et balcon filant au 6ème.

                                                                 Le 85

                                                Le 81

Le 81

                                       Le 83

Le 83

Nous pouvons voir sur la façade du 83 le nom de l'architecte et la date de construction : De Lalande. 1870.

Cet architecte est très en vogue sous le 2nd Empire et on lui doit plusieurs théâtres, notamment le théâtre de la Renaissance qui a survécu au vandalisme des années Pompidou.

C'est à lui que l'on doit le beaux immeubles du début (côté pair) de l'avenue Trudaine.

Une ancienne photo rappelle qu'il y eut au 83, un restaurant depuis longtemps disparu.

 

Le 87

Le 87

Rue de Dunkerque. Montmartre. 1) Entre le boulevard de Rochechouart et la rue du Faubourg Poissonnière.. Ancienne rue Neuve du Delta. IXème arrondissement.

Il y eut au 87 un hôtel du nom de Reina. Sans les cartes anciennes nous n'en saurions plus rien.

Le 76 et le 9

Le 76 et le 9

Une curiosité sur l'immeuble à pan coupé du 76, c'est qu'il affiche deux numéros, l'un sur la rue de Dunkerque (76) et l'autre sur la rue Gérando (9).

La rue, hélas, n'a pas abrité beaucoup de peintres dans un quartier qu'ils avaient pourtant investi. Revenons donc vite au 91 où vécut et mourut Alexis Kalaeff.

 

Ce peintre né en 1902 en Russie se réfugie à Paris en 1926 où il suit les cours d'Othon Friesz. Il est classé parmi les Expressionnistes bien que son oeuvre présentât bien des facettes.

                                           Préparation pour le bal masqué

Il peignit des paysages, des scènes de cirque (il fréquentait en voisin le Médrano)... des scènes religieuses. Ce dernier aspect révèle son âme torturée qui fait de la passion du Christ l'image même de la condition humaine.

                                                                L'accusé

Après la mort de son grand amour, sa femme Claudine, il se suicide dans cet immeuble du 91. Il a 79 ans. J'aurais aimé le connaître.

Nous aurions bu un verre au Café des Oiseaux et j'aurais pu lui dire que je l'admirais.

                                     Femme au flambeau

Nous arrivons au croisement avec la rue Marguerite de Rochechouart. La rue descend en droite ligne plein est.

 

Rue de Dunkerque. Montmartre. 1) Entre le boulevard de Rochechouart et la rue du Faubourg Poissonnière.. Ancienne rue Neuve du Delta. IXème arrondissement.

Le 57 est un des rares immeubles à porter, gravé dans la pierre, le nom de son architecte : F. Ratier 1872.

Je n'ai rien trouvé sur cet architecte qui serait le bienvenu pendant ces grèves, pour contrer la gent des muridés qui prolifère dans nos poubelles!

Cette section qui va jusqu'à la rue du Faubourg Poissonnière (38 côté pair et 51 côté impair) n'a pas grand chose à nous raconter. Nous y rencontrerons quelques immeubles haussmanniens..

                                                                     Le 54

      Nous trouverons cependant un intérêt historique à un groupe d'immeubles semblables , les 46-48-50 qui ont été construits par la Compagnie d'Assurances "La Confiance" en 1880.

Les Assurances en effet investissaient dans l'immobilier et le bon rapport financier des locations. Nos immeubles de la rue de Dunkerque font partie d'un vaste ensemble qui donne en partie sur la rue du Faubourg Poissonnière. Adieu au style haussmannien... les façades de pierres sont simples et sans décors.

          Ce qui n'est pas le cas du bel immeuble fin de siècle du 44

Jetons un œil sur le 43.

                                                              43

     Sa belle façade de 1930 développe ses baies vitrées derrière lesquelles il y eut le siège des Editions des frères Offenstadt. Les quatre frères s'étaient spécialisés dans la presse enfantine et leurs journaux connaissaient une grande diffusion. Parmi leurs valeurs les plus sûres et les plus impertinentes figuraient le Pieds Nickelés qui amusaient petits et grands.

                                   

 

     Sous le régime de Vichy, ils subirent les lois antijuives et furent spoliés. Maurice mourut en 1943 à Nice où il s'était réfugié, Nathan mourut au camp de Drancy. Les frères rescapés ne retrouvèrent leurs biens qu'en 1946 mais ne parvinrent pas à reconquérir le marché de la presse pour jeunes où régnaient Spirou, Tintin et autre Mickey.

 

Aujourd'hui se trouve dans cet immeuble le siège de La France Insoumise. Peut-être les Pieds Nickelés inspirent-ils leurs membres ?

Croisement avec le Faubourg Poissonnière (vers square d'Anvers)

Croisement avec le Faubourg Poissonnière (vers square d'Anvers)

Cette partie montmartroise de la rue de Dunkerque, s'arrête avec le 9ème arrondissement au croisement avec le Faubourg Poissonnière (n°51 et n°38). De l'autre côté, nous serons dans le 10ème arrondissement. Nous arpenterons une prochaine fois la deuxième partie, la plus ancienne, qui va vers la Gare du Nord, ce palais des voyages voulu par Napoléon III. 

                   Croisement avec le Faubourg Poissonnière vers Gare du Nord.

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