Boulevard de Rochechouart (2) Deuxième partie, numéros pairs.

Après être partis de Barbès pour nous balader sur le Rochechouart, nous arrivons à la station Anvers bien connue des touristes du monde entier!

      Le génial Guimard l'a conçue avec ces hampes qui ressemblent à des mantes religieuses et ces boucliers floraux qui sont depuis quelques années la proie de voleurs qui les dessoudent de nuit pour les revendre à prix d'or à de riches amateurs américains ou chinois!

L'endroit est toujours très fréquenté. Il y sévit des pickpockets assez habiles pour vous délester de votre porte-feuille ou de votre téléphone avec la légèreté d'une libellule qui vous effleurerait à peine!

      A l'angle de la rue de Steinkerque, l'Elysée Montmartre dresse son fronton où une danseuse de french cancan lève la jambe. Elle n'est pas née à Montmartre mais est venue en 1900 du bal Mabille, avenue Montaigne.

L'Elysée Montmartre est une des salles mythique de Montmartre. Créée en 1807, la salle de bal ouvrait sur de grands jardins qui seront sacrifiés à la fin du XIXème siècle pour laisser place au Trianon.

C'est là que fut créé le fameux cancan, dansé par des personnages immortalisés par Lautrec : Valentin le Désossé, Grille d'égoût, la Goulue qui s'illustrera ensuite au Moulin Rouge.

On ignore souvent qu'en 1894 la salle fut remaniée et que fut utilisé pour sa structure le Pavillon de France de l'exposition Universelle de 1889, édifié par Eiffel !

L'incendie de 2011 a causé de considérables dégâts mais a eu la délicatesse d'épargner la façade...

La partie donnnant sur la rue de Steinkerque a été plus endommagée.

Dans l'immeuble de droite, a vécu Henri Casadesus.

Henri Casadesus (1879-1947) est un compositeur d'opérettes et de musique de films; il est surtout un remarquable instrumentiste, inégalé dans la maîtrise d'un instrument dont le nom est ravissant : viole d'amour!

Il est aussi le père de trois filles exceptionnelles, artistes rares : Catherine, violoniste, Jacqueline, pianiste et Gisèle, comédienne!

                                                La salle avant restauration

Au 80, le Trianon récemment restauré a retrouvé son élégance. En 1894, le Trianon-Concert accueillait les plus grandes vedettes parisiennes comme Mistinguett.

Victime bien avant l'Elysée d'un incendie terrible, il fut reconstruit en 1902 par un brillant architecte, celui-là même qui imagina le plus beau pont de Paris, le pont Alexandre III, Joseph Cassien-Bernard.

Fréhel, Yvette Guilbert s'y produisirent avant que la salle devienne avant guerre un cinéma. Le Trianon, inscrit aujourd'hui à l'inventaire des Monuments historiques assure de nouveau sa vocation de salle de spectacle... Une des plus belles de Paris.

Au rez de chaussée, le café-restaurant "le Petit Trianon" a été restitué tel qu'il était dans les années 20.

Au 84 un bazar de souvenirs a pris la place du Chat Noir. Le premier Chat Noir, celui de Salis, celui où Bruant s'est fait connaître...

                        Rare photo du 1er Chat Noir, 84 boulevard de Rochechouart.

     Pour l'histoire du Chat Noir, ciquez sur ce lien : Le cabaret du Chat Noir. 

Le 86 porte sur sa façade une inscription qui rappelle l'annexion de Montmartre à la capitale en 1860 et la création du XVIIIème arrondissement

Les 94 et 96 sont de petits immeubles qui datent du début du boulevard et font partie du plan de protection patrimoniale (parfois surprenant).    

      Le 94 à pan coupé donne sur la rue Dancourt qui monte vers la place Charles Dullin et le Théâtre de l'Atelier.

Au 104, un des plus beaux immeubles du boulevard, un des plus originaux, libre interprétation 1900 de l'Orient.

Alfred Besnard en est l'architecte. J'ai  recherché d'autres réalisations de cet architecte. Je n'ai trouvé que l'atelier de  Pissaro à Eragny sur Epte... Ce bel immeuble d'opérette suffit à sa gloire!

Au 106 une grille protège un escalier privé qui conduit à la Villa Dancourt, gros ensemble d'immeubles tristes construits en 1932.

Le terre plein central du boulevard est devenu une promenade appréciée des parisiens et des touristes.

Il faut seulement se méfier des cyclistes qui filent nez au vent, sûrs de leur bon droit et de l'impunité dont ils jouissent maintenant qu'ils peuvent prendre les sens interdits, brûler les feux rouges et renverser les vieilles dames. C'est leur manière à eux de lutter contre la pénurie des logements à Paris... 

Au 108 a vécu un jeune immigré polonais, poète et écrivain qui a un homonyme parmi les acteurs américains : Elie Wallach. Entré dans la Résistance, il fut arrêté et fusillé au Mont Valérien. Il avait 21 ans.

Le 112, construit en 1880 a abrité à partir de 1900, la Goulue, venue y vivre avec son nouvel époux prestidigitateur.

                   Le Petit Journal : La Goulue et son mari attaqués par un puma (1904)

Elle a alors 34 ans et elle ne danse plus. Son mari devenu dompteur, elle le suit et devient elle même dompteuse de lions... 

Aux 118 et au 120, l'immeuble de la Cigale et de la Boule Noire. La Boule Noire était un bal qui avait succédé à la Belle en cuisse. C'est dans ses murs que naquit le premier quadrille des lanciers en 1857.

                                                          Rigolboche

C'est encore dans ses murs que se réunit en 1871 un club de femmes dont faisait partie la danseuse de french cancan Rigolboche. 

      En 1887, la Boule Noire laisse la place à la Cigale.

L'établissement connut divers avatars. On le voit ici tel qu'il était à ses débuts et qu'il accueillait les vedettes de la fin de siècle...

Le voici après sa première métamorphose... à l'époque de sa gloire.

C'est une salle à la mode, le lieu de rendez-vous des célébrités montmartroises. Willette en peint le plafond aujourd'hui disparu...

 La Cigale cesse de chanter en 1927 pour être remplacée par la Fourmi. Mais en 1940, comme la plupart des cafés-concerts du boulevard, le music-hall disparaît au profit d'une salle de cinéma. 

Dans les années 60, elle se spécialise dans les films classés X et se dégrade lentement...

Il faut attendre 1987 pour que la salle réhabilitée et remaniée par Philippe Starck se remette à chanter... 

Avec la rue des Martyrs qui sert de frontière entre le Rochechouart et l'Avenue de Clichy s'arrête notre balade d'aujourd'hui.

Il nous reste à revenir sur nos pas pour inspecter le côté des numéros impairs... 

Ce sera pour la prochaine fois!

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Liens :

Boulevard de Rochechouart. première partie.

Tous les articles sur les rues de Montmartre. Classement alphabétique      

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