Un dimanche de printemps, quatre générations et un chat sont réunis dans un jardin près de Paris.
C'est pour fêter les 90 ans d'une mère, grand-mère, arrière-grand-mère...
Sous le regard attentif de Lola qui malgré son petit air modeste apprécie moyennement l'invasion de son domaine.
C'est le moment d'en griller une et de faire la nique aux anti fumeurs...
Ma mère se promène dans le monde avec une petite fumée au-dessus de la tête.
Lola s'installe sur un transat, histoire de rappeler qu'elle est chez elle.
Pas de discours, pas de grandes phrases... L'affection se dit dans la banalité comme pour ne pas peser, ne pas en rajouter.
Lola fait sa toilette. Elle ne pense pas au temps qui passe. Elle ne sait pas qu'elle a, dans son univers de chat, un âge pas très éloigné de celui de l'héroïne de la fête. Les chats ne font pas tant d'histoires.
On souffle sur les bougies. Peu de spectateurs attentifs en ce moment crucial! De vieux amis de toujours, quelques enfants... Les autres vivent leur vie aux quatre coins du jardin
90 roses... Nous ne sommes pas loin de la roseraie de l'Haÿe. A quelques dizaines de mètres!
Donc il y a encore pour toi, ma mère une bonne réserve d'années!
Il paraît que Lola a sept vies... Plusieurs roseraies...
Pas d'anniversaire sans cadeaux. Mais le plus beau cadeau, celui qui manque le plus dans notre monde de tapoteurs d'internet, c'est la tendresse...
La tendresse que tu réclames, maman, et qu'il nous est si difficile de donner. Nous les aînés, sommes des handicapés de la tendresse. Pourquoi?
Ce n'est pas le bon jour pour se poser la question.
Lola sait ce que c'est... Elle en est tout ensoleillée...
Le bonheur de ma mère ce sont ses petits enfants. Le lourd passé s'allège grâce à eux.
Bon! Certains invités s'en vont...
Et voilà... C'est une belle après midi qui s'achève...
Derrière les sourires et les regards de chacun, tant d'images, tant de rêves, de déceptions parfois...
Mais ce n'est pas en famille qu'on les dit. J'ai aperçu mes neveux et mes nièces. Ils sont beaux. J'ai pensé à un recueil de Supervielle: Les Amis Inconnus.
Voilà, c'est ça... Les Neveux Inconnus...
Mon petit frère ma petite soeur... un peu moins inconnus
A l'année prochaine! A dans dix ans! Dans vingt ans (c'est moins sûr)!
A la prochaine occasion de tenter de se dire sans le dire que l'on s'aime!
Minouche sait le dire... elle attend le retour de sa maîtresse pour ronronner contre son coeur...
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Coeur tremblant
Dans un jardin de la banlieue
Où dort un chat sur l'herbe bleue
Combien de gens sont réunis
combien d'oiseaux pour un seul nid
Dans son fauteuil au beau milieu
Une femme a le coeur tremblant
Devant les bougies redoublant
Leur feu dans le tain de ses yeux
Une femme avec ses enfants
Et les enfants de ses enfants
Se dit qu'il n'est pas déplaisant
De fêter quatre-vingt-dix ans
C'est ainsi que la vie est faite
Après les deuils et les défaites
Pour une heure ou deux on s'arrête
On descend de notre charrette
C'est un moment d'éternité
C'est un caillou jeté en l'air
Un caillou qui semble hésiter
Suspendu entre ciel et terre
Je t'aime au fond et c'est assez
Pour ne plus penser au passé
Pour oublier l'enfant cassé
Qui tant rêvait d'être embrassé
Je t'aime au fond et c'est pourquoi
Je n'espère plus rien de toi
Vis cent dix ans et des poussières
Ne va jamais au cimetière
Je t'aime au fond et je te dois
D'être vivant et amoureux
De tracer avec un seul doigt
Un coeur sur le sol poussiéreux
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Liens : Mère
Poème: Celle qui n'a jamais pleuré.
Poème. Mère. Quatre-vingt-dix ans.
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